Bien vivre sa mort

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L’hiver touche à sa fin. Les derniers frimas de mars, dans un ultime effort, tentent vainement de faire reculer l’inéluctable renaissance de la nature bourgeonnante. L’air se remplit du chant des hirondelles qui, si elles ne font pas le printemps, y contribuent quand même un peu. Les promesses de fleurs jusqu’alors emprisonnées par une étouffante chape de glace sont soudainement libérées dans un feu d’artifice de senteurs et de couleurs. Ah oui, décidément, quoi de plus beau que le printemps. C’est le moment idéal pour parler de la meilleure façon de mourir.

Car il y a mourir et mourir. On peut trépasser égoïstement dans un total anonymat entouré de cartons sales et recouvert de sa dernière bouteille de Postillon - le Vin des Champions - sucée jusqu’à la lie. Ou on peut préférer décéder avec classe, sous les vivats d’un public exigeant qui saura apprécier un départ d’autant plus réussi qu’il a de bonne chance d’être définitif. Ne croyez pas ce que vous avez lu sur l’affiche d’un vieux James Bond : on ne meurt qu’une fois. Alors autant bien le faire.

Mais la mort ne s’improvise pas. On ne va pas partir comme ça sur un coup de tête[1]. Il faut bien étudier le problème, choisir le bon moment, le bon endroit, la bonne méthode et ne pas négliger certains détails qui feront la différence entre l’oubli et la postérité comme la dernière phrase qu’on va prononcer, le modèle du cercueil, le montant de l’assurance-vie ou encore l’épitaphe.

Et oui. Bien mourir, c’est plus compliqué qu’il n’y parait. Et vous n’aurez peut-être pas assez de toute une vie pour y penser. Sauf si vous étudiez attentivement ce guide pratique du savoir-mourir qui vous aidera dans toutes les étapes du processus. Bonne lecture.

Quand mourir ?

La classe.

Le meilleur moment pour mourir est vers la fin de sa vie, en tout cas pas trop avant ni trop après. On a déjà vu des petits malins mourir trois jours après leur décès en prétextant je ne sais quelle histoire de résurrection et de filiation divine ou quoi ou qu’est-ce. Résultat, personne ne se souvient d’eux aujourd’hui. Ils l’ont bien cherché. Au contraire, de nombreux personnages illustres ont opté pour la solution la plus à même de leur assurer gloire et fortune : mourir pile poil au moment de leur dernière journée, voire carrément de leur dernière heure. Un sens du timing qui nous permet aujourd’hui à tous de nous rappeler Victor Hugo, Jacques Chirac ou autre John Fitzgerald Kennedy (senior et junior).

Deux autres paramètres temporels sont également à considérer : son âge au moment du décès et le moment de la journée adapté.

L’âge idéal pour mourir

Oui, bien sûr, c'est tentant... Mais encore un peu tôt.

Mourir en tant qu’enfant est totalement stupide. Franchement, qui se souviendra de vous si vous vous faites écraser par une voiture en sortant de la maternelle ? Personne et vos parents vivront avec cette honte sous les quolibets de leurs voisins le restant de leurs jours. Mais il y a pire. Il y a ceux qui poussent le vice et le sens de l’oxymore jusqu’à sortir de l’utérus de leur mère en tant que mort-nés ! Non mais franchement quel intérêt. D’ailleurs jusqu’à il y a peu, ces lâches n’avaient même pas droit à une sépulture chrétienne mais la croisade engagée contre cet état de fait par quelques parents extrémistes et dénués de scrupules est parvenue à faire changer la loi. Un vrai scandale.

Mourir à l’adolescence peut être considéré comme une bonne action. C’est vrai que des fois on a envie de les tuer ces connards tellement ils sont exaspérants avec leurs voix qui muent, leurs boutons sur la gueule et leurs jeans trop grands. Hélas, un adolescent se croit par définition immortel et il est généralement très difficile de lui faire entendre raison. Le gouvernement sous l’égide du Ministère de la Jeunesse et des Transports a bien tenté de lancer un plan d’aide pour l’accès à la propriété de mobylette (la fameuse opération « {{{1}}} ») pour accélérer le processus mais cela n’a pas changé grand-chose.

