Paranormal Activity

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Tourné en 4 jours pour un budget d’à peine 5 000 €, « Paranormal Activity » (2007) est un film d’horreur français qui a déchaîné les passions et connu un succès inespéré en enregistrant plus de 6 millions d’entrées au box-office en quelques semaines, devenant par la même le long métrage le plus rentable du cinéma hexagonal depuis le film d’avant qui détenait ce record.

Son réalisateur, Olivier Paillet a bien voulu nous faire l’honneur de revenir sur la genèse du projet et nous donner les clés pour comprendre les tenants et les aboutissants de ce phénomène cinématographique sans précédent. Nous allons donc pouvoir regarder le DVD avec son commentaire.

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La genèse du projet

À Noël 2006, ma maman m’a offert un caméscope numérique. Donc j’ai décidé de faire un film.

Le synopsis

La ligne directrice du scénario est relativement simple à appréhender tant c’est l’ambiance qui fait ce film plus que l’histoire. C’est pourquoi j’ai choisi d’utiliser tous les moyens technologiques dont je disposais pour concevoir le générique le plus dépouillé possible. C’est d’ailleurs à ma connaissance la première fois qu’un réalisateur conçoit un générique grâce à Paint.

Les personnages centraux sont un couple de jeunes mariés, Corinne (Claire Darcin, remarquable) et David (Pierre Krawszecky) qui se rendent compte que ce qu’ils pensaient correspondre à un avenir sans histoire à base d’amour, d’eau fraîche et de crédits à la consommation ne ressemble en rien à ce qu’ils avaient imaginé. La nuit notamment, des évènements totalement inattendus se manifestent régulièrement, emplissant nos deux tourtereaux de désespoir et d'effroi. Les spectateurs assistent impuissants à cette succession de scènes terrifiantes grâce à une astucieuse idée scénaristique : un caméscope placé par David à l’insu de Corinne dans la chambre à coucher.

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Dès le début du projet, voire bien avant, j’avais l’idée de Claire pour jouer le rôle de Corinne. Je lui ai toujours trouvé une sorte de grâce que seules possèdent les vraies comédiennes amatrices débutantes en devenir. Son visage lumineux, son corps sculptural, ses seins lourds mais qu’on devine fermes, sa bouche accueillante, ses jambes fines et lisses, son cul de déesse, son sexe épilé et humide lorsque je suis à côté d’elle et que je sens son attirance inéluctable envers les jeunes cinéastes novateurs... Autant d’arguments qui en ont fait mon premier choix.

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C’est mon voisin. Il était entre deux contrats de qualification alors voilà.

Scène 1 – Mariage à deux, mariage heureux ?

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Mon film commence par le mariage entre David et Corinne. J’ai voulu ici prendre le contrepied des contes pour enfants qui se terminent toujours par un mariage. C’est un peu comme si on était dans la continuité de Blanche-Neige ou Bernard et Bianca. La princesse a trouvé son Prince Charmant, elle l’épouse et ils seront heureux et auront beaucoup d’enfants... soi-disant. Moi, je suis allé plus loin que ces éternels poncifs que je trouve personnellement très peu crédibles et j’ai utilisé les moyens du cinéma fantastique pour recréer puis surpasser voire par moment transcender le naturel.

La grande force de cette première scène, outre la présence solaire de Corinne/Claire, est liée à l’intensité dramatique inhérente au fait qu’à ce mariage, on ne voit que le couple. Les invités, les parents et même le curé sont comme absents. On ne sait même pas qui filme. C’est une symbolisation extrême de la notion d’enfermement qui va caractériser l’histoire de Corinne et David.


