Aspirateur
L’Aspirateur (vorax cyclopicus domestica) est une créature semi-mécanique appartenant à la vaste famille des monstres utilitaires que l’humanité a créée sans comprendre vraiment ce qu’elle invoquait. Vivant reclus dans les coins sombres de l’habitat moderne, il ne sort qu’en période de crise : visite surprise de belle-mère, grand ménage de printemps, ou psychose soudaine face à une miette suspecte. Armé d’un cri strident, d’un tuyau souple et d’une volonté de succion pure, il rôde, vibre, et aspire tout sur son passage — sauf, bien sûr, ce qu’on lui demande vraiment de prendre.
Morphologie
L’aspirateur est un animal aux formes variées mais toujours aussi contre-intuitives. Son corps principal est trapu, doté d’une coque en plastique dur souvent colorée dans des teintes aussi excitantes qu’un lave-linge (gris, beige, bleu délavé). Il est équipé d’un unique œil géant appelé “filtre HEPA” qui lui permet de tout voir… et surtout de tout juger. Le reste de son anatomie se compose de trois éléments principaux : une trompe extensible (le fameux tuyau), une queue rétractile (le câble), et des excroissances articulées appelées « embouts » qu’il change selon son humeur. Certaines espèces sont bipèdes (aspirateurs-balais), d’autres sont totalement larvaires (aspirateurs-traîneaux), tandis que les plus modernes sont carrément autonomes et vagabondent en pleine nuit comme des cafards high-tech.
Comportement
L’aspirateur est une créature capricieuse, souvent passive-agressive, qui ne fonctionne pleinement que si elle sent que tu es mentalement instable. Il adore faire semblant de marcher, puis s’arrêter dès que tu passes sous le canapé. Il prend plaisir à se coincer contre les meubles, à t’étrangler avec son tuyau ou à faire tomber des trucs derrière toi juste après être passé. Il n’a aucun respect pour l’intimité et foncera sans prévenir entre tes jambes, dans tes rideaux ou dans le chien. Il déteste les tapis. Il les escalade comme des montagnes maudites, en grognant. Il adore manger des câbles, des lacets, et les bouts de Lego laissés par des enfants en embuscade. Il a une passion spéciale pour les chaussettes solitaires, qu’il aspire à moitié, laissant l’autre coincée dans sa gorge comme un cri d’agonie textile.
Régime alimentaire
L’aspirateur est un omnivore glouton au goût douteux. Son alimentation repose essentiellement sur de la poussière vieille de 3 semaines, des poils de chat morts, des cheveux humains enchevêtrés, des miettes de pain mystique, des insectes semi-digérés, et parfois même des objets de valeur s’il est de mauvaise humeur. Il adore les confettis, les plumes de coussin éventré, et les tickets de caisse. Il hait les pièces de monnaie, les trombones, et les capsules de bouteille : dès qu’il en avale une, il fait une crise d’étouffement aiguë et commence à hurler comme si tu venais de lui injecter du savon dans les veines. Il raffole aussi du symbolique : tout ce qui est sentimental ou précieux finit dans son sac, y compris les boucles d’oreilles perdues, les vis introuvables et les âmes.
Habitat naturel
L’aspirateur vit dans des lieux sombres, souvent humides, étroits, et mal rangés. On le trouve dans le placard à balais, dans le cagibi à côté des bouteilles de Ricard vides, sous les escaliers, ou derrière les rideaux du désespoir. Il hiberne dans la poussière jusqu’à ce que son maître l’appelle d’un cri douloureux : Putain c’est quoi cette odeur ? Là, il s’éveille, lentement, et rampe hors de son antre avec l’élégance d’un phoque électroménager. Dans les maisons plus riches, il peut avoir un box dédié, un compartiment, voire un mur mural à lui tout seul. Dans les HLM, il vit dans une ancienne caisse de vin à moitié pourrie entre un seau et une serpillière morte depuis 2013.
Reproduction
L’aspirateur ne se reproduit pas au sens biologique, mais il se multiplie quand tu n’arrives pas à jeter l’ancien. Tu achètes un nouveau modèle dernier cri, mais tu gardes l’ancien au cas où. Bientôt, tu te retrouves avec trois aspirateurs qui ne fonctionnent plus qu’à 20%, chacun avec un embout manquant, et tu dois les alterner comme une équipe de foot en fin de carrière. Ils ne meurent jamais vraiment : ils s’éteignent doucement, s’encrassent, bloquent leurs filtres, puis un jour décident de ne plus rien avaler. Alors tu les pousses dans un coin, et ils restent là, tristes, leur tuyau pendant comme une langue sèche, pleurant en silence à chaque pas que tu fais sur le tapis.
Variétés
Il existe plusieurs espèces d’aspirateurs, classées par degré de dépression et de puissance de vengeance. Le modèle traîneau classique : lent, lourd, bruyant, idéal pour s’emmêler dans tous les meubles. Le modèle balai sans fil : rapide, léger, mais avec une autonomie de 6 minutes et un moteur qui crame si tu vis dans un endroit sale. Le modèle robot : autonome, con, se cogne partout, s’autosuicide dans les escaliers dès que tu le laisses sans surveillance. Et enfin, le modèle industriel : conçu pour avaler des gravats, des briques, et ton salaire. Utilisé uniquement par des mecs en combinaison qui ne sourient jamais.
Cri
L’aspirateur pousse un cri grave, profond, souvent interprété comme une plainte éternelle. Il peut varier en intensité selon la température ambiante, la saleté du sol, l’âge de l’appareil et ta culpabilité. Quand il aspire quelque chose de trop gros, il hurle. Quand il est bouché, il gémit. Quand il est vide, il siffle comme un vieux qui veut mourir. Certains disent que si tu écoutes attentivement, tu peux entendre des insultes. Ou le dernier appel au secours du collier que ta grand-mère a perdu il y a 8 ans. Les modèles haut de gamme font moins de bruit, mais c’est une ruse : ils aspirent ton âme plus discrètement.
Comportement social
L’aspirateur est solitaire, mais il se manifeste toujours quand t’es pas prêt. Jamais quand tu veux faire le ménage, non. Il tombe du placard en pleine nuit. Il s’allume tout seul dans une pièce vide. Il se cogne aux murs quand il n’est pas branché. Il aime faire sentir sa présence. Il sait que tu ne veux pas l’utiliser. Il sait que tu le méprises. Il le sent. Alors il se venge. En avalant le câble de ton chargeur. En pétant son embout. En refusant de rouler droit. En mourant juste avant que les invités arrivent. Il a le sens du timing. C’est une divinité vengeresse coincée dans un corps de plastique.