Il est par ailleurs indécent de mourir entre 20 et 60 ans. C’est la tranche d’âge pendant laquelle on est le plus utile à la société, le moment où on peut commencer à construire sa renommée et préparer sa mort dans la joie et la sérénité. Mais on ne conseille toutefois pas de décéder après le 3ème âge. Vous imaginez combien ça coûte à la sécu et aux caisses complémentaires ? Socialement parlant, la bonne tactique consiste à cotiser pendant 40 ou 50 ans puis mourir au moment de sa retraite, soit entre 60 et 70 ans. Attention, ne mourrez pas avant d’avoir fait votre pot de départ, sans quoi votre famille ne pourra pas profiter de vos cadeaux.

L’heure idéale pour mourir

Grâce à l'INSEE qui comme d'habitude avait rien de plus intéressant à foutre, on sait maintenant qu'il est mieux de mourir entre le repas de midi et le goûter.

Les statistiques sont formelles, l’heure idéale pour mourir se situe entre 14h et 16h. La nuit, vous faites chier tous ceux qui vont devoir se réveiller pour prévenir les secours, ces derniers n’appréciant de leur côté pas vraiment le fait de devoir se déplacer à une heure aussi indue. Le matin, il faut préparer les enfants pour l’école et le repas de midi et on a donc autre chose à faire que d’assister à une agonie qui va nous foutre en retard pour le reste de la journée. À midi, on mange, on est en France bordel. Après 16h les enfants rentrent de l’école et il y a le goûter et les devoirs. Et enfin le soir il y a Christophe Dechavanne qui présente « Les 100 plus gros cons comme la bite à leur mère » sur TF1 et vous ne voulez rater ça sous aucun prétexte.

Le seul créneau viable est donc entre 14h et 16h. À cette heure-là vous serez seul(e) et vous n’allez emmerder personne. Et surtout, si vous êtes un tant soit peu connu, c’est l’assurance de pouvoir profiter d’un bel éloge funèbre pendant le journal de Claire Chazal et justement ce jour-là il va faire un carton d’audience puisque juste après il y a Christophe Dechavanne qui présente « Les 100 plus gros cons comme la bite à leur mère ».

Où mourir ?

« Si on voulait tout simplifier, on irait mourir dans les cimetières »
~ Michel Audiard

L’endroit du décès est généralement lié à la façon de mourir. Par exemple, si vous optez pour le suicide en vous jetant sous un train, il y a de fortes chances que le lieu choisi soit constitué de deux rails parallèles parsemés à intervalles réguliers de traverses en bois recouvertes de ballast.

Pour autant, si les lieux accessibles aux gisants ne manquent pas, certains sont plus populaires que d’autres. Par exemple l’hôpital. Vous y entrez à 9h pour faire une radio suite à une cheville foulée pendant votre footing matinal et vous en ressortez les pieds devant le lendemain après avoir contracté un joli staphylocoque doré. Rapide et efficace. La salle de gym est également un bon spot. Approchant de la soixantaine, vous vous remettez au sport pour pouvoir draguer la nymphette à la sortie du lycée et votre cœur lâche en pleine séance de tapis roulant. Non seulement c’est stupide mais en plus vous aurez l’air ridicule quand le tapis va vous éjecter comme une vulgaire valise en transit entre deux avions.

Le plus simple est encore de mourir chez soi. Pas de dérangement inutile pour vos voisins, pas de médecins ou d’infirmières à réveiller pendant la sieste et, si vous avez suivi mes conseils sur le créneau horaire, aucun repas ni devoirs scolaires en retard à craindre. Donc au moment de mourir, allongez-vous dans votre lit et patientez. Certes, ça manque un peu d’action mais vous serez remercié plus tard d’avoir pris cette initiative.

Comment mourir ?

Maladie, suicide, accident, promenade au centre-ville de Téhéran avec t-shirt "Mort au Prophète", faire la corrida avec une cote de bœuf et Chabal en guise de taureau ... Ce ne sont pas les façons de mourir qui manquent. Voici un petit récapitulatif des principales options disponibles avec leurs avantages et inconvénients :

Suicide

N'oublions pas l'humour tout de même.

