Désinformation:Liliane Bettencourt et son ménestrel à 414 millions d'euros

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Liliane Bettencourt et son ménestrel à 414 millions d'euros

De notre envoyé spécial  χλςmith ΤrismégistΞ Pendu or.png - ‎le 29 janvier 2015

BordeauxProxima du Centaure — 
« Gentes vieilles dames, gentes damoiseaux,

  Oyez comme sortie de mon panier,
  Tel un lapin d'un grand chapeau,

  Le récit de François-Marie Banier. »
~ Plaidoirie de Maître Hunnecaroth, avocat du photographe-ménestrel, Tribunal de Bordeaux, le 28 janvier 2015.


Les odeurs du cigare et du Brandy pénètrent l'intérieur de la salle d'audience au moment où les huissiers ouvrent la porte à François-Marie Banier. Celui-ci entre, flegmatique dandy d'une autre époque à la démarche lunaire, et s'avance dans l'allée centrale. Chacun de ses pas rythment un air quasiment indicible de ukulélé, qu'on croirait sorti de la guitare qu'il porte dans son dos.

Quelques marches encore et il se tient à la barre, droit et impeccable dans son costume de velours rouge, posé presque négligemment sur les bretelles jaunes retenant son pantalon à carreaux, trop grand de plusieurs tailles. Seuls ses pieds nus sur le marbre tranchent avec la splendeur du Tribunal.


Pourtant le procureur, indélicat autant que désespérément prosaïque, brise très vite l'harmonie de cette entrée.


« Ce procureur avait un profil très Cléopâtre dans Astérix chez Cléopâtre : magnifique. Oh, regardez ce sac plastique qui s'envole dans la brise légère ! »
Le procureur : M. Banier, est-il vrai que Madame Bettencourt vous aurait remis personnellement près de 414 millions d'euros, somme que vous avez finalement perçue en abusant manifestement de sa faiblesse ?


— Monseigneur Procureur, répond François-Marie Banier en ôtant son haut-de-forme dans un salut magistral, je ne comprends pas un mot de vos allégations. Mais de quoi parlez-vous ? Pourquoi dites-vous des chiffres ?


Le procureur : Je parle de madame Liliane Bettencourt, milliardaire héritière des entreprises L'Oréal, que vous avez dépossédée !


Banier : La vieille Lili, une milliardaire ? Pourquoi pas une millionnaire tant que vous y êtes ! Et milliardaire en quoi donc ? En fraises des bois ? En pépites de chocolat ? Elle en avait bien entreposé quelques paniers...


Le procureur : Milliardaire en euros M. Banier ! Et 414 millions sont allés directement remplir l'une de vos nombreuses poches !


Banier : Des millions, des milliards, vous vous contredisez mon jeune ami ! Vous perdez la tête, ajouta-t-il en lançant un clin d’œil complice à l'auditoire – puis, levant ses mains très haut pour les montrer à tous : comment pourrais-je dépenser tout ça d'euros (il ouvre et ferme frénétiquement les mains pour mimer plusieurs dizaines), je ne sais même pas à quoi servent ces choses !


Le procureur : Mais vous vous moquez du Tribunal !


Banier : Obstruction, votre endive !


Le procureur : Monsieur le juge, je vous demande instamment de rappeler M. Banier, qui est tout de même accusé d'avoir volé sans scrupule une dame âgée sans défense, à l'ordre sans plus tarder.


Banier : Miroir miroir, monsieur le Juge, miroir !


Le juge, frappant le marteau sur son socle : Silence, SILENCE !


François-Marie Banier rappelle avoir insisté pour redécorer lui-même la salle d'audience avant le début du procès. « Monseigneur Procureur, si je ne réussis pas à rendre votre Justice plus juste, je l'ai au moins rendue plus belle », assène-t-il. Il hèle ensuite à la greffière d'ajouter 800 francs de dommage et intérêt en réparation du préjudice de voir son chef d’œuvre Henri II se retourner contre lui.

Vient rapidement le moment de reconstituer la personnalité de l'accusé. Il est demandé à celui-ci de décliner son identité.

« Autoportrait »
– François-Marie Banier, décembre 2014.
Banier : Banier, François-Marie, né enfant, qui mourra un jour et cueille la vie à pleine main. Je suis né d'une mère aimante, qui lisait Zola et Balzac...


Le juge l'interrompt : M. Banier, la Cour n'a pas de temps à perdre en détails et en circonlocutions inutiles. Je vous demanderais de faire plus concis.


Banier : Que ne puis-je peindre mon propre tableau dans la lenteur qui...


Le juge, le reprenant : M. Banier !


Banier : Eh bien j'ai 67 ans. J'ai été battu par mon père, puis j'ai été dans un lycée privé où régnait la misère et les cris. C'est là que mon esprit s'est envolé dans l'évasion.


