Il avait vendu son âme à Satan pour avoir la célébrité et la fortune : Framboisier a honoré hier son contrat auprès du Seigneur des Ténèbres
De notre envoyé spécial
χλςmith ΤrismégistΞ ⇒
- le 5 janvier 2015

L’issue était inévitable

Claude Chamboisier aura bien tenté de changer de nom, se cachant dans la petite ville d’Arlon depuis des années sous le pseudonyme de Framboisier, puis de Fraisier, pour échapper à la clause que le démon avait inséré dans son contrat-type permettant à un aspirant artiste, abandonné des muses, de se hisser dans l’Olympe des créateurs sans talent particulier. Sans succès. Ce succès, qu’il avait pourtant tant convoité, dont il avait caressé le rêve de ses doigts graciles de guitariste hors paire, l’a abandonné au dernier moment, le jour-même où il devenait littéralement vital.
La formalité était pourtant claire : en échange de son âme immortelle, Claude Chamboisier allait devenir Framboisier, et sur cette pierre musicale la société AB production allait bâtir son église, son empire, son temple pour asseoir son hégémonie cosmique dans le cœur des futurs adultes. Cette renaissance lui avait permis de décrocher avec son groupe, en 1987, l’exclusivité de la production musicale du mythologique Club Dorothée, et ce pour 10 ans (!), coupant la chique à des formations retournées depuis dans l’anonymat : Rolling Stones, ACDC, The Beatles…des groupes dont le nom dira encore vaguement quelque chose à certains mais dont la destinée s’est malheureusement éteinte avant même d’avoir commencé.
Retour sur la carrière de l’homme
Souvenons-nous, c’était au début des années 80 : l’Olympia était fermé pour cause de non-programmation, les finances du Zénith n’étaient pas au beau fixe et même le Carnegie Hall de New York menaçait de mettre la clé sous la porte définitivement…le monde de la musique souffrait d’une absence totale de création depuis Elvis, et la mort de ce dernier avait laissé un grand vide dans les autoradios du monde entier.
C’est alors qu’entra en scène, si l’on peut dire, Claude Chamboisier. Il avait 30 ans, était jeune et plein d’avenir, et tout son entourage espérait déjà pour lui une brillante carrière dans le bâtiment, ou dans la restauration rapide. Seulement parfois la vie en décidait autrement (elle a beaucoup changé depuis), et c’est après qu’on lui refusât quelques dizaines d’emploi dans ces domaines qu’il décida de s’orienter à plein temps vers l’intermittence du spectacle. Nourrissant une passion pour les sons produits avec la bouche, il choisit dans un premier temps de devenir chanteur. Mais rien ne se passa comme prévu…
Faible de son insuccès, Chamboisier partit en 1986 seul à travers les déserts du globe, vociférant contre son créateur, remettant même en doute sa paternité, et hurlant aux échos de se taire au lieu de répéter tout ce qu’il disait. Il pensait sa carrière éteinte sur le point de ne pas s’allumer…
C’était sans compter sur Méphistophélès et son adoration pour la guitare, qui observait dans l’ombre le jeune Chamboisier : suite à la déception que lui avait infligée Joe Satriani, puis Eddie Van Halen, auxquels il avait octroyé le pouvoir de cet instrument et dont les âmes lui avaient échappé suite à un second pacte fomenté avec Dieu Lui-même, il décida cette fois de se pencher sur le cas d’un vrai professionnel qui n’allait pas délaisser ses promesses pour partir à la concurrence.
Le pacte

Retour sur la carrière de l’artiste possédé
Un suppôt et au lit plus tard, se réveilla un Framboisier, métamorphosé. Ses rides avaient cédé la place à des fossettes malicieuses, des pattes d’oie rieuse soulignaient le coin de ses yeux profonds, et tous les enfants du monde adoraient la fête au village et les merguez parties, chose encore inimaginable quelques heures auparavant.

Ce fut alors le début de quelque chose de fou : de scène en scène, de mercredi après-midi en mercredi après-midi, commença à se construire la légende vivante de « celui qui jouait avec six mains ». Et s’entourant rapidement des plus grands artistes de son temps, Néné, Minet, Rémy et Eric, tous considérés comme des cadors dans leur domaine respectif, il créa un nouveau groupe. Baptisé Les Musclés en hommage au cœur (c’est un muscle) mis à écrire chacun de leur texte, le groupe prit son envol pour ne plus jamais redescendre, comme un Phénix avant de mourir.
Notre conseil aux futurs artistes

Mais tout a une fin. Malgré ses multiples déménagements, la fin anticipée du Club Dorothée destinée à berner Lucifer en lui faisant croire que c’était la fin du monde, et plusieurs manœuvres audacieuses pour faire croire qu’il était Bernard Minet, rien n’y fit. Et le 4 janvier 2015, lorsqu’il croisa au détour d’une ruelle son créancier, il tourna sur sa gauche au prochain croisement pour la dernière fois et fut emporté dans le Grand Rien.
Cette tragique affaire démontre que le couperet des pactes sataniques peut tomber n’importe quand. Lorsque les clauses sont bien négociées par l’artiste, il peut espérer faire un retour médiatique bien des années après l’extinction de sa carrière : c’est le cas de Renaud ou Jean-Louis Aubert, et dans une moindre mesure de Bertrand Cantat, avec lequel Satan n’avait pas désiré contracter dans un premier temps, jusqu’à ce qu’il procède au sacrifice d’une jeune femme vierge (astrologie) et attire une nouvelle fois l’attention de l’ange déchu.
Mais cela reste tout de même un jeu dangereux. C’est pourquoi la créativité rend aujourd’hui hommage à celui qui aura tout sacrifié pour, un jour, enfanter ce Stairway to heaven qui restera à jamais dans le cœur des mélomanes.
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