Umami
Ohayooo gozaimasu[1], honorable lecteur de la dÉ[2], aujourd’hui l’humble dÉsencyclopédie que nous sommes, vous propose un voyage au royaume céleste du goût. Vous autres vénérables occidentaux[3] définissez les sensations gustatives sur quatre plans : le sucré, le salé, l’amertume, l’acidité. Tout votre art culinaire[4] est architecturé sur ces quatre saveurs.
Quatre c’est bien peu quand existe un mot comme quintessence qui éclaire les sombres vermisseaux que nous sommes sur toute l’insuffisance de ce nombre confronté à l'incomparable perfection du cinq. C’est bien modestement, honorable lecteur de la dÉ, que nous portons à votre attention l’existence d’une cinquième saveur, secret du raffinement inégalable de la cuisine japonaise : l'.
Prononciation et écriture
|
Les Japonais utilisent le romaji (écriture latine) uniquement pour se faire comprendre des honorables occidentaux[5]. L' se prononce "OU-MA-MI" et non U-MA-MI. Il s'écrira de préférence en Kanji (rébus empruntés aux Chinois) comme ci-après :
... ni ... |
Plus qu’une saveur, une philosophie de vie
|
L’, qui se prononce donc « Ouuuumamiiiiii », est difficilement appréhendable pour qui ne possède pas la finesse d’esprit inculquée par l’éducation japonaise. L'art, qu'il soit pictural, musical, culinaire ou autre, pour un Japonais sublime l’esthétisme dans la simplicité et le dépouillement pour mieux capter la subtile essence qui réside dans le détail absout des parasites du superflu. Par exemple dans la musique traditionnelle japonaise qui résonne, dans notre esprit et dans tout restaurant japonais qui se respecte, au son de mélodies épurées jouées au shamisen[6], les silences sont tout aussi importants que les notes. Ils transcendent la force des émotions délivrées par la musique et magnifient l'intensité de l'instant présent. Préférer le silence au bruit, la simplicité à l’ostentatoire, voilà quelques clés pour tenter d’approcher l'.
Description du goût umami
Si l’on devait traduire , des mots comme délectable et succulent pourraient en donner un assez bon aperçu sans vraiment toutefois nous en délivrer totalement la portée.
Pour tenter d’effleurer l', essayez-vous à cet exercice mental. Vous êtes dans un petit jardin, agenouillé sur un tatami en paille de riz étendu à même un lit de mousse tendre. Dans l’infini silence chuchote le vent prisonnier des jeunes bambous et une pluie de pétales de cerisier tombe tel un rideau floconneux de soie délicate. Vous respirez et captez les subtils effluves de jasmin qui empreignent l’air de leur doux parfum. Vous êtes en paix, en parfaite harmonie avec les éléments naturels, prêt à déguster la micro portion de tofu cuisinée pour vous, avec toute la science de Yasuji Sasaki[7]. Avec un grand respect vous saisissez le mets exquis de vos baguettes et le portez à votre bouche. Vous sentez sa texture qui palpite sur votre langue. Vous savourez les imperceptibles saveurs à la recherche de l'. Faisant écho à votre plaisir, le claquement du shishi odoshi[8] vous apaise de son rythme lent qui fige à chacun de ses battements l’envol du temps. Traversant la porte des mille délices, vous allez au-delà de la matière du tofu pour en goûter la substance protéique. Un koto accompagne de sa somptueuse mélopée votre ascension vers le plaisir ultime. Vos papilles explorent la protéine pour ne garder que le léger nectar de l'acide glutamique. Votre poul s’accélère, donnant la mesure au martellement d'un kaito, les cordes du koto s'affolent et cent geishas arrivent de toutes parts dans un tourbillon de kimonos multicolores. Elles dansent pour vous. Elles vous envoûtent par les gracieuses envolées de leurs éventails. Vous plongez encore plus loin dans la matière et deux acteurs de théâtre nô entonnent le kiri[9] pour célébrer votre découverte de l’imperceptible saveur de l’anion carboxyle de l’acide glutamique. La musique devient encore plus véloce. Les geishas retirent leur kimono et dévoilent de sexy uniformes de lycéennes. Une pluie de petites culottes à la mode petit bateau tombe du ciel et c’est mille soleils qui embrasent votre palais jusqu’à votre âme et explosent tel un feu d’artifice aux lueurs éternelles.
