Quête

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13h22 : Mon vieux téléviseur grésille dans un coin de mon taudis en diffusant une rediffusion d'un téléachat. J'émerge lentement, difficilement au beau milieu de canettes de bière et de boites de pizza. Chaque mouvement pour sortir de mon lit est atroce, entre ma gueule de bois et les horribles grincement des ressorts sous mon poids. Au pied du lit, une bouteille de whisky s'est écoulée sur un vieux tapis élimé récupéré à la mort de mes grands-parents.

Vêtu de mon t-shirt rouge délavé et de mon jean troué, je sors de mon appartement. Le journal du voisin, abandonné sur le palier m'apprend que 25 000 personnes sont mortes la semaine dernière dans une catastrophe que la fuite du plafond a préféré effacer. Un clochard ronfle dans l'escalier. Normal, la porte a été fracassée quand les flics sont venus arrêter cette famille de sans-papiers nord-coréens hier. Il y en a même un qui a préféré sauter du cinquième plutôt que de retourner dans son pays. Je met un pied dehors. Pas de bol. Il pleut. Et je viens de marcher dans une merde.

Je sens que ma journée au Pôle Emploi va être pourrie.


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Oyé oyé braves gens !

Quel est ce marasme, l'ami ? N'es-tu point en train de gâcher les plus belles années de ta vie à te morfondre ? Sors de chez toi, pars en quête d'aventures et de richesses dans de lointaines contrées. Ta destinée t'attend, héros !

Ah... Oui. C'est vrai. Mon jeune ami, c'est la crise. Il n'y a plus de richesse, ni ici ni ailleurs. Quand à l'aventure, je crains que tu n'aies d'autre choix que d'aller pourfendre le taliban dans les montagnes d'Afghanistan ou dans le 93. Je suis vraiment désolé.

En même temps, tu vis vraiment dans une époque de merde. Plus de princesses à sauver donc plus de dragons donc plus de vaillants chevaliers donc plus d'épées magiques donc plus de temples maudits donc plus de sorciers donc plus de trolls.

Ah, si, il y a des trolls quand même.

Allons, pour te consoler, je vais te raconter une histoire. Une histoire dont tu seras le héros. Une aventure médiévale. Une épopée héroïque. Une légende qui durera des siècles et des siècles sur laquelle tu pourras fantasmer pour oublier ta vie de merde.

Prépare toi, Lecteur, à devenir un aventurier médiéval et fantastique.


Prologue

Où le Lecteur arrive en ville.


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Ô Lecteur, toi qui arrive si vaillamment des terres perdues de Chatuzange-le-Gobelin. Puisse la gloire te trouver dans les rues de Barys, la capitale du majestueux royaume de Fronz. Tu débarques au port de Barys, la tête pleine de rêves et les cheveux pleins de croûtes, pour te faire un nom par toi-même.

Avec toutes les économies de ta famille en poche, cinquante pièces de cuivres rutilantes, tu es prêt à prendre un nouveau départ dans ce monde plein d'opportunités.


— Comment ça, 100 pièces de cuivre pour un morceau de pain ?
— C'est le moins cher de la ville. Tu prends ou tu dégages, il y a d'autres pauvres qui attendent.

Ce vieux con de boulanger avait raison : son pain était le moins cher de toutes la ville. Mais ce n'était pas mon seul problème. J'étais seul, dans une grande ville, sans un sou en poche. Après trois jours à errer dans les rues à la recherche d'un moyen de gagner de quoi boire, manger et dormir (dans cet ordre), je m'apprêtais à pousser la porte d'une taverne pour y mendier un croûton de pain.


Je fis un bond de trois pieds en arrière et trébuchai sur un pavé. Une créature une fois et demi plus grande qu'un homme, avec la peau verte et vêtue d'un habit sombre se tenait derrière la porte, comme si elle s'apprêtait à sortir. Un troll. Il se dirigeait vers moi d'un air calme, souriant, une étrange massue carrée à sa main gauche. Il étendit son long bras droit vers moi. Je fermai les yeux, transi de peur. Il me saisit le poignet et m'aida à me remettre sur pied. Je rouvris les yeux. Le troll remettait en place un totem en forme de papillon noir qu'il portait autour du cou. Je ne répondis rien, j'attendais la mort.

— Vous n'avez rien de cassé ? Je suis vraiment navré de vous avoir...
— PITIÉ NE ME MANGEZ PAS, hurlai-je.

Le troll me regardait comme si j'étais un tecktonik épileptique à la fête des Lumières, avec un mélange de pitié, d'empathie et de crainte que je lui saute dessus.

— Vous allez bien ?

J'étais au milieu de la rue, en train de hurler de peur devant un troll qui avait l'air ma foi très urbain. J'allais de toute évidence très bien.


— C'est la première fois que vous voyez un troll ?
— Oui. Il n'y en a pas, de là où je viens. J'ai seulement entendu des légendes de géants verts mangeurs d'enfants...

