De l'art d'aller chier au bureau ou la lutte du Bien contre le Mal
Aller à la selle au bureau est certainement l’acte qui, dans toute la vie d’un homme, présente le plus d’enjeux vis-à-vis de son image auprès des autres, de l’estime que lui portent ses collègues, ou en bref de sa situation dans l’échelle sociale de l’entreprise. On ne compte d’ailleurs plus les cas de suicide dus à l’échec d’une manœuvre de relargage, ou pire, les accidents survenus suite à une occlusion intestinale fortuite.
Voici donc pour vous, fidèle lecteur du bureau, et vous aussi qui matez discrètement le décolleté de la secrétaire penchée sur la photocopieuse, un étalage des choses à faire et surtout des choses à ne pas faire, afin de vous délecter comme il se doit du plaisir procuré par un passage aux cabinets, sans pour autant entacher de quelque manière que ce soit votre image auprès de la direction, ainsi que votre fond de culotte bien entendu.
8h30
Il est 8h30, vous êtes confortablement installé sur votre chaise Dactylo, en train de vérifier si un auteur talentueux n’a pas posté une nouvelle œuvre sur la dÉ, quand soudain un curieux borborygme vient perturber l’ambiance sereine de votre bureau. Sous l’œil amusé de votre collègue Nicole, en train de se délecter d’une succulente cerise, vous réalisez que ce bruit intriguant n’est autre que l’annonce de l’arrivée imminente d’un convoi exceptionnel, trahissant les vestiges de votre repas de la veille. « Et merde, je le savais que je n’aurais pas dû bouffer de ces saletés de machin El Paso », vous dites-vous avec remord, tandis que le transit continue son office tant bien que mal.
8h31
Il est 8h31, la taupe frappe au guichet, vous tentez vainement de resserrer votre assise fessière, tout en vous dandinant maladroitement sur votre fauteuil dans l’espoir de repousser l’échéance de l’instant tant redouté, mais il déjà trop tard, les tortillas et leur sauce épicée ont fait leur office.
Rendez-vous à l’évidence que diable : vous devez faire caca !
8h40
Ça y est, plus moyen de faire marche arrière, et puis pourquoi se priver d’un besoin naturel, surtout quand celui-ci est autant synonyme de liberté, de jouissance, en bref d’orgasme que le fait d’aller déposer un énorme étron !
Mais il vous faut un alibi, vous ne pouvez quand même pas annoncer cash, comme ça, sans fioriture aucune : « Excuse-moi Nicole, il faut que j’aille chier, je reviens dans un instant ». Non, ça ne se fait pas. Il faut enrober soigneusement la chose, afin de la faire passer tout en douceur, incognito.
« Tiens, Nicole, as-tu eu vent de ce dépôt de bilan ? » (oui, elle en eu vent, un courant légèrement parfumé au curry d’ailleurs). « Je vais aller aux nouvelles, je n’en ai pas pour longtemps. » Voilà une formulation tout à fait adéquate, tout du moins bien plus que : « Je vais aller poser une pêche, prépare le Air Wick ma chérie ! » Et voilà une bonne chose de faite !
8h42
Vous voici en route pour la grande traversée, mais le chemin est semé d’embuches et d’infinies précautions sont à prendre afin de parvenir au trône sans encombre. Premièrement évitez d’emporter un magazine du type Voici ou Paris Match, en plus d’attirer l’attention de vos collègue sur votre personne, leur papier verni ne sera d’aucun recours en cas de pénurie de papier hygiénique. Préférez leur la page BD du 20 Minutes, qui discrètement pliée en quatre dans votre poche se révélera étonnamment agréable au toucher de votre fleur intime (croyez-moi je sais ce que je dis).
Vous adopterez évidemment une démarche sereine et posée, sans trop insister sur la désinvolture quand même. Le plus simple est encore de faire semblant de vous rendre à la machine à café, ou même à la photocopieuse selon le plan de votre étage, et de bifurquer discrètement à l’instant stratégique pour brouiller les pistes au mieux.
Quoi qu’il en soit vous devriez parvenir sans encombre à destination, patience le Saint Graal est désormais tout proche !
8h48
Aie aie aie, alors que vous étiez parvenu au terme de votre épopée à travers le couloir 4B, voilà que vous est apparu le pire message qu’il puisse être dans un tel moment de stress scatodermique : occupé !
Eh oui, vous n’êtes certainement pas le seul a avoir mangé épicé dans le bâtiment, et à moins de tenter une mission suicide dans les toilettes des dames, votre seule solution de repli est de feinter un lavage de main, ou au moins de vous soulager la vessie pour ne pas repartir bredouille. Mais alors que vous alliez tourner les talons le cliquetis de la serrure se fait entendre ! Faute de temps pour improviser une mise en scène salvatrice vous vous enfoncez dans le creux de la porte, pour voir s’extirper maladroitement des cabinets... Nicole !
8h51
Super, plus personne en vue. Votre heure est arrivée ! Fini ce poids sur l’estomac, fini ce barbouillement embarrassant de votre intestin, votre journée va enfin pouvoir reprendre son cours normal !
Vous verrouillez la porte afin d’éviter toute intrusion, bien que la visite inopinée de Virginie, la petite stagiaire du troisième, ne serait pas de refus, et vous inspectez d’un bref coup d’œil la salle d’opération : rien à signaler, la fête peut commencer !
8h53
Jusqu’ici tout se passe comme prévu, grâce à un habile jeu de balancier vous parvenez à éviter le tant redouté arrosement fessial, et la qualité de vos selles vous rassure au sujet de votre repas de la veille : pas de ténia dans les buritos, ouf.
Mais alors que vous alliez procéder à la mise à feu du troisième missile Tomahawk, voilà que la poignée du champ de tir se met en branle, son sas d’entrée mis à mal par un tambourinement insistant, assorti d’un cri bourru porteur d’un lourd message : « Hé, y’a quelqu’un ? »
8h56
C’est bon, le danger semble écarté, mais il s’en est fallu de peu pour que cet assaut inopiné ne signe l’échec de votre dangereuse mission. D’ailleurs le dernier projectile vient d’être largué, et il va être temps pour vous de regagner la base.
Vous empoignez une ligne d’une dizaine de carreaux de cellulose, que vous portez à votre arrière train en prenant soin de dédoubler la couche protectrice : on ne sait jamais, un incident est si vite arrivé.
Trente seconde et un dernier au revoir plus tard, vous actionnez le levier d’évacuation synonyme de réussite pour votre mission : vous ne vous en êtes pas si mal tiré après tout !
9h00
Frais comme un gardon vous vous extirpez des waters, croisant au passage M. Cartier, votre boss, qui lui aussi doit se plier aux lois de la nature. C’est drôle comme de petits gestes du quotidien viennent à nous rappeler combien nous sommes bien peu de choses face à la nature, et que même si certains jouissent de plus de pouvoirs, font preuve de plus d’autorités, et bien que malgré cela l’appel de la selle se révèle au final de plus fort et que...
Le Directeur vous crie depuis les water : | |
Hé espèce de gros dégueulasse, le Air Wick c'est pas fait pour les vaches !!! |
Toujours plus de lectures saines sur la dÉ
En théorie : Code rectal - Peine de merde - Poussée Q |
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