Teufeur
Le Teufeur (noctambulensis breakcoreus) est une espèce marginale, semi-légale et extrêmement sonore, connue pour sa capacité à transformer n’importe quel champ pourri ou hangar abandonné en sanctuaire sacré de la défonce communautaire. Il vit selon un principe simple : tout ce qui ne te tue pas rend le kick plus fort.
Origines
L’histoire du teufeur remonte à la nuit des temps électroniques. Des moines rebelles, chassés des discothèques commerciales, ont fui dans les montagnes pour créer la première free party. Là-bas, dans une grotte équipée d’un groupe électrogène et d’un caisson de basse en pierre, ils ont découvert l’illumination au travers du BPM. De là sont nés les premiers clans sonores : Spiral Tribe, Heretik, Narkotek… chacun apportant son lot de fidèles, de recettes de taz artisanales, et de sarouels dégueulasses cousus à la main avec du fil barbelé.
Avec les années, le mouvement s’est répandu comme une MST dans un squat de Bordeaux : rapidement, bruyamment, et sans prévention. Le teufeur a muté, de punk toxico à cyber-guerrier tribal tatoué au Posca. Et aujourd’hui encore, il existe des spécimens qui se transmettent des enceintes de père en fils comme des reliques de guerre.
Mode de vie
Le teufeur ne paye pas d'entrée, ne réserve pas sa place, ne suit pas de line-up. Il débarque, souvent entre minuit et 3h du matin, tel un démon invoqué par une ligne de basse mal réglée. Il s’installe où il peut : sur une bâche humide, dans le coffre d’un Twingo repeinte à la bombe, ou à même le sol, fusionnant littéralement avec la terre mère.
Son habitat varie selon la saison. L’été : champs, carrières, festivals pirates. L’hiver : hangars abandonnés, parkings souterrains, parfois des anciennes bases militaires. Il dort peu, ou par micro-siestes de 7 minutes entre deux sets hardcore. Il se nourrit de restes d’energy drink tiède et de biscuits vegan décomposés dans sa banane.
Le concept de douche, de brosse à dents ou de savon est pour lui un outil d’oppression fasciste. Il préfère laisser la pluie purificatrice du dimanche matin laver ses péchés, ou bien se rouler dans la rosée comme un sanglier mystique.
Apparence
Physiquement, le teufeur est reconnaissable à son allure de survivant d’une guerre radioactive entre Tribes. Cheveux crades, dreadlocks bricolées avec du chewing-gum, lunettes de soleil à 3 balles achetées à un mec louche dans une zone blanche. Il porte des sarouels tachés, parfois un masque à gaz (même hors Covid), et souvent des vestes militaires piquées dans un surplus pour le style.
Les tatouages sont fréquents, mais réalisés dans des conditions sanitaires douteuses, souvent entre deux joints, avec une aiguille chauffée au briquet et de l’encre de stylo. Le résultat est un mélange entre des symboles tribaux, des têtes de mort mal formées, et des logos de groupes dont il ne se souvient plus.
Langage
Le teufeur ne parle pas, il grogne, il klaxonne, il vibre. Son lexique est un mélange de verlan, d’onomatopées gutturales et d’imprécations contre la police. Il peut dire yeeee frérot avec 17 intonations différentes, qui signifient respectivement :
- t’as une douille
- t’as du son
- t’as vu mon chien
- j’ai paumé ma tente
- je viens de renifler du Doliprane périmé
Il adore dire système pour parler d’une enceinte, tribe pour parler de son groupe de bras cassés, et mur pour désigner n’importe quelle installation sonore de plus de deux palettes.
Organisation
Le teufeur croit en la désorganisation organisée. Pas de chef, pas de planning, pas de règles, juste une hiérarchie implicite basée sur l’ancienneté, la taille du système et le nombre de descentes de flics survivies. Y’a les monteurs, les électros, les baroudeurs, les dormeurs, les gens qui font semblant de mixer, les vrais DJs qui n’ont jamais eu de booking officiel, et les spectres (mecs qu’on voit toujours mais qu’on connaît pas).