Scène 2 – Nuit de noce sanglante

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Dès la première nuit, j’ai pris le parti d’instaurer un climat de tension entre les deux personnages. On découvre ici un premier élément important : David est un gros pervers sexuel. Il a en effet décidé de filmer tous ses ébats avec Corinne en dissimulant une caméra avec vue plongeante sur le lit du couple. Plus que l’apport d’un intérêt quelconque au scénario, ce choix concernant le caractère vidéo-sexo-obsessionnel du personnage de David s’explique tout simplement par le fait que cela m’a permis de faire le film avec un caméscope pourri en plan fixe, justifiant l’absence totale de mise en scène, de direction d’acteurs et de maîtrise technique. De toute façon avec mon BEP Comptabilité, j’allais pas non plus faire des miracles.

Dans cette ambiance crépusculaire typique des premières nuits nuptiales normalement dédiées à l’Amour avec un grand A, on ne distingue pas grand-chose mais on entend distinctement les cris effroyables de Claire. Pour cet effet sonore étonnant, j’ai travaillé avec un appareil spécifique : le bouton de réglage du volume d’enregistrement. Cela met d’emblée le spectateur dans un état de stress qui ne le quittera plus durant les 78 minutes du film. Le point culminant de la scène est atteint lorsque, au petit matin, la caméra nous permet de découvrir des taches de sang sur le drap-housse près du corps allongé de Corinne qui, si elle n’était pas en train de sauvagement ronfler, pourrait laisser croire qu’elle est morte. Se réveillant, David découvre en même temps que nous cette image d’épouvante et l’échange qu’il a alors avec Corinne est d’une force équivalente à ce qu’il éprouve.

David : Hé Coco, t’aurais pu me dire que t’étais pucelle.
Corinne : Ah ça, dans ma famille, on est vierges de mère en fille. C’est le Bon Dieu qui l’a décidé.


Scène 3 – La forme inconnue

Une scène qui met les nerfs des spectateurs à rude épreuve.

À peine remis de leurs émotions, on retrouve nos deux héros quelques mois plus tard dans des conditions à peu près similaires. J’en profite pour répondre aux critiques qui trouvaient que mon film ne permettait pas de proposer aux spectateurs un véritable calendrier des évènements que je les emmerde. On devine à la profondeur de l’obscurité que nous sommes en plein milieu de la nuit. Les formes des corps de David et Corinne impriment un effet montagneux à la couette du lit marital.

J’ai fait durer ce plan séquence pendant à peu près 9 minutes 40, soit une minute de plus que le pré-générique de « The Player » qui fait pourtant référence dans ce domaine. Toute l’angoisse de cette scène est liée à cet état d'attente insoutenable dans lequel j'ai cherché – avec succès je pense – à plonger le spectateur. Et soudain, alors même qu’on s’attendait à ce que rien ne passe, on voit clairement une forme se mouvoir sous la couette aux pieds du couple. Dans les salles de projection, l’angoisse était telle à ce moment du film qu’on entendait certaines personnes crier « Attention ! Attention ! », comme s’ils voulaient sortir les personnages de leur torpeur pour les avertir du danger, les cons.

La forme remonte petit à petit le lit sur toute la longueur, s’immisçant entre les corps de Corinne et David qui ne se doutent de rien puisqu’ils dorment à poings fermés. Puis, comme s’il avait ressenti de façon totalement instinctive le danger, David exécute un mouvement du bras gauche d’une brusquerie qui n’a d’égale que sa soudaineté. La forme rampante est éjectée du lit en éclair et, allumant la lumière, David se met à hurler :

David : Putain Corinne tu fais chier avec ton clebs de merde ! Je t’ai déjà dit qu’il était hors de question qu’il vienne squatter dans le plumard !