Le principal avantage du suicide est évident : il vous laisse entièrement le choix dans la date[2] et dans l'heure de votre mort. Vous aurez ainsi par ce biais tout le loisir de le faire chez vous entre 14h et 16h comme le réclament les principes élémentaires de décence, principes fort bien décrits par la Baronne Nadine de Rotschild dans son best-seller « Tu vas quand même pas crever comme une merde au milieu de la rue » (éd. Houarbert).

Toutefois le suicide s'accompagne de certaines contraintes, notamment concernant les moyens logistiques. Le port d'armes étant hélas difficile à obtenir en France à cause de lois rétrogrades, l'usage d'un pistolet, révolver, fusil-mitrailleur, AK-47 ou autre lance-roquettes sera circonscrit aux professionnels qui en ont l'usage, c'est-à-dire les policiers, militaires, terroristes, propriétaires de bar-tabac et professeurs des écoles dans les banlieues sensibles. Concernant les poisons et médicaments, il faudra passer par un médecin ou un pharmacien peu regardant sur la posologie. Heureusement, on en trouve encore facilement à la campagne. Le suicide au gaz reste populaire mais il peut provoquer des dommages collatéraux chez vos voisins qui risquent de faire de l'ombre à votre propre décès, allant à l'encontre du but recherché. Je déconseille l'immolation par le feu ou la chute depuis le toit du HLM. La première est douloureuse et la seconde assez salissante. La pendaison par corde à nœud-coulant représente un bon compromis. C'est rapide, efficace et d'après certains témoignages vous provoquera une ultime érection qui fera dire à votre entourage « Il est mort en pleine forme cet enculé. ».

Amis artistes, rappelez-vous également que le suicide est une pratique assez ouverte qui vous permettra de partir sur une dernière touche d'originalité. Imaginez par exemple la publicité dont vous bénéficierez quand on retrouvera votre corps enduit de Nutella et dévoré par des fourmis rouges ou votre tête plongée dans le bac Sani-Broyeur au trois-quarts plein.

Maladie

Le SIDA, il ne passera pas par moi, cet enculé de sa race.

L'avantage quand on meurt à cause d'une affection quelconque, c'est qu'on n'est pas obligé de dire laquelle. Le faire-part fera systématiquement mention d'une "longue et cruelle maladie" comme si vous aviez lutté des années durant contre un cancer généralisé alors qu'en fait si ça se trouve c'était juste une épine de sapin enfoncée sous l'ongle du gros orteil qui aura engendré un panaris mal désinfecté propageant insidieusement pendant plusieurs semaines une gangrène dont vous ne serez pas parvenu à vous débarrasser malgré les amputations successives des pieds, des jambes, des cuisses et qui aura finalement eu raison de votre appareil cardio-vasculaire non sans avoir tout d'abord encrassé vos poumons, vous faisant suffoquer comme si vous étiez en train de vous noyer dans du pus malodorant. Ce qui n'est ni long, ni cruel.

Grâce aux progrès de la médecine, vous aurez en outre l'avantage avec une maladie incurable de connaître au jour près le moment de votre trépas, les carabins étant en effet très efficaces quand il s'agit de donner ce genre d'informations. Vous n'aurez donc pas d'excuses si vous n'êtes pas prêt à temps.

Accident

Ils étaient à deux doigts de devenir célèbres. Ils peuvent en vouloir à leur commandant de bord.

Il est hélas beaucoup plus difficile de nos jours de mourir dans un accident, notamment en voiture. La prévention routière fait baisser le taux de mortalité de façon dramatique et prendre sa bagnole n'est plus comme dans les années 70 l'assurance de perdre la vie dans un simple accrochage à cause d'un défaut de port de ceinture. Maintenant, il faut vraiment le vouloir pour trépasser au volant. Ça demande une hygiène de vie exemplaire à base d'alcool, de cannabis, de myopie non soignée et de non respect des consignes concernant le contrôle technique. Une fois de plus, évitez d'impliquer d'autres voitures dans votre accident (si vous y parvenez) car provoquer la mort d'autres usagers ferait de l'ombre à votre mort. De plus, vous risqueriez de faire mourir des enfants, ou des personnes ayant entre 20 et 60 ans, les empêchant de trépasser dans les conditions de décence requises pour une mort idéale.

