Utilisateur:Monsieur Brouillon/Furet du Nord

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Bonsoir, bonsoir...[1]

À l'époque la mode s'en tenait résolument au Noir et Blanc.

L’autre jour[2], tandis que je flânais nonchalamment au hasard des rues de Lille, mon regard se trouva comme happé par une charmante demoiselle, à qui l’on avait visiblement omis de préciser les us et coutumes du port de la jupe[3]. Aussi, comme magnétisé par la fine dentelle ornant ses dessous ainsi offerts à la vue de tous, ma trajectoire se vit imposer une déviation forcée d’environ 74 degrés, interrompue par un choc inopiné contre une paroi de verre se révélant être l’entrée de la plus imposante des librairies d’Europe, j’ai nommé le Furet du Nord[4].

Retour donc sur ce monument de la culture française, sur cet empire du mass média, bref sur cette sucess story que fut celle de Paul Callens, à qui je dois non seulement une fracture nasale, mais également un sujet d’article m’assurant une renommée sans précédant sur cet antre du divertissement quasi éducatoire que l’on nomme plus communément la sencyclopédie.



  1. C'est une parodie d'un sketch d'Olivier de Benoist, en réalité vous pouvez tout aussi bien lire cet article le matin, ou sur votre iPad si vous êtes un gosse de riche.
  2. Idem que pour la note précédente, même si là c'est déjà plus logique vu que le magasin ferme la nuit, ainsi que les jours fériés.
  3. J'entends par là croiser les jambes, éviter d'enjamber un ventilateur, ne pas manipuler de substances corrosives dans un flacon percé, où au moins choisir autre chose que des sous-vêtements Hello Kitty
  4. Notez que ça tombait plutôt bien, c'est le sujet de mon article !


Historique

Pour faire court, le Furet du Nord était en 1936 un magasin de fourrure moche et délabré, perdu dans une ruelle sombre et mal famée, et tenu par quelqu’un d’inconnu et certainement très laid[1]. Puis un jour, en 1950, un dénommé Paul Callens, fils de boucher bien qu’amateur de charcuterie, proposa à cette personne inconnue[2] de remplacer ses fourrures par des bouquins, et de déménager sa boutique sur la Grand Place[3].

Génial, un bouquin sur le billard ! Ah ben nan, les boules...

« Des bouquins ? Mais tu es fou, personne ne sait lire par ici ! » lui scandèrent ses détracteurs, et s'il est vrai que les premiers ouvrages proposés en magasin contenaient plus d’images que de textes[4], les mots on ensuite peu à peu pris le dessus, et on raconte qu'il existerait aujourd’hui des livres totalement dénués d’illustrations[5] !

Quoi qu’il en soit ce fut un réel succès, aussi Paul décida d’élargir son commerce, ou plutôt de l'éhautir puisque les propriétaires des bâtiments jouxtant le Furet refusaient de lui vendre leurs murs, ainsi que leur parquet. En 1964 fut implantée la toute première pochothèque de France[6], en lieu et place de la chambre à coucher de Paul Callens[7], et en 1970 on décida de construire un immense escalator, reliant aujourd’hui le hall d’entrée au rayon DVD, malheureusement encore vide à l'époque.

Ceci nous amène directement en 2002, date à laquelle un décorateur décida de remplacer les portes en chêne massif de l’entrée du magasin par de grands panneaux de verre translucide, contre lesquels les petits mateurs de ma sorte on coutume d’écraser leur figure déconfite et pleine de bosses !



  1. Ne serait-ce que pour faire rimer ma phrase.
  2. On suppose qu’elle ne lui était pas inconnue cette personne, à Paul Callens, on suppose même qu’elle s’appelait George Poulard, et qu’elle raffolait des biscuits sablés.
  3. En fait c’était plus du tout la même boutique, mais je fais parler les archives moi que voulez vous.
  4. Vous me direz qui lit encore les dialogues dans les bouquins pornos ?
  5. Hormis la couverture, ce serait idiot de passer à coté de la clientèle analphabète.
  6. Une pochothèque c’est comme une bibliothèque, mais avec uniquement des livres de poches, livres que je vous mets d’ailleurs au défi de glisser dans une de vos poches, à moins que vous habitiez à Bordeaux dans ce cas c’est une toute autre histoire.
  7. Qui fut contraint de partager un lit avec sa femme, fille de paysans du Val d’Aoste, elle aussi fana de charcuterie.


Stratégie marketing

La stratégie marketing des gérants du Furet est on ne peut plus simple, en gros elle consiste à faire rentrer les gens par une porte[1], les mains vides ou parfois sales pour les clients manquant d’hygiène, puis à les égarer dans les méandres du magasin pendant une durée allant de cinq minutes à cinq heures, avant de les faire ressortir par une seconde porte[2], avec à la main une moyenne de 2,35 articles.

