Forêt de Bouconne
Les Arumbayas ont la forêt d’Emeraude, les Bretons ont la forêt de Brocéliande, les Elfes ont la forêt de Lothlorien, les Toulousains ont la forêt de Bouconne.
Un miracle de la nature…
S’étendant sur un nombre incalculable d’hectares entre Lévignac-sur-Save, Pujaudran et Cornebarrieu, la forêt de Bouconne est une des Sept merveilles du Monde naturel. Plus vaste forêt de France, loin devant la forêt domaniale de Buzet-sur-Tarn et le Jardin des Plantes de Toulouse, aucun explorateur toulousain n’a jamais pu se vanter de l’avoir traversé à pied – du moins dans le sens de la longueur.
La forêt de Bouconne est inscrite depuis le 8 Février 2008 au Patrimoine Mondial de l’UNESCO au double titre de la protection des parkings en milieu sylvestre et de la sauvegarde des espèces protégées de bûcherons de l’Isle-Jourdain.
Géologie
Le sous-sol de la forêt de Bouconne est du type silico-calcaire sablonneux, c'est-à-dire constitué de tout petits cailloux mélangés avec de la terre. Les tout petits cailloux sont généralement de forme arrondie et d’un diamètre dépassant rarement quatre centimètres. Le substrat terreux salit un peu les mains quand on le touche. On conseille de les essuyer avec un mouchoir propre afin d’ôter toute trace de poussière superflue.
Flore
A ce contexte géologique exceptionnel est due la présence d’une vie végétale vierge, riche, grandiose, primaire, exubérante où se distinguent deux types de chênes, le chêne sessile et le chêne pédonculé (ce n’est pas un gros mot) auxquels les biologistes prêtent la qualité extraordinaire d’être tout à fait indiscernables l’un de l’autre.
Entre les troncs des arbres vernaculaires poussent des feuilles mortes, d’une teinte puissante et persistante, rouge rubis comme le rubis, jaune topaze comme la topaze ou marron comme les marrons.
Les espèces végétales nuisibles comme le séquoia, le baobab et le palétuvier – qui sont d’ailleurs d’un exotisme du plus mauvais goût – y sont tout à fait absentes. Par contre, l’aubépine et le roncier sauvage y forment les buissons gracieux qui inspirèrent Jackson Pollock et que protègent exceptionnellement des grillages en acier galvanisé. A l’orée occidentale de la forêt s’élèvent les fûts majestueux du pin méditerranéen, une espèce endémique que l’on préserve pour ses étranges cocons de soie tissés par les chenilles processionnaires.
Faune
Au pied des hautes futaies imposantes, sous les taillis dédaléens des sous-bois, vit le Lapin, Oryctolagus cuniculus (ce n’est pas un gros mot non plus), dit encore « Lapin commun » ou « Lapin domestique ».
Le Lapin s’est échappé du clapier de Monsieur Paulin Baridous, résidant 14 rue de la Henne-Close à Pibrac, le matin du 7 Novembre 2007 alors que sa petite-fille Blandine, âgée de 7 ans, allait lui apporter du maïs. Il est gris avec une tache blanche sur le front et il a un petit air très malin. Il aime bien les épis de maïs. Blandine est inconsolable. Si quelqu’un retrouve le Lapin, prière de le rapporter à son propriétaire.
Mais aussi une forêt miraculeuse…
En 333, l’Itinerarium Burdigalensis appelait la forêt Bucconis. L’origine de ce terme est obscure. Labrousse, dans Toulouse Antique, donne ce nom comme celtique, selon un anthroponyme Bucco ou Bouco dérivant de Bucinobantibibus qui signifierait « le peuple joyeux et vaillant, fier de s’abreuver au pis fécond de la Grande Déesse Vache ». Cela tendrait à prouver qu’à l’époque la faune comptait, en plus du Lapin, la Vache, aujourd’hui disparue de nos frondaisons.
Le miracle de Charles VI
Au XIVème siècle, le chroniqueur Jean Froissart rapporte que le bon roi Charles VI, dit alors le Bien-Aimé avant d’être appelé plus tard le Fol, alors qu’il était en visite à Toulouse et « qu’il estoit allé chassouiller le Lapin avec ses bons et preux et valliants chevaliers, s’empauma dans la fourret de Bouconne, moult sombrissime et telle obscure grandement qu’il ne pouvut mais retrouver icel cheminement, non plus qu’il ne voyait comme issir de si abominable péril. »
La nuit tombait et, s’enfonçant toujours plus dans les profondeurs du bois sans pouvoir reconnaître où ils étaient, les chevaliers de la Cour de France tinrent la délibération suivante qui nous fut fidèlement transmise par le chroniqueur :
C’est ainsi que, selon le chroniqueur, Charles VI et la fine fleur de la chevalerie française coururent sus au lapineau et, traversant le fourré, se retrouvèrent sains et saufs hors du bois, au beau milieu d’un champ de patates. Voyant là la main miraculeuse du Seigneur, Charles VI offrit un don à Notre-Dame de l’église des Carmes à Toulouse et fonda l’Ordre de l’Espérance dont il fit chevaliers les vaillants seigneurs qui l’avaient accompagné en ce péril, en leur octroyant de surcroît une somptueuse ceinture d’or.
Une fresque commémorant ce haut fait d’armes fut peinte sur les murs de l’église gothique des Carmes. Hélas, Charles VI eut moins de chance quelques années plus tard dans la forêt de Fontainebleau : dans des circonstances similaires, l’esprit déjà troublé par la mésaventure de Bouconne, il perdit définitivement la raison. Quant à la fresque, elle fut détruite avec l’inutile monastère des Carmes pour construire le splendide parking que l’on peut encore admirer aujourd’hui…
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