Et que dire du transport aérien. La probabilité de passer de vie à trépas lors d’un accident d’avion est proche de zéro. On peut augmenter ses chances en optant pour une compagnie aérienne africaine spécialisée dans les liaisons intracontinentales mais cela reste assez aléatoire. C’est d’autant plus regrettable que le crash aérien est systématiquement accompagné d’une annonce officielle aux journaux télévisés du soir, relayée par les quotidiens du lendemain, assurance d’une célébrité post-mortem de plusieurs jours, avec dans les cas extrêmes et en cas d’agenda compatible, déplacement de ministre.

Passons rapidement sur les accidents maritimes. En dehors des grandes périodes de guerre ou de voyage inaugural parsemé d’icebergs d’un paquebot gigantesque en 1912 entre Southampton et New-York, vous n’aurez l’opportunité de mourir en mer qu’en vous inscrivant au Vendée Globe armé d’un bateau pneumatique recouvert de rustines.

Bien sûr, la vie nous réserve parfois de bonnes surprises. Qui dit qu’en vous promenant aux abords de la Rue Jean-Moulin demain vous n’allez pas recevoir sur la tête un piano mal arrimé par des déménageurs peu consciencieux ? Et ces météorites dont la presse fait régulièrement ses choux gras, pourquoi ne choisiraient-elles pas d’entrer en collision avec votre nuque dès après leur entrée dans l’atmosphère terrestre ?

Ces évènements relèvent toutefois de l’aléatoire le plus strict et ne permettront pas la préparation adéquate de votre anéantissement.

Meurtre

Pas le genre de type que vous allez souvent croiser par hasard dans la rue.

Le meurtre est une façon de mourir spectaculaire mais statistiquement peu courante. À moins de tomber sur un évadé d’asile schizophrène armé d’une hache ou sur un tueur en série sous Redbull, il vous faudra organiser vous-même votre assassinat, ce qui réclame une logistique complexe et de bonnes relations dans le milieu de la pègre. De plus, si vos plans sont éventés, vous passerez alors dans la catégorie "suicide", perdant du coup les retombées habituelles liées à un crime de sang sordide.

À moins de prendre le problème dans l’autre sens. Au lieu d’être victime, devenez coupable. Mais pas n’importe où bien entendu. Le lobby commandé par l’impitoyable Robert Badinter ayant malheureusement relégué la guillotine au musée de la Fraternité Républicaine, vous ne pouvez plus être condamné à mort et a fortiori exécuté en France. Être reconnu coupable de meurtre dans l’hexagone vous permettra uniquement de vous initier pendant quelques dizaines d’années aux joies de la pénétration anale sans lubrifiant, ce qui nous éloigne de l’objectif initial.

Il existe heureusement encore quelques nations justes où le meurtre est puni par la mort de son auteur. Plutôt que les USA, je conseille les pays asiatiques comme la Chine ou la Corée du Nord. Non seulement la justice propose moins de recours après le verdict initial, ce qui vous économisera des frais d’avocat, mais en sus cela vous fera découvrir une destination exotique où la vie est moins chère qu’en Europe (et pas seulement parce qu'en l'occurrence elle sera aussi plus courte).

Génocide

L'exemple typique du manque d'imagination au moment de choisir sa mort.

Pour le génocide, c’est assez simple : il faut simplement être au bon endroit au bon moment. Ce n’est pas en vous promenant au milieu du Jardin des Tuileries cet été que vous risquez la rafle qui vous emmènera dans un camp de concentration où vous serez massacrés avec vos compagnons d’infortune. Vous devez donc vous tenir informé des dèrnières tendances politiques dans les pays du tiers-monde. Un coup d’état au Rwanda ? Hop, direction Kigali ! L’accession au pouvoir en Allemagne d’un dictateur à moustache ? Direction la synagogue pour la conversion au judaïsme, la clinique de chirurgie esthétique pour la circoncision et un petit déménagement dans la banlieue d'Auschwitz pour faciliter le travail (sur ce dernier point, vous pouvez aussi simplement vous contenter d’annoncer à vos voisins de palier que vous êtes Juif, logiquement ça devrait vous permettre de voyager aux frais de la princesse).