Il éclata d'un rire franc, attirant l'attention d'une bande de joueurs de cartes dans le coin de la taverne. Le troll avait insisté pour qu'on rentre boire quelque chose de chaud. Il m'avait jusque là laissé avaler mon grog en silence.

— Non, nous ne mangeons pas d'Hommes. Vous savez, les humains de Fronz ont conquis des terres de nos ancêtres il y a bien longtemps. Ils en ont fait une province du royaume et nous y ont confiné pendant des siècles. Puis, après la guerre contre les Seigneurs Sorciers, ils ont eu besoin de nos parents pour reconstruire le pays. Ils ont du vivre dans des campements de fortune en dehors des villes pendant des décennies. Et puis, il y a deux ans, après le meurtre sauvage d'un de nos frères , nous avons manifesté notre mécontentement...

Un homme complètement ivre s'appuya sur l'épaule du troll.

— Ils ont tout... Hips... Cassé. Ils ont même mis le feu à ma charrette !
— Et ? Demandai-je.
— Sa majesté le bon Roi Shirax nous a accordé les mêmes droits qu'aux humains. Il faut encore faire changer quelques mentalités, dit-il en se débarrassant de l'alcoolique, mais... Nous voulons nous intégrer dans la société.

J'acquiesçai poliment et, voyant ma choppe finie, je sortai mes cinquante pièces de bronze. Le troll les considéra, réfléchit un instant, puis me demanda :

— Dites, vous pensez survivre combien de temps ici ?
— Euh...
— Vous comptez rester ?
— J'ai pas assez d'argent pour retourner chez moi, alors j'crois que oui.
— Écoutez, j'ai trouvé un logement mais le propriétaire ne veut pas le louer à un troll, ça vous dit ?
— Euh... Ça veut bien dire que je ne vivrai plus dans la rue ?
— Ouaip.
— Ok, moi c'est Lecteur.
— Je m'appelle Didé. Enchanté.
Le troll Didé.

Chapitre 1

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Ô Lecteur, sitôt arrivé à Barys, tu as fait la connaissance d'un puissant Troll avec qui tu as fait un pacte de sang. Maintenant, entre lui et toi, c'est à la vie, à la mort. Le loyer tu partageras, ta vaisselle tu laveras, pas trop de bruit quand il dort tu feras.

Ça faisait deux mois que j'habitais avec Didé. Tout se passait plutôt bien. Il m'avait trouvé un travail dans un petit restaurant appartenant à un cousin éloigné de son beau-frère, M. Factif. On y servait de la viande de minotaure grillée à la broche entre deux tranches de pain, le tout avec des patates coupées en long et frites et de la sauce piquante. C'était un boulot assez fatiguant car la viande de minotaure, ça se découpe à la machette. Et un troll, ça en a besoin de beaucoup.

En même temps, je prenais des cours de magie à la fac'. Je m'en sortais pas mal, en belote et au poker surtout. Et puis un jour, M. Dtimesgoodtimes me fit venir à sa table.

Le troll Dtimesgoodtimes et le troll Factif.
— Assieds toi, petit.

Dtimesgoodtimes était grand et costaud, même pour un troll de pierre. Je ne savais pas ce qu'il faisait dans la vie, mais c'était un troll ayant les moyens de voyager en mustang alors qu'il restait toute la journée (ou presque) dans le restaurant. Il paraissait même que c'était son restaurant.

— C'est quoi ton nom ?
— Lecteur, m'sieur.
— Tu fais de la magie, à ce qu'on m'a dit.

Il m'observait à travers la fumée de son gros cigare. Il devait être aussi long que mon avant-bras. Je m'efforçais de soutenir son regard.

— Ouais, mais j'arrive pas encore à faire sortir des pigeons de mon chapeau.

Il me fixa pendant deux bonnes minutes. Je ne fréquentais pas des trolls depuis suffisamment longtemps pour savoir si c'était une bonne chose. Factif, lui, s'était rapproché de moi. Visiblement, il attendait la réaction de son patron.


Le troll Dtimesgoodtimes éclata de rire.

— Tu me plais, petit. J'ai un boulot pour toi. Un boulot facile et bien payé. T'auras même pas besoin de récupérer les pièces derrière les oreilles de l'ennemi. Ça te dit ?
— Dites m'en plus.
— Hé hé, t'es un malin toi. Tu vois, on m'a raconté qu'il y avait un temple à l'extérieur de la ville. Une bande de malades qui cherchent l'apocalypse en essayant d'invoquer le démon de la mort par indigestion. Et ça tu vois, c'est mauvais pour le business.
— Ça m'a l'air risqué, non ?
— Écoute, je cherche un dernier gars. Les autres c'est des cracks. Tu connais déjà Didé, les deux autres c'est des humains comme toi. Ils ont déjà fait deux-trois boulots pour moi. Ils sont réglo et ils connaissent leur job. Alors, tu prends ?
— Ouais.
— Parfait. Tu passeras chez Angaros pour récupérer du matos. Didé t'emmènera.