Les rendez-vous se font par bouche-à-oreille, messages cryptés sur Telegram, ou signaux de fumée à base de clopes mentholées. Le lieu exact est toujours flou, même 2 heures avant le début. Et c’est normal. L’incertitude fait partie du rite. Si tu trouves la teuf du premier coup, c’est que t’es pas censé y être.
Musique
La musique du teufeur est une arme. Elle ne cherche pas à être agréable, elle veut t’éclater les neurones. Hardtek, Tribe, Acidcore, Frenchcore, Breakcore, Speedbass... tout est bon du moment que ça tape plus fort que le battement de ton cœur. Le silence est une insulte. La moindre baisse de volume est un blasphème.
Le teufeur ne danse pas, il entre en transe. Il saute, il vrille, il frappe le sol avec ses pieds crades, comme pour exorciser les impôts. Certains tournent en rond, d’autres fixent le ciel, d’autres lèchent les enceintes. On ne juge pas. On vibre.
Drogues
Le teufeur est un alchimiste du vice. Son cocktail standard varie entre MD, Keta, LSD, champis, 2CB, speed, taz maison, alcool pur, poppers, crack de l’amour et poudre mystère. Tout se passe dans la confiance la plus totale. Tu peux recevoir un bonbon dans la bouche d’un inconnu sans poser de questions. Après tout, c’est ça la famille.
Il existe un code non écrit : si t’es trop foncedé pour comprendre ce que t’as pris, bois de l’eau, rigole, et attends que ça passe. Si t’as un pote qui tremble dans la boue en parlant à un pigeon imaginaire, c’est que la teuf commence vraiment.
Rapports sociaux
Le teufeur ne juge pas. Il peut t’adopter en 15 minutes, partager son sac de couchage moisie, t’offrir une bière chaude, te faire un câlin de 14 minutes sans poser de questions. Mais il peut aussi disparaître sans prévenir, te laisser seul avec un chien et un mec en kilt qui parle à sa brosse à dents.
L’amour est libre, les genres sont flous, les relations sont aussi stables qu’un vinyle à 3g. Y’a des couples, des plans à 3 dans des tentes trouées, des déclarations d’amitié éternelle, suivies de 3 ans sans nouvelles.
Ennemis
Le flic. Incarnation de l’oppression. L’homme en bleu est l’antéchrist sonore. Il arrive toujours au pire moment, met fin à la magie, balance des gaz, confisque les subs et fout des amendes à des gens qui n’ont pas de domicile. Le teufeur sait se battre : il démonte tout en 10 minutes, il planque les caisses, il devient brouillard.
Mais il y a d’autres ennemis :
- Le touriste de la teuf, celui qui filme tout pour Insta
- Le mec qui met du Jul sur l’enceinte Bluetooth
- Le moralisateur vegan extrême qui juge ton kebab à 4h du mat
- Et surtout… la pluie
Vie après la teuf
Le retour du teufeur à la civilisation est un choc. Il marche comme un survivant de guerre, les tympans HS, la bouche sèche, l’esprit vide. Il traîne sa carcasse jusqu’à un coin d’herbe ou un parking, dort 19h, puis émerge, hagard, cherchant un kebab et du réseau.
Il ne travaille pas, ou alors en intérim, en intérim de l’intérim. Il vit en camion, squatte ou colocation improbable avec un mec qui élève des fourmis. Son agenda est vide, sauf les week-ends, remplis d’événements potentiels. Son corps est usé, mais son âme est libre. Il est sale, mais il est heureux.
Anecdotes
- Le teufeur peut survivre trois jours sans nourriture, mais pas trois heures sans son.
- Il distingue à l’oreille la marque d’un subwoofer à 30 mètres, même sous acide.
- Il n’a jamais lu de livre mais connaît l’histoire du mouvement rave mieux qu’un prof d’université.
- Sa pire phobie : un dimanche sans teuf.