«
La<touche<espace<de<mon<clavier<est<foutue »
«
La mienne aussi est cassée ! »
«
Lol, on s'en tape déjà des barres, n'espace ? »
La barre d’espace messieurs dames, comme chacun le sait, c’est cette large touche siégeant au bas de votre clavier. C’est cet appendice polymérique de forme rectangulaire, de dimension variable, permettant d’espacer les mots lors de la frappe, ou si besoin est de faire pause en plein milieu d’une rafle de boches durant une partie sanglante et au combien réjouissante de Call od Duty : Black Ops, interrompue par un « À table ! », suivi d’un irrémédiable « Putain tu fais chier m’man, tu peux les garder tes saloperies de choux de Bruxelles ! ».
Mais pour être honnête, ni vous ni moi n’en avons véritablement à taper de cette touche à la con. Enfin surtout moi en réalité, surtout depuis ce qui m’est arrivé, surtout depuis ce rêve étrange et percutant m’ayant paru pourtant si réel, surtout depuis ma rencontre avec le peuple bien singulier de cette région inhospitalière de la lointaine galaxie d’Andromède : la tribu de la Barre d’Espace !
Capitaine, regardez sur l'écran !
Taith Dezaub : Je crois bien que nous allons percuter un
PAN CAKE mon capitaine !
J.P. Girard : Un PAN CAKE, vous en êtes certain ?
Taith Dezaub : Certain, et pas un petit modèle ! L’analyseur spectral l’approxime à 15m de haut pour 10m de large, avec une composition à 90% en fécule de maïs, hallucinant !
Le Gluant : Incroyable, même moi en 4000 ans de travail je n’ai jamais vu un truc aussi monstrueux dans mon cabinet !
Professeur Chin’Kansen : J’ai questionné le
Pandex mais cette créature lui est
tout à fait inconnue.
Arthur : Moi je crois savoir ce que c’est, et même peut-être comment s’en débarrasser.
Le Gluant : C’est ça, et moi je suis capable de nettoyer les waters sans y mettre la langue ni même ouvrir tout grand ma bouche tant qu’on y est !
Arthur : ...
Taith Dezaub : Ça y’est, il s’approche, on dirait même qu’il y en a plusieurs, nous sommes perdus...
Taith Dezaub : Sproutch ? Comment ça Sproutch ?
Arthur : Ben Sproutch quoi, fallait pas s'attendre à quelque chose de spectaculaire non plus. C'était rien de plus qu'un gâteau apéritif !
Taith Dezaub : Hum, vous faîtes allusion à une de ces Battle-Chips qui sillonnent l’inter-espace ?
Arthur : Ben, je pensais plus au rayon apéro de l'inter-marché du centre commercial des Lilas, mais admettons oui.
J.P. Girard : En parlant d'inter-espace, je crois bien que cet incident nous a inopinément projeté dans un trou de ver ! C'est troublant !
Professeur Chin’Kansen : Trou noir plus exactement, mais je pense qu'on pourrait tirer profit de cet projection multivalente en orientant intelligemment le vaisseau dans une faille d'improbabilité transverse, tout en tenant compte bien évidement du flux cosmique infra-converse induit par la polarité intrinsèque du nuage floco-végétatif que l'on vient de traverser !
J.P. Girard : Nickel prof,
Arthur vous n'avez pas un petit creux ? Moi je tuerais pour un rail de coke et une petite
pipe de derrière les fagots !
Arthur : Oui, pourquoi pas, après tout autant profiter de ces dernier instants pour tenter de nouvelles expériences !
— Tout se passe comme prévu M ?
— Parfaitement M, le missile MM les a déviés directement dans l'hyper-freeway, espérons que leurs réserves de carburant suffiront à rallier notre base.
— Hum, nous ferions mieux d'envoyer M et M afin de s'en assurer non ?
— Très bien M, ils sont déjà en route...
En cuisine
J.P. Girard : Alors chef, la
pêche a été bonne ?
