VDM
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VDM est un site internet basé sur la vérité, qui utilise la mémoire du roman d’Albert Camus L’Etranger, afin d’encourager ses participants à éveiller leur conscience à la philosophie existentialiste.
Une analyse
Le court roman L’Etranger raconte la mort de Meursault, narrateur assassin improbable qui ne s’embarrasse pas de sentimentalisme. Il n’éprouve aucune émotion lorsqu’il apprend le décès de sa mère, encore moins lorsque sa condamnation à mort est proclamée par un juge qui l’accuse d’être un monstre, suite à un meurtre gratuit.
Meursault, selon Camus, n’est pas un monstre. C’est un homme qui accepte le fait de dire la vérité et refuse le faux-semblant. Selon Camus, Meursault n’est pas un sauvage mais un être primitif qui repousse le masque des conformismes sociétaux. Meursault refuse de mentir, il ne ressent pas grand-chose et refuse de se prêter au jeu des convenances sociales qui implique de « pleurer à l’enterrement de sa mère ». En ce sens, Meursault est un étranger : il n’est pas dans la société mais symboliquement à l’écart.
Fasciné par ce célèbre roman fondateur de la pensée camusienne, Florence Japrisot a souhaité faire partager aux internautes une nouvelle façon d’appréhender la philosophie existentialiste à travers un site hommage à Albert Camus, VDM, acronyme de Vérités Distinctives Mesurées.
Structure du site
Japrisot a repris l’incipit de L’Etranger pour en faire un gimmick fédéraliste autour de l’existentialisme, en invitant le lecteur à dévoiler sa propre vérité distinctive mesurée, soit en décrivant à la manière d’Albert Camus une parcelle de sa propre vérité.
Ce postulat implique de rationaliser au plus haut point ses émotions jusqu’à les effacer, et donner à réfléchir sur des actes dissociés de leur réalité émotionnelle. Les VDM sont donc présentées sous forme de liste, de manière à accentuer l’effet du dérisoire du concret qu’elles supposent. Pour exemple :
Le détachement, notion inconditionnelle du dévoilement de la VDM, suppose une acceptation sans réserve de la réalité. Le tangible est au cœur de cette proposition, qui dévoile un aspect arbitraire de l’existence : le narrateur se borne à constater la perte de la confiture de sa tartine sans appliquer de jugement de valeurs d’ordre affectif. Le parallèle avec Meursault est d’autant plus poignant que la colère ou la frustration sont absentes de ce constat. En imitant le héros de l’étranger, le postulant VDM affiche une sincérité qui le détache des normes sociales et affirme sa libre-pensée.
Limites de l’existentialisme
La pensée existentialiste suppose néanmoins une forme de courage social qui risque à terme de perdre le philosophe dans les méandres de l’absence d’affect. Une acceptation plane de la réalité risque en effet de provoquer un vrai détachement, qui non seulement conduit à une désocialisation mais aussi à un rejet de la vie.
Meursault meurt, ce qui signifie qu’il ne peut s’intégrer. Les participants au site VDM choisissent de poursuivre sa logique implacable, au risque de se démanteler émotionnellement à leur tour.
Alexis, qui affiche sa première pensée existentialiste sous cette forme, ne tarde pas à subir les transformations mentales suscitées par la philosophie :
Plus que la litote, ce qui semble anodin se métamorphose en obsession compulsive de décrire la réalité, et Alexis, en poursuivant son cheminement existentiel, va s’enfermer dans un détachement de la réalité qui va lui nuire :
Au fur et à mesure, Alexis passe d’un détachement passif à une volonté active d’influer sur le cours des évènements, tout comme Meursault qui assassine un homme pour tenter d’infléchir le cours de ses propres sentiments. Tout comme Meursault, l’acte d’Alexis entraîne des conséquences :
Le passage à l’acte entraîne une série de désagréments qui laissent à penser qu’Alexis, en tant que spectateur absent, ne pouvait se permettre de quitter sa position d’arbitre de la réalité. Il passe du statut d’observateur à celui de juge puisqu’il émet une critique de la réalité, et de pénitent puisqu’il accepte d’en subir les conséquences. Il quitte la sphère existentielle pour se réfugier dans une spirale de culpabilité judéo-chrétienne empreinte de cynisme, au risque d’abandonner sa propre emprise passive sur la réalité pour un activisme moral destructeur.
VDM et rapport philosophiques
L’aspect nietzschéen de VDM n’a pas échappé aux philosophes modernes qui n’y voient pas seulement le renouvellement de la pensée camusienne mais aussi une manière populaire de venir exposer ses propres constatations empiriques en surjouant le pragmatisme du surhomme.
Ainsi, dans son recueil sur les mécanismes de la réalité, le philosophe libertaire Michel Onfray témoigne de sa propre fascination pour le site VDM, qui rejoint sa conception de la philosophie transmissible au peuple :
Une analyse partagée par le philosophe Luc-Olivier d’Algange, qui redéfinit le rapport au christianisme de VDM par l’absence de marquage religieux : la réalité se déforme finalement de façon à vider de sens le contenu moral de sa propre constatation. Bien plus qu’un détachement, c’est une négation du moral qui s’opère, lorsque par exemple, Mélanie décrit la réalité en ces termes :
L’absence de moralité s’oppose à une simple acceptation de l’observation. Il y a un sous-entendu religieux qui implique une morale chrétienne : le gode est un objet immoral et perçu négativement par la société dans ce qu’elle a de plus symbolique, le noyau familial. Mais le trouble constaté se fait par la découverte du gode et non sa possession : Mélanie sous-entend que l’exhumation de l’objet implique une honte qu’elle ressent consciemment mais qui sera enterrée par la négation de la découverte, au risque de dissocier tout élément de jugement public d’un constat subjectif. Le moralisme, présent, est écarté par le tabou de la masturbation, plus puissant que le regard social.
Conclusion
Il est déterminant de noter l’innovation philosophique du site VDM, qui contribue à développer l’esprit critique et la pensée existentielle au sein d’une communauté internaute se détachant à la fois de toute forme de cohésion par la solitude exprimée, mais se rejoignant dans une même analyse abstraite de l’arbitraire.
Pour conclure, VDM est un site novateur et libéral dans son fondement essentialiste restructuré, un pied-de-nez à ceux qui à couvert de formules mystiques littéraires qui n’ont aucun sens, souhaiteraient conserver leur pied-à-terre de posture philosophique, totalement artificielle, voire complètement conne, de gros losers de la vie qui parlent pour ne rien dire, alors que le constat objectif et le libre-accès à la parole suffit à prendre compte de l’inanité et de la nullité de l’état d’esprit occidental contemporain qui ne vaut guère mieux.
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