Phèdre (version scolaire)

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A toi, élève moyen, aspirant bachelier,
Qui n'a d'autre culture que ses plants de cana',
Qui en poètes français ne connaît que Bouba,
Et qui, devant Racine, voudrait se défiler.

A toi qui as le don maintes fois éprouvé
De conchier les chefs-d'oeuvre et priser les navets,
Je t'offre un résumé, en vers et sans détour,
De Phèdre de Racine, hantise de tes jours.

Ainsi, quand tu auras à l'étudier en classe,
Tu pourras t'épargner le fardeau fastidieux
De lire un tel joyau inspiré par les dieux,

Et vite t'en retourner à tes Nuances de Grey.
Mais, il faut l'avouer, cher lecteur, c'est un comble
Que de lire un navet en touchant ton concombre.

Acte I : Situation initiale

Hippolyte:
Le dessein en est pris; je pars, cher Théramène,
Et quitte le séjour de l'aimable Trézène.

Théramène:
Doucement, Seigneur, je vous vois bien agité.
Il nous faut tout d'abord le décor planter
Et ne point parler d'une magnifique cité
Que ce con de lecteur ne saurait situer.

Hippolyte:
Il est vrai mon cher, et pour informer ce sot
Je m'en vais la décrire comme Jean-Pierre Pernaut :
Trézène est située dans le Péloponèse
Deux-mille kilomètres au sud-est de la Corèze.
Elle regorge de tavernes, de bistros et de bars
La plupart figurant dans le guide du Routard.
On y trouve des monuments, tous bien conservés,
Qui attirent chaque année de nombreux Japonais.
Elle abrite le royal palais de Thésée,
C'est là que nous nous trouvons. Voilà qui est fait.
Puis-je désormais mon histoire continuer ?

Théramène:
Tout à fait, Seigneur, j'allais vous le proposer.

Hippolyte:
Bien, je pars, disais-je. Je vais chercher mon père.
Voilà bientôt six mois qu'il est parti en mer.

Théramène:
Et dans quels lieux, Seigneur, l'allez-vous donc chercher ?
Déjà à sa recherche vous m'avez envoyé,
Pour celà toute la Grèce je me suis tapé
Et de Corinthe à Thèbes mes pompes j'ai traîné.
De plus, mon jeune Seigneur, par-delà de ces eaux
N'avez-vous point songé qu'il aurait pû...pécho ?

Hippolyte:
Non ! Ne dis point ainsi de mon père du mal !
Depuis qu'il est marié, il pécho plus que dalle.
Phèdre, princesse de Crète, fille de Pasiphaé,
Est la dernière belle-mère qu'il ne m'ait ramené.

Théramène:
Nous voilà donc, Seigneur, au coeur du problème.
Je vois clair désormais dans ce secret dilemme.
Ce n'est pas votre père que vous partez chercher
Mais Phèdre, votre belle-mère, qu'ainsi vous fuyez.
Toujours votre vie elle a tenté de pourrir.
D'Athènes, votre demeure, elle vous a fait bannir.
Au petit déjeuné, dans votre bon café,
Elle ajoutait du sel pour vous faire gerber.
Dans votre lit douyet elle avait dispersé
Un paquet XXL de poils à gratter.
Cette nuit, je me souviens, dormait nu Hippolyte
Et les poils à gratter irritèrent votre...

Hippolythe:
Cesse ! Phèdre n'est pas la cause de mes ennuis.
Je fuis, je l'avouerai, cette jeune Aricie.

Théramène:
Quoi, Seigneur ? Vous aussi vous la martyrisez ?
Et comme tout le monde sur son sort vous acharnez ?
Pourtant, l'aimable soeur des cruels Pallantides
Jamais ne trempa dans leurs complots perfides.
Et lorsque ces vauriens, ces fils de leur mère
Tentèrent sournoisement de détrôner votre père
Elle ne fit rien Seigneur et les laissa crever.
Mais votre père, de peur de la voir procréer,
Et renaître ainsi la famille des conjurés,
Lui interdit à jamais de se marier
Elle est donc, Seigneur, victime de la société.

Hippolyte:
Bon Théramène, tu te méprends, détrompe-toi.
Si je la haïssais, je ne la fuirai pas,
Je lui couperai la tête, les jambes et le bras droit,
Comme à ce gosse qui, l'autre jour, trop me regarda.

Théramène:
Seigneur, m'est-il permis d'expliquer votre fuite ?
Pourriez-vous n'être plus ce superbe Hippolyte
Qui jamais à une femme n'accorda un sourir,
Au point que votre père commençait à rougir
De peur que vous ne lui donniez point d'héritier ?

Hippolyte:
Ah cruel Théramène, comment as-tu osé !
Tu sais bien qu'un serment que j'ai fait aux divins,
Un jour où je marchais bourré comme un coing,
M'interdit à jamais de pécho une gonzesse.
Aricie est venue révéler ma faiblesse.

Théramène:
Seigneur, voici donc arriver votre belle-mère.
Allez lui dire au revoir avant d'aller en mer.

Hippolyte:
Euh...non.

Théramène:
Voilà, seigneur, un langage grossier et vilain !
Où avez-vous rangé vos beaux alexandrins ?