Le Gluant : Plutôt oui, je suis tombé sur un banc de saumons bleu d'une taille incroyable ! Ils ont certainement été appâtés par ces miettes éparpillées tout autour du vaisseau !
Arthur : Oh, c'est vous aussi qui faites la cuisine ?
Le Gluant : Mais certainement, entre deux nettoyages de cuvette j'ai tout à loisir d'évider une bonne livre de poisson, et qui plus est de vous concocter une sauce aux oranges dont vous me direz des nouvelles !
Arthur : Bleues aussi les oranges ?
Le Gluant : Hum, je vois que monsieur est un petit rigolo ! Allez, à table tout le monde !
À vrai dire ce saumon bleu avait tout du saumon rose, aspect, texture, même si son goût avait un petit quelques chose en plus, un parfum légèrement bleuté. Et pas un de ces bleus genre curaçao, non, plutôt genre de celui qu'on trouve dans le dentifrice signal blancheur extrême, avec parfum menthol et effet revigorant. Le repas fut arrosé de liqueur de Babelfish, un met rare selon le Gluant, et terminé par une glace parfum coquelicot-jasmin des terres de file Adèle fi, à peine trop poivrée à mon goût.
Arthur : Et sinon je me demandais, toute cette
histoire de trou de ver et de champ de probabilité là, vous y comprenez quelque chose vous ?
J.P. Girard : Pour faire simple je dirais que la probabilité de rencontrer un de ces trou de ver comme ça, comme de par hasard, est tellement faible que plus rien ne saurait m'étonner à présent. C'est un peu comme si il vous poussait une troisième
corne vous voyez ? La surprise produite par les deux premières ferait assurément passer ce troisième appendice au rang de simple curiosité.
Arthur : Okay, espérons que je ne sois pas le cocu de cette aventure alors !
Triangle carré
J.P. Girard : Ça y est, ça commence !
Arthur : Quoi ? Qu'est-ce qui commence ?
J.P. Girard : Et bien derrière vous, je vois juste de voir passer un magnifique
triangle carré !
Arthur : Hein ? Je suis peut-être pas doué en maths mais c'est impossible ça, un triangle carré !
J.P. Girard : Justement, raison de plus pour que ça apparaisse. Ah, et voilà un superbe spécimen de veau à trois pattes !
Arthur : Quoi ? Un veau intersidéral alors, d'ailleurs en parlant de vache j'ai comme une atroce douleur à la tête !
J.P. Girard : Ce n'est rien, juste votre troisième corne qui commece à percer votre épiderme.
Arthur : Ma troisième... ah oui, javais oublié. Et si je vous disais que j'ai vu passer un triangle à trois pattes, et un veau à quatre cotés, vous me croiriez ?
J.P. Girard : Bien sûr que non, ça c'est irréel, seules les choses impossibles peuvent se matérialiser dans un
champ de force d’improbabilité voyons !
Arthur : Vous êtes donc en train de me dire que ce serait... impossible !
J.P. Girard : Euh... oui... merde. Remarquez c'est plutôt mignon ces petites mandibules, et puis ça change des bêtes triangles isocèles qu'on voit tous les jours ! Ah, je crois que ça se calme, on a du sortir du trou de ver.
Arthur : J'pense pas, je viens de voir passer une bouillie de saumon bleu tourbillonnant dans une tornade à l'orange à travers le hublot !
J.P. Girard : Ah ça ? Non, c'est juste que le Prof a toujours eu du mal à digérer le poisson, il devrait freiner sur la
liqueur de Babelfish le bougre...
— Beurk, qu'est-ce que c'est que cette saloperie sur le
pare-brise ?
— Sauce à l'orange je dirais, bleue si je ne m'abuse !
— Voyons M, ne dites pas de bêtises, les oranges c'est vert, tout le monde sait ça !
— Bien sûr patron, désolé, en tout cas cette fois-ci c'est moi qui sonne...
Barre d'espace en approche
Attention !
