Fable cachée de Jean de la Fontaine
Jean de la Fontaine, célèbre fabuliste, fait l'objet d'une censure inavouable : une de ses fables est systématiquement gommée de tout recueil et n'a jamais figuré dans un programme scolaire. Après des siècles d'obscurantisme le moment est venu de mettre en lumière ce texte trop longtemps occulté.
Pourquoi tant d'acharnement ?
Pas de réponse à cette question tant le texte semble inoffensif. Bien au contraire, la réhabilitation de cette fable est salutaire et va réconcilier les élèves des classes primaires avec la poésie, l'humour et la morale. Tous les espoirs de voir ce texte se répandre et se propager reposent sur le bon vouloir des enseignants qui, l'ayant lu, oseront braver les oukases de leur ministère.
Où était caché ce texte ?
(Si vous avez eu envie de dire je vous invite à voir l'article du même nom). Simplement dans les archives de la bibliothèque nationale. C'est au hasard des recherches que je mène en tant que maître de conférence que je suis tombé sur ce manuscrit. Il ne s'agit donc pas d'un écrit apocryphe mais bien d'une fable authentique.
L'ours et le Lapin
Jean de la Fontaine (1621-1695) – Extrait de Fables
Maître l’Ours et Maître Lapin
Assis sur un coin de verdure Au coeur d’une forêt de pins Font leur offrande à la nature. Chacun a l’esprit à sa tâche Pour alléger son estomac Lors tous deux forcent sans relâche Et Maître l’Ours tient ce débat : « Dites-moi, Monsieur du Lapin, Ne trouvez-vous point que parfois Il reste sur votre arrière-train Les reliefs d’anciens repas Cela ne vous gène-t-il pas Qu’une partie de votre fourrure Après avoir posé ce plat Attire les mouches et soit dure ? » « Cela jamais ne m’incommode : Pour vagabonder dans les prés La fourrure brune est à la mode Et l’odeur en est fort prisée. » Maître l’Ours, à ces mots, se lève, S’empare de Maître Lapin Et en poussant un soupir d’aise Le passe sur son arrière train Puis il se dandine et repart Laissant Maître Lapin penaud D’avoir réalisé trop tard L’inconséquence de ses mots. Fort dépité Maître Lapin Eut la pensée que je vous dis : « C’est au fondement du besoin Que l’on reconnaît ses amis ». |