Vous venez d’atteindre l', moment intense et fugace où l’ultime prend corps. Hébété, vous essuyez du dos de la main un filet de sang qui coule de votre narine et vous comprenez que les mots, même choisis avec soin, seront toujours trop maladroits pour vous aider à décrire l'. Tout ce que votre petit cerveau étriqué d’occidental arrive à formuler c’est que l' a un incomparable goût d’anion.
|
Où trouve-t-on la saveur Umami
|
Il faut savoir que l’ fait l’objet de recherches très sérieuses au Japon. Les excellents scientifiques japonais en microbiologie ont découvert que l’ avait un goût d’ion de glutamate, mais aussi que l’ avait aussi un goût d’ion d’inosisate et aussi que l’ avait un goût d’ion de guanylate. Devant ce constat on peut se demander comment il est possible qu’une saveur corresponde à trois goûts différents. La réponse est très simple. En réalité ce n’est pas l’ qui a un goût d’ions mais bel et bien les ions qui ont un goût d’. De plus, splendeur des splendeurs, nous retrouvons ces ions dans de nombreux aliments, ce qui fait de l’ un goût universel et oserons nous l’avancer, peut-être le goût universel.
Comme nous le démontre l’illustration ci-dessus, on trouve de l’ dans les algues, les … alors là, on ne voit pas très bien sur la deuxième image ci-dessus, mais il semblerait que ce soit une banane ou un bout de bois, ce n'est pas très clair ... et dans le moisi. Uniquement des aliments sains, très peu caloriques et très bons pour la santé.
|
La cuisine Umami
|
Pour faire de la cuisine , il faut des ingrédients .
Postulat de base :
- En mangeant de la viande, par exemple de la viande de vache, l'homme fabrique de l'homme.
- La vache elle, fabrique de la vache en mangeant de l'herbe.
Or, si l'homme mange uniquement de la vache, nourriture très riche en protéines et lipides, il finira par ressembler à une grosse vache.
Or, nous avons vu qu'avec de l'herbe on peut fabriquer de la vache. Donc manger de l'herbe c'est manger en quelque sorte de la vache. Mais nous savons maintenant qu'avec de l'herbe on fabrique des vaches donc si l'homme mange de l'herbe il finira par ressembler à une grosse vache également (CQFD, de plus l'herbe c'est super dégueu car les chiens pissent dedans).
La nourriture qui rend gros n'est pas . Or il est notoire qu'un brin d'herbe c'est mince, longiligne et que ça respire la bonne santé. Que mange le brin d'herbe pour avoir une telle ligne ? Il se nourrit de terre, matériau de base pour fabriquer de l'herbe, qui est le matériau de base pour faire de la vache, qui sert à fabriquer de l'homme.
Revenir à l'essentiel, c'est ça et il suffit d'appliquer ce petit raisonnement à toutes les denrées habituellement consommées pour retrouver les ingrédients .
Pour finir et en bonus, noble lecteur de la dÉsencyclopédie, permettez-nous de vous offrir en modeste présent la recette du succulent bouillon , aller simple en première classe pour le pays du soleil levant.
Recette du délicieux bouillon
Les Japonais cuisinent comme ils fabriquent des voitures et comme ils font tous dans la vie : avec méthode et rigueur.