Hippolyte:
Ta gueule.

(Hippolyte s'enfuit. Théramène le suit.)

Phèdre:
N'allons point plus avant. Demeurons, chère OEnone.
Je ne me soutiens plus. Ma force m'abandonne.
Mes yeux sont éblouis du jour que je revoi
Et mes genoux tremblants se dérobent sous moi.
Hélas !

(Phèdre tombe dans les bras d'OEnone. Celle-ci s'écarte. Phèdre s'étale comme une fiante de pigeon sur un pavé.)

OEnone:
Dieux tout-puissants ! Que nos pleurs vous apaisent !

Phèdre:
Ah, Soleil, père brillant de mes ancêtres,
Vois la lignée de tes enfants disparaître !
Dieux ! Que ne suis-je assise à l'ombre des forêts !
Quand pourrai-je au travers d'une noble poussière
Suivre de l'oeil un char fuyant dans la carrière !

OEnone:
Quoi, Madame ? Qu'avez-vous donc encore pris hier ?

Phèdre:
Héroine, cocaine et un ou deux pétards.
Et un petit wisky suivi d'un bon cigarre.

OEnone:
Madame, mais enfin, contez-moi donc la cause
De votre narcotique et alcolique névrose.

Phèdre:
Non non non non non non non non non non non non !

OEnone:
Si si si si si si si si si si si si !

Phèdre:
Bon d'accord, mais jure-moi de n'en rien divulguer.

OEnone:
Bien sûr, sur votre nourrice vous pouvez compter.

Phèdre:
OEnone, de l'amour j'ai toutes les fureurs,
Et tu vas là ouïr le comble des horreurs.
J'aime...à ce nom fatal je tremble, je frissonne.
J'aime...tu connais ce fils de l'Amazone...

OEnone:
HIPPOLYTE ! GRANDS DIEUX !

Phèdre:
Moins fort, mécréante !

OEnone:
Hippolyte ! Grands Dieux !

Acte II : Les feux de l'amour.

Hippolyte:
Madame, avant que de partir,
J'ai cru de votre sort devoir vous avertir.
Mon père ne vit plus. Ma juste défiance
Présageait les raisons de sa trop longue absence.
Oui, Madame, le vieux sa pipe a enfin cassé,
De ses terres et son or nous pouvons hériter !
Je vous propose de regner sur Athènes et l'Attique
Et d'encaisser aussi la moitié de son fric.
Quand à l'autre moitié, elle est pour mes étrennes,
Et je me réserve le pouvoir à Trézène.

Aricie:
Et que fait-on, Seigneur pour votre demi-frère,
L'enfant né des amours de Phèdre et votre père ?

Hippolyte:
Ah, diantre ! En voilà un que j'avais oublié !
Ce sale gosse sera une affaire vite réglée :
Je metrais un cobra dans ses couches-cullotes
Ou le ferais tournoyer dans la cuvette des chiottes !

Aricie:
Non, Seigneur, ne souillez point ainsi votre âme !
Vous savoir meurtrier serait pour moi un dramme !
Evitons la violence, évitons le conflit,
Evitons que quelqun ne finisse en confit !
Donnons-lui plutot le pouvoir sur la Crète,
Une île sans ressources ni vertus concrètes.

Hippolyte:
Bien, Madame, je ne puis point vous résister.
Vos désirs ont sur moi la valeur de décrets.
Mon coeur, Madame, est transpercé d'un trait
Lancé contre moi par vos merveilleux atraits.
J'ignore si je n'offense les charmes que j'adore.
J'ignore si je ne mêle de la honte à cet or.
J'ignore si ce coeur que je laisse entre vos mains...

Aricie:
Partez, Prince, et suivez vos généreux desseins.
Rendez de mon pouvoir Athènes tributaire.
J'accepte tous les dons que vous me voulez faire.
Mais cet empire enfin si grand, si glorieux,
N'est pas de vos présents le plus cher à mes yeux.

(Elle sort.)

Hippolyte:
N'empêche, qu'est-ce que j'aurais aimé voir ce petit con
La tête dans les toilettes tourner comme un étron !
En tout cas celle-là, je la tiens dans ma poche,
Et c'est d'autant plus beau qu'elle est loin d'être moche !
Mais quel est ce bruit de pas qui heurte mes oreilles ?
Sacrés noms des dieux ! Voici encore la vielle !

(Phèdre entre accompagnée d'OEnone.)

Phèdre:
Le voici. Vers mon coeur tout mon sang se retire.
J'oublie en le voyant ce que je vais lui dire.
Est-ce l'amour qui me fait oublier en ce laps
Où est-ce déjà la beuh qui attaque mes synapses ?

OEnone:
Souvenez-vous d'un fils qui n'espère qu'en vous.

Phèdre:
On dit qu'un prompt départ vous éloigne de nous,
Et je vous viens voir tout à l'heure pour implorer
Votre miséricorde, Seigneur, pour mon fils adoré.
Je crains que mes maintes injures à votre égard
Ne vous poussent aujourd'hui à lui fendre la poire.

Hippolyte:
Madame, je n'ai point de sentiments si bas.

(Rires enregistrés.)

Phèdre:
Quand vous me haïriez, je ne me plaindrai pas.


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