Le gros avantage du génocide est qu’on parlera de votre décès même des années après, avec commémorations, reportages voire un chapitre entier dans les livres d’histoire de CM2. En revanche il est assez difficile de se faire un nom lors d’un génocide. Les commentaires des historiens et journalistes ne s’embarrassent pas de détails et citent les "millions de morts" sans réelle distinction. Veillez donc à accompagner votre départ pour les camps de concentration d’une anecdote particulièrement savoureuse qui vous fera sortir du lot (par exemple, écrivez une lettre d’adieu qui commence par « Chère maman », c’est très bon au niveau marketing).

Apocalypse

Au moment de mourir, beaucoup se rapprochent de la religion, les couards. Pour autant il est vrai que certains dogmes peuvent servir. Si la religion interdit généralement le meurtre (« Tu ne tueras point ») ou le suicide (« Tu ne convoiteras pas la femme de ton prochain »), elle n’y va pas par quatre chemins quand il s’agit de faire le ménage dans ses ouailles : c’est l’Apocalypse, l’Armageddon, le Jugement Dernier et tout le tralala. Là au moins, vous êtes sûr d’y passer. Par contre côté post-mortem, ce n’est pas franchement folichon puisqu'il n'y aura plus personne pour regretter votre disparition. Cette solution ne saurait donc être employée qu’en cas d’ultime recours.

Mort naturelle

La mort naturelle est la façon la plus stupide de décéder qui soit. Tout le monde s’y attend, la famille a déjà pris ses dispositions auprès du notaire, les journaux ont déjà rédigé votre nécrologie et vous êtes là comme un con à crever dans l’indifférence générale. Mourir de sa "belle mort" comme on dit vulgairement, c’est vraiment une erreur de débutant et on ne vous y reprendra pas à deux fois.

Les dernières volontés

Franchement, c'est quand même plus juste de faire hériter la plus jeune pour qu'elle puisse redémarrer dans la vie, la pauvre.

Bien préparer sa mort ne suffit pas, il faut aussi se soucier de ce qui va se passer après. Bien entendu, cela n’est possible que si vous possédez du bien mobilier et/ou immobilier. Un indigent disposera d’une marge de manœuvre réduite pour faire chier son entourage après son décès. Mais si vous êtes pété de thunes, vous avez la possibilité de foutre un beau bordel dans votre famille en rédigeant un testament totalement inepte. Par exemple, vous vous êtes remarié vers 60 ans avec une charmante demoiselle de 20 ans : donnez lui la majeure partie de vos biens au détriment de vos enfants issus d’un premier mariage ; c'est poilant. Quant à votre première femme, n’en faites même pas mention.

Plus fort encore, léguez tout ce que la loi vous autorise à des associations caritatives totalement ridicules comme celles visant à guérir le Sida ou la myopathie. Même chose pour vos assurances-vie. Changez-en les bénéficiaires au dernier moment en prenant des noms au hasard dans l’annuaire (par exemple M. Modeste WiiKend, Impasse de la sencyclopédie, 69000, Wikia). Des décisions de dernière minute qui à coup sûr feront parler de vous à tous les repas de Noël pendant les années qui vont suivre.

Dernières paroles

Les dernières paroles d’une personne agonisante ne doivent surtout pas être négligées. Combien d’écrivains, de poètes, de dramaturges ne sont connus aujourd’hui non plus par leurs œuvres totalement oubliées mais simplement parce qu’ils ont eu la présence d’esprit de prononcer dans leur dernière souffle une boutade (de Dijon) mémorable (de lapin à la moutarde, de Dijon aussi du coup).

Ce qu’il ne faut pas dire

"Tu quoque fili", et hop ! Il a suffit que Jules César termine par une connerie et voilà la tronche qu'on lui a faite sur les bustes à son effigie.

Voici quelques exemples de dernières paroles à proscrire avec les noms de ceux qui les ont prononcées :

  • « Attends t’emmerde pas, je vais tenir le clou pendant que tu l’enfonces, j'ai une main de libre. », Jésus Christ
  • « Je me demande si je n’ai pas oublié de fermer le gaz », Adolf Hitler
  • « Tiens, c’était quoi ce craquement ? », Ayrton Senna
  • « Glou glou », Grégory Villemin
  • « N'importe quoi, ces journaux... », Jacques Chirac

Autant d’inepties qui leur ont fermé à jamais les portes de la postérité.