Je comprends pourquoi on appelle ce genre de trucs une nature morte, bien qu'en laissant moisir les pommes pendant trois mois on pourrait leur rendre la vie !

Moi la dernière fois j’avais seulement deux articles en ressortant, un cahier de révision de maths niveau CP, avec tout un tas d’exos chiants à l’intérieur[3], et un exemplaire du dernier numéro de Fluide Glacial, rempli quant à lui de tout un tas de blagues potaches, voire même vulgaires et parfois carrément déplacées. Alors je sais ce que vous vous dites en me voyant me trimballer avec mes achats sous le bras, d’habitude les exhibitionnistes se contentent de glisser des bonbons sous leur imperméable, et les remplacer par un vulgaire Passeport Math limiterait immanquablement la chasse aux boutonneux premiers de classe algébrophages, ou à l’opposé aux imbéciles illettrés le confondant avec un livre de coloriage. Mais vous faites fausse route, en réalité je l’avais juste acheté pour me foutre de la gueule d’une copine qui allait passer son BAC[4], l’achat du Fluide Glacial m’ayant permis quant à lui de me rapprocher un tant soit peu de la moyenne de 2,35, ce qui ne peut être que bénéfique pour mon karma.

Mais le marketing ça consiste également à étudier les différents achats des clients, afin d’établir une sorte de profil et de les orienter vers les articles susceptibles de les intéresser. Admettons par exemple que quelqu’un ressorte avec les trois premiers volumes de l’encyclopédie Larousse, et bien je l’orienterai logiquement vers les dix-huit volumes restant, en commençant par lui faire miroiter du boudin par exemple[5] ! Quant au petit malin qui essayerait de quitter la boutique par le portique Sans achats[6], et bien je lui offrirais généreusement un magnifique sachet plastique orné du logo du magasin, afin que ce petit con serve au moins d'homme-sandwich dans la rue.

Cependant avant de passer à la caisse, revenons si vous le voulez bien dans le hall du magasin afin de visiter les lieux plus en profondeur, tout en prenant garde à ne pas perdre le Nord !



  1. Que l’on nomme dans le jargon professionnel la Porte d’entrée.
  2. Devinez comment on l’appelle dans le jargon ?
  3. Franchement ça vous captiverait vous de compter le nombre de pommes rouges dans un panier ?
  4. D’ailleurs elle a failli mettre une pomme verte avec les rouges, quelle gourdasse
  5. C’est en effet sur ce délicieux sujet cher à Diderot que s’ouvre le volume 4.
  6. Et je parle bien de quelqu’un qui ressortirait sans achats, et non les poches remplies de stylos Mont Blanc, avec en prime un poster dédicacé de Mylène Farmer coincé dans sa ceinture.


Suivez le guide

La première chose qu’on remarque en entrant au Furet du nord c’est le bordel sans nom régnant dans le grand hall. Incroyable, on croirait qu’ils ont laissé Gilbert Montagné[1] se charger d’empiler à la va vite des livres, CD, DVD ou coffrets cadeaux sur des tables basses croulant sous leur poids. Et non content de nous perdre parmi cet étalage d’articles hétéroclites, la plupart sont assortis d’une petite fiche, rédigée par les clients, afin de nous orienter dans notre recherche du St Graal[2], et nous faire perdre un temps précieux. Le plus prudent est donc de se hâter vers l’escalator principal, une valeur sûre comparé à la promenade qui va suivre.

Comme vous l’aurez compris le Furet du Nord est constitué d’une multitude d’escaliers reliés par des paliers, et monter au sous-sol ou descendre à l'étage supérieur sont des expressions tout à fait sensées en ces lieux. L’ascenseur même ne dessert qu’une sélection d’étages triés sur le volet, ou qu’on a jugés bon à faire visiter aux handicapés[3]. Fort heureusement, l’édifice propose un guichet d’accueil afin de vous orienter au mieux parmi ce dédale à faire pâlir le Minotaure, mais fort malheureusement, personne n’a encore pu le situer précisément dans le magasin[4].

Dernière trouvaille des gérants du Furet, ils ont décidé d'installer une agence de voyage au rez-de-chaussée du magasin, des fois que les clients chercheraient des informations trop précises pour être publiées par un éditeur souhaitant dépasser le cap des 300 ventes. « Excusez moi, je cherche une info sur la composition granitique du sable coincé entre les doigts de pied du Sphinx de Gizeh[5] ? ». « Hum, dans ce cas je vous propose un vol aller-retour Lesquin-Le Caire, petit déjeuner inclus, avec en bonus un kit du petit spéléologue ! ». Ouais, pourquoi pas après tout, et puis c'est bon pour le tourisme !