Scène 4 – Les sons de l’étrange

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Cette quatrième scène est sans aucun doute la plus originale du film, et celle qui a fait couler le plus d’encre, à juste titre je pense. J’ai en effet décidé de la tourner dans le noir complet. Toute l’angoisse est ici fondée sur les effets sonores. Ce qu’on entend par-dessus tout, ce sont les respirations asynchrones de David et Corinne, symbolisant le manque d'harmonie que les évènements précédents ont engendré au sein du couple. Le jeu d’acteurs, tout en bruits, trouve ici son paroxysme par l’antagonisme lié au fait qu’on ne peut pas les voir jouer. Jamais ils n’auront été aussi justes. Corinne tousse. David pète. Corinne se gratte. David grince des dents. Corinne gémit. David renifle... Chaque personnage répond à l’autre du tac-au-tac comme un échange de tennismen sous amphétamines. Et alors qu’on se demande lequel des deux époux sortira vainqueur de ce duel acoustique sans merci, un évènement surprenant prend le contre-pied de l’histoire : le réveil sonne.


Scène 5 – Les traces du mal

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Changement d’ambiance total pour cette cinquième scène, la seule qui se passe de jour. J’ai voulu cette scène d’abord pour rendre hommage à Claire qui illumine le film par sa présence. Nous sommes en plein milieu de journée, elle est en nuisette transparente et porte un string en dentelle, des bas à jarretelles et des escarpins noirs. Vaquant à ses occupations quotidiennes, on devine à son expression qu’elle vient de découvrir quelque chose d’inhabituel. Elle scrute son lit et semble comme effaré par ce qu’elle découvre. Elle se met à quatre pattes pour regarder par terre avec le même visage effrayé. Le spectateur ne sait pas ce qu’elle voit mais rien que de comprendre qu’il y a quelque chose d’anormal, il devient solidaire de la crise d'angoisse de Corinne. N’y tenant plus, cette dernière appelle son mari en hurlant :

Corinne : Daviiiiiiiid ! Viens voir ça, vite !

Stupéfait par le ton affolé de sa compagne, David se précipite dans la chambre et lance alors une réplique qui fera date dans les annales du cinéma moderne.

David : Qu’est-ce qu’y a ?
Corinne : Putain tu fais chier je t’ai déjà dit un million de fois d’arrêter de bouffer des biscottes dans le lit. Regarde, il y a des miettes absolument partout. Et qui c’est qui fait le ménage ? Toi ou moi ? Je te préviens, c’est la dernière fois.


Scène 6 – Une autre présence

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Beaucoup de critiques m’ont reproché cette scène, arguant que je recourais ici à une astuce facile pour faire de mon film un succès : le cul. On voit en effet un couple en train de faire l’amour sur le lit. Lui est allongé sur le dos et Corinne le chevauche comme une Amazone sauvage, haletant et suintant jusqu’à la jouissance finale. Puis la scène s’arrête aussi brusquement qu’elle avait commencé.

En réalité je me suis rendu compte, mais un peu tard, que l’angle de la caméra ne permettait pas de faire réellement comprendre l’intérêt scénaristique de cette scène. Il s’avère que l’homme sur lequel s’empale Corinne n’est pas David mais un individu dont on ne connaîtra jamais le nom ni les intentions véritables. Il semble en tout cas que les évènements terribles qui se sont succédé auparavant aient incité Corinne à aller voir ailleurs, ajoutant une touche mélodramatique au surnaturel.

Pour l’anecdote, je précise aussi qu’étant donné que ce personnage de l’amant n’aura qu’un rôle secondaire dans le reste de l’histoire et que son rôle est assez passif, je me suis permis de le jouer moi-même pour éviter de déranger un comédien professionnel pour si peu. C'était peut-être une erreur toutefois car en tant qu’amateur, mon jeu n’était pas trop satisfaisant et on a dû refaire la scène une dizaine de fois alors que toutes les autres ont été faites en une seule prise. Vous trouverez en bonus dans ce DVD les 9 autres prises.

Scène 7 et dernière – The Final Cut

David est à côté de Corinne. Il lui caresse les cheveux. Il lui murmure à l’oreille des mots que le spectateur ne peut pas capter. Il l’embrasse sur la bouche. Il lui ferme les yeux. Puis il sort de la chambre en tenant la tête de Corinne dans une main et sa hache dans l’autre en grommelant pour lui-même :

David : Salope.
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