Ce qu’on peut dire

"Dire que je venais d'arrêter de fumer", Jeanne d'Arc, spirituelle jusqu'au bout.

Au contraire voici quelques exemples de magnifiques réparties qui ont assurées à leurs auteurs gloire et fortune juste gloire :

  • « Ah ! Que l’agonie me paraît douce ! », Marquis de Sade
  • « C’était donc ça la vie ? J’en reprendrais bien un morceau. », Brillat-Savarin
  • « Putain, il fait drôlement chaud ce matin », Takara Katazuka (Hiroshima, 6 août 1945)
  • « À mon avis, je ne vais pas avoir assez d’ess... », Steve Fossett

C’est édifiant et cela doit vous inciter à bien préparer votre départ dans ses moindres détails, vos derniers mots étant essentiels.

Les obsèques

Si vous deviez choisir, vous prendriez lequel ?

Reste un dernier point à prendre en compte pour mourir efficacement : les obsèques. Bien sûr, vous pouvez toujours pinailler en constatant qu’en tout état de cause, elles ne vous laisseront pas un souvenir impérissable même si vous allez forcément y assister, mais là encore il faut penser à votre entourage. Vous n’allez tout de même pas les laisser se débarrasser de vous comme ça sans les faire chier une dernière fois.

Surtout ne vous laissez pas tenter par les publicités vantant le mérite des Assurances-Obsèques à base de Jacques Balutin ou de Pierre Bellemare. Qu’est-ce que ça peut vous foutre de savoir qu’une assurance pourra payer votre enterrement alors qu’il sera beaucoup plus marrant de forcer votre famille à raquer ou à puiser dans l’héritage (dont elle ne touchera en plus que la quotité disponible) ?

Par contre, soyez très exigeant sur les conditions de vos funérailles. Demandez à être enterré dans un cimetière réputé comme le Père-Lachaise ou le Cimetière du Montparnasse, qu’il se situe à quatre pas de votre maison ou non. Et si possible dans une concession proche de celle de quelqu’un de connu dont le nom est gravé pour l’éternité dans notre mémoire comme Jim Morrison ou Alfred Chopin. La cérémonie elle-même devra avoir lieu dans un espace consacré digne de votre réputation comme Notre-Dame de Paris ou la Basilique-Saint-Pierre de Rome. Pour mettre toutes les chances de votre côté, lancez 15 jours avant de mourir quelques phrases bien senties indiquant vos doutes quant à l’existence des chambres à gaz ou prononcez-vous en faveur de la pédophilie circonscrite aux représentants de l’église. Avec un peu de chance, ça pourrait inciter le pape lui-même à venir prononcer votre oraison funèbre, voire à vous canoniser s’il est dans un bon jour.

Les incinérations sont déconseillées. C’est moins coûteux et votre famille va profiter du premier barbecue venu (si ça se trouve le jour même) pour se débarrasser de vos cendres ni vu ni connu. Il faut les forcer à avoir un lieu où se recueillir après votre départ pour le « Grand Voyage sans Retour vers l’Éternité » (Jean-Luc Lahaye).

Enfin ne négligez pas le matériel. Prenez le soin d’étudier pre-mortem les catalogues des officines spécialisées en pompes funèbres. Méfiez-vous des cercueils en promotions, certains ayant sans doute été déjà utilisés et rapportés par des clients mécontents. Caisse en chêne, moulures en marqueterie artisanale, intérieur molletonné en hermine, poignées en or massif sans oublier la pierre tombale forcément en marbre de carrare, rien n’est trop beau pour votre confort. D’ailleurs, ne croyez pas que je vous donne tous ces conseils sans les appliquer à moi-même. Voyez plutôt le cercueil et ses accessoires que j’ai choisis pour mon repos éternel. Amen.

Certes, ça manque un peu de place mais on va pas faire le difficile.

Épitaphes en bas de page

  1. Sauf dans le cas où le coup de tête en question se fait en direction d’un projectile lancé à grande vitesse en provenance d’une arme à feu de gros calibre
  2. Et non pas...


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