Le juge : Comment décririez-vous vos relations avec la femme la plus riche de France ?


Banier : Mais cessez de me parler de femmes et de richesses, et de femmes et de richesses ! Je suis un modeste saltimbanque, un amuseur, j'aime sans compter et je ne sais pas qui est cette femme riche dont vous me parlez !


Le juge, excédé : M. Banier, nous parlons toujours de madame Bettencourt...


Banier : Laissez-moi plutôt vous raconter l'histoire du petit colibri. Oncques ne vit plus courageux jadis dans la forêt de cristal que le petit colibri, qui vivait avec ses amies les tapirs et les gibbons. Mais voilà qu'un feu se déchaîne et que les animaux...


Le procureur : Objection, votre honneur, ceci est hors de propos !


Le juge : Objection rejetée. Continuez monsieur Banier, cela m'intéresse.


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Banier : Ah oui ? Euh...ahem, eh bien disons que les animaux ont peur, mais pas le colibri, qui ramène des seaux d'eaux et sauve tout le monde. Voilà.


Le juge : Très bien. Et ?


Banier : Non, c'est tout. Il a sauvé tout le monde, et voilà.


Le juge : ...


Banier : Eh bien...n'aviez-vous pas des questions sur des sommes d'argent fictives à me poser, ou quelque chose comme ça ?


Le juge : Tout-à-fait, revenons-en à ces 414 millions d'euros que vous avez dérobés.


Banier : Mais je ne comprends pas ces chiffres ! Je suis désolé, je vous le dis tout de suite ! Je ne suis pas très chiffre...parlons de lettres : « Et Dieu si j'eusse estudié du temps de ma jeusnesle folle, j'eusse maison et couche molle, mais quoy ? Je filoye l'escole... »


Le juge : Mais cessez vos idioties !


Banier : François Villon, une idiotie ! Diantre ! Qu'on m'amène ma grande épée, qu'Aragon me préserve !


Le juge, battant du marteau : SILENCE, SILENCE !


« Miroir miroir, monsieur le Juge, miroir ! »

L'avocat du photographe est dépassé, la défense de son client est impénétrable : il ne sait visiblement pas de quoi parle le juge, et cela est bon pour lui.

Banier : Monsieur le Juge, je vous récuse, vous êtes récusé : récusation, direct. Non, vous ne m'infligerez pas votre Justice à deux vitesses ; qui laisse les puissants filer et met en prison les pauvres, dès que vous avez la prétention de les accuser d'avoir volé 414 malheureux millions d'euros, chose que dont le monde parmi mes amis doute ! Et même : qu'est-ce que quatre cent millions d'euros, si c'est pour s'adosser un ami, un confident, un pygmalion ? Non vraiment, vous n'en valez pas la peine. Nous sommes des gens simples, nous voulons des choses simples et vivons de troc, c'est cela que vous ne pouvez supporter, môssieur !


Le juge, hors de lui : SILENCE ! Je suspends l'audience, l'audience est suspendue ! Vous m'entendez, l'audience est suspendue !


Et cela n'est pas bon pour lui.


C'est alors qu'un brouhaha commence à murmurer dans l'assistance, et que les officiels comme les parties commencent à s'entrechoquer avec violence, qu'apparaît, Deux ex machina, une cheval blanc gigantesque auréolé d'une aura brillante qui fracasse les vitres de la salle donnant sur l'extérieur. Il atterrit sous les yeux médusés des magistrats, et déploie majestueusement ses deux ailes lumineuses.

Banier : Pégasus ! Oh, mon cher Pégasus, mon fidèle ami...comment ? Le pays imaginaire est en danger ? La Grande Impératrice, héritière du Royaume de Walmart, requiert ma présence afin que je lui conte les hostilités et la conseille dans les manœuvres ? Pas une seconde à perdre, en route !


Le juge... : Monsieur Banier, mon-sieur Banier...


Banier, ayant enfourché Pégasus, s'élançant vers le ciel à travers la vitre béante. : Je m'en reviendrai après la suspension d'audience, monsieur le Juge, une autre gente dame me nécessite !



On comprend que François-Marie Banier n'est pas cet homme que l'on croit


« Non, et bien au contraire, il est celui que l'on ne croit pas. Et pour cause, quel abyme entre lui et nous ! Alors si le présumé coupable doit être jugé par ses pairs : Messieurs les magistrats, avouez que vous ne pouvez juger cet homme ! »
~ Gllaum4.pngGllaum4.pngGllaum4.pngGllaum4.pngGllaum4.png – Téléstar


Et tout ceci n'est qu'un avant goût de ce que vous verrez en assistant à « Liliane Bettencourt et son ménestrel à 414 millions d'euros », les lundi, mercredi et dimanche à 17h, au Théâtre des Deux Ânes.


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