Indrédients selon Ishikawa:
Quantitatif selon Taguchi:
Facteurs d'influences pour 1,5 litres d'eau :
- A = puissance de feu : doux ; moyen ; fort
- B = quantité de bouillon : 0,01 g ; 1/2 cube ; 1 cube
- C = matière du contenant : Casserole inox 18/10 ; casserole PVC
- D = Temps de cuisson : 2 s ; 300 s ; 10 H
A | 3 | * | ||||||
B | 3 | 3x3 | * | |||||
C | 2 | |||||||
D | 3x3 | 3x3 | 2x3 | * | ||||
BC | 3x2 | 2x3x3 | * | * | 2x3x3 | * | ||
CD | 2x3 | 2x3x3 | 3x3x3 | * | * | * | * | |
3 | 3 | 2 | 3 | 3x2 | 3x2 | |||
A | B | C | D | BC | CD |
Quantités et réglages pour obtenir un résultat optimum :
- Temps de cuisson : 300 s
- Réglage de la puissance de chauffe : feu fort
- Quantité cube de bouillon maggi maggi : 0,01 g
- Matériaux du contenant : tout inox
Verser les 1,5 litres d'eau dans une casserole. Porter l'eau à ébullition. Avec le pointe d'un couteau, érafler un cube de bouillon de poule maggi, maggi, c'est la cuisine d'aujourd'hui, et mélanger le zeste ainsi extrait à l'eau bouillante. Voilà. Le bouillon est prêt. Comme vous ne pouvez goûter en direct ce fabuleux bouillon Umami, nous faisons appel à l'Ishizuka Hidehiko[12] française, égérie de la marque Bonux pour ce faire :
Maïté nous dit avec son accent chantant : | |
Aucune chance de se faire des grosses taches bien dégueulasses sur le tablier avec ça. Et je fais comment pour passer toute entière à la bassine moi ? |
Maïté a parfaitement décrit ce que nous nous évertuons à vous expliquer depuis le début de cet article. Lorsqu'un aliment n'est ni salé, ni sucré, ni acide, ni amer, il n'a pas de goût et c'est ça l'Umami. Puissant n'est-ce pas ?
|
Test d'évaluation
L'umami c'est le goût, le vrai, ça rime avec joyeux appétits, Plus belle la vie, Nicolas Sarkozy et cet insignifiant article avait pour ambition de vous donner une infime perception de la saveur Umami. Nous vous invitons à vérifier si vous avez intégré la leçon grâce au petit test suivant. Des paires d'images vous sont proposées, il vous suffit de pointer le curseur de la souris sur celle qui vous semble pour que le résultat s'affiche. En cas d'échec, notre aimable animateur vous indiquera votre gage car rien de tel qu'une bonne punition pour apprendre et retenir tout en s'amusant :
Notes
- ↑ trad. Jap-> fr : Bonjour
- ↑ trad. Jap-> fr : vermine de branleur
- ↑ trad. Jap-> fr : Barbares primitifs
- ↑ trad. Jap-> fr : une traduction littérale donne « votre pâté pour chien », mais pour s’approcher au plus juste de la sémantique japonaise il est plus correct de le traduire par « votre bouffe de cantoche »
- ↑ trad. Jap-> fr : abrutis complètement incultes
- ↑ trad. Jap-> fr : shamisen
- ↑ Obscur cuistot de la franchise Asiland
- ↑ machin en bambou qui fait du bruit quand il est plein d'eau. Y en a dans tous les mangas.
- ↑ Fromage des gastronomes en culotte courte
- ↑ Partition de Merry Christmas Mr Lawrence pour kazoo
- ↑ Mantra utilisé par les sumôtoris (également appelés rikishi) avant d'attaquer le quartier de bœuf, les cinq moutons et la dizaine de volailles qui composent chacun de leur repas
- ↑ Maïté homme à la japonaise
Portail de la Grande Cuisine |
Cet article, basé sur le texte de Wikipédia «Umami», est disponible uniquement sous licence GFDL. |
Cet article a été voté dans le "best of" de la Désencyclopédie! |