  1. Pour ceux qui ne connaitraient pas M. Montagné sachez qu’il vote UMP, qu’il a participé à l’émission Fort Boyard, et qu’il a récemment publié un livres aux éditions Calmann-Lévy. Ah, il est aveugle aussi, humour !
  2. Y’en a qui ont essayé, ils ont eu des problèmes, notamment un certain Arthur et son équipe de chevaliers médiévaux.
  3. Les rayonnages abordant les thématiques de la pêche aux canards ou de la copocléphilie en font par exemple partie.
  4. Pas le Minotaure, lui il est en Crète, et en retraite aussi depuis le temps.
  5. Pour info il contient en majorité de la calcite et du quartz, certainement des reliquats de sa dernière pédicure.


Partie en exploration

Je m’aperçois tout à coup qu’il serait beaucoup trop long, et chiant aussi, de décrire un par un chacun des rayons de cette immense librairie. Aussi, je me suis armé de courage, ainsi que d’un kit de survie en milieu hostile, en vue de partir en exploration une journée entière au Furet du Nord, afin de percer ses plus mystérieux secrets.

Exploration en milieu hostile : Furet du Nord

En cas de panne certains restent même coincés pendant des heures avant que l'on ne puisse venir les secourir !
— Les toilettes s'il vous plait ?
— En haut des marches, sur votre gauche !
Alors ça c'est vraiment de la pisse de chat !
9h30 — Le volet métallique se met enfin en branle, et moi de m’extirper de ma tente Quechua plantée dans le pavé du parvis, empruntée pour l’occasion à mon cousin Don Quichotte, avant de foncer droit sur l'entrée du magasin.

9h31 — Pourtant parti du bon pied je rentre de plein fouet dans la porte d'entrée en verre, mais quelle idée ils ont eu là sérieux, ils étaient parfait ces battants en chêne.

9h33 — Le vigile me soumet à une fouille intégrale, certainement mis en alerte par ma tente et mon sac de randonnée. Je sais bien que je suis un trou du cul mais quand même, il aurait pu y aller molo avec mon fondement !

9h35 — Après un habile slalom entre les tables du hall d’entrée j’atteins l’escalator principal, et preums qui plus est !

9h40 — Cinq minutes ont passées mais je suis toujours au RDC, j’en déduis que l’escalator est en panne, ou vraiment trop lent à mon gout. Je décide de me déporter vers l’escalier.

9h50 — Pas de chance, l’escalier aussi semble être en panne, il ne me reste plus qu’une unique solution : emprunter l’ascenseur ! Mais oui je vais le rendre après, soyez pas chiches !

10h00 — Après avoir appuyé sur un bouton au hasard, me voilà catapulté à l’étage 4, devant une agence de tourisme qu’on vient visiblement de déménager, et qui propose des voyages en Égypte au rabais.

10h20 — Passant devant le rayon jeu vidéo je ne peux m’empêcher de tâter de la Wii, me défoulant sur le jeu des Lapins Crétins en faisant même péter le high score à l'épreuve d'écrasage de grenouille au maillet.

10h50 — Je m’éclipse discrètement de la borne de jeu, la wiimote m’ayant malencontreusement échappé des mains pour finir sa course dans un écran 16 pouces, mais quelle idée de foutre ça là !

11h00 — Pris d'une irréfrénable envie de pisser je demande la direction des toilettes à un vendeur, « En haut des marches, sur votre gauche ! » m'indique t-il.

11h20 — Incapable de mettre la queue sur les cabinets, je porte finalement mon dévolu sur un pot à crayon Hello Kitty exposé au rayon papeterie. Tenté de l'emporter pour l'offrir à la demoiselle possédant déjà la culotte assortie, je me reprend au dernier moment m’apercevant qu'il est percé au fond : putain de camelote chinoise !

11h30 — Déjà plus léger j'entreprends la montée des marches façon festival de Cannes pour rejoindre le sommet de l'édifice.

11h40 — Je sens déjà la température de l'air extérieur diminuer, environ 1 degré par étage, et l'oxygène commence à se raréfier.

11h50 — Plusieurs corps épars gisent dans les escaliers, certains ont déjà essayé avant moi cette phénoménale ascension, Dieu ait leur âme... et leur femme aussi, tant qu'à faire ;)

12h00 — Les Cloches de Notre-Dame résonnent au loin, sonnant les douze coups de midi, à moins que ce ne soit mon cerveau embrumé par ce manque vital d'oxygène qui comment à me faire perdre le Nord, furetpurée !

12h02 — Au temps pour moi, c'était la sonnerie de mon iPhone : non maman je ne reviendrai pas pour déjeuner, mais dit à ma sœur Cathy d'éviter les pots à crayon Hello Kitty à l'avenir, ou au moins de vérifier s'ils ne font pas floc-floc...

12h10 — Ça y est, mes dernières forces viennent de me lâcher... je suffoque, mon cœur m'abandonne... une effroyable vision achève de me plonger dans un coma qui se pourrait irréversible... Prout ! oups, dsl, c'est certainement la bière de tout à l'heure, j'en étais où déjà ? Ah oui, aaaaaaaaargh...