— Pourquoi tu bosses pour Dtimesgoodtimes, toi ?
— Tu sais, il n'y a pas beaucoup d'humains qui donnent leur chance aux trolls, alors c'est ça ou la rue.
— On arrive. Rappelle toi : Angaros est un vieux troll, mais si il te voit faire un truc louche, il est parfaitement capable de te mettre une balle dans le filet avant que t'aies pu bouger. Pigé ?

Cinq minutes plus tard, nous ressortions. Angaros était un vrai pro : il m'avait fourgué une longue robe rouge sombre avec une capuche et une longue dague qu'il m'avait décrite comme peut-être magique pour 8 pièces d'argent empruntées. Quand à Didé, il était ressorti avec une énorme arbalète de siège sur laquelle était montée une baïonnette.

Chapitre 2

Où le Lecteur et sa compagnie accomplissent de hauts faits


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Ô Lecteur, l'appel de l'aventure était trop fort. Tu as accepté de faire partie d'une formidable quête. Tremblez, ennemis, devant la bravitude de nos braves héros !

La nuit et la brume étaient tombées sur le quartier du N'œftroi, le quartier nain de Barys. Ce qui n'avait rien de réjouissant, vu que le N'œftroi avait déjà mauvaise réputation de jour par temps clair. Je frissonnais autant de froid que de peur, un peu en retrait de Didé qui fumait au coin de la rue.

— Ils ne vont pas venir ? Ils devraient déjà être là.

Une bande de nains passa près nous en lançant quelques injures, mais en restant suffisamment loin de Didé. Soudain, une main se posa sur mon épaule.


Une autre main me réveilla. En me donnant des baffes, plus précisément. Didé m'aida à me relever. Les propriétaires des deux mains m'observaient, avec mépris pour le premier, inquiétude pour la seconde.

— Lecteur, je te présente Elena et Sig. Les gars, c'est le nouveau.
Elena, Sig et la Décolleuse de Têtes (+12 contre les lutins unijambistes).

Le temple n'était même pas caché. Ni fermé, malgré qu'il soit onze heures passées. Lorsque nous entrâmes, un prêtre cessa le catéchisme, referma sa bure et vint à notre rencontre.

— Les tout-puissants Nut et La sont avec vous, mes fils. Soyez les bienve...

Personnellement, je n'ai pas réussi à voir ce qu'il s'était passé ensuite. Trop rapide. Mais Sig avait fait une clef de bras au prêtre, Didé le tenait en joue avec son arbalète et Elena se dirigeait vers les enfants en pleurs.

— Allons allons mes fils, épargnez à un saint homme et...
— Tu la fermes et tu nous conduis au rituels maudits et tout le toutim. Et plus vite que ça. Elena, revient ici ! Didé, tu passes derrière lui et toi, tu te tiens prêt à intervenir.

Pas de doutes, Sig s'y connaissait. Le prêtre nous mena à un autel maculé de sang et de pâte à tartiner goût noisette, fit pivoter un chandelier. Un raclement sourd se fit entendre, et l'autel se déplaça, laissant apparaître un escalier chichement éclairé à la bougie.

— Allez, tout le monde dedans. Toi aussi Lecteur. Et plus vite que ça !


L'escalier était raide, creusé à même la pierre. Didé et Sig encadraient le prêtre, le menaçant de leur armes respectives. Je marchais derrière avec Elena.

— Tu te rends compte de la quantité de bougies qu'ils utilisent, ces temples maudits ? Fit-elle. Et en plus, ce ne sont même pas des bougies basse consommation. Et après, on va s'étonner du réchauffement climatique. Moi, je le dis, si Ils continuent comme ça, on court droit à la catastrophe...
— Oui mais de toutes façons ils font des rituels satani...
— Et tu as vu l'isolation des murs ? Une vraie passoire. Et je ne te parle pas du mobilier en bois rare. Quelle honte quand même, toutes ces arbres abattus pour ça... Et pour les parchemins aussi, d'ailleurs.
— Ils veulent provoquer la fin du Monde...
— Et toutes ces offrandes, quand on pense que certains n'ont pas de quoi manger... C'est révoltant, tu ne trouves pas ?
— Si, si. Bien sur.


Je priai silencieusement pour qu'un piège se déclenche subitement et me tue sur le coup. Rien. C'est toujours étonnant que dans un monde où la population du panthéon divin se compte en milliers, aucun d'entre eux n'écoute.


L'escalier se finissait sur une lourde porte en bois.

— C'est là. Ils ne m'ouvriront pas, dit le prêtre.
— Aucune importance, répondit Sig en l'assommant.

Didé mit en joue son arbalète. Ses traits tenaient plus du tronc de platane qu'autre chose. Il tira dans la porte.

Là encore, c'est un peu flou. Je me rappelle avoir vu Sig et Didé foncer en hurlant à travers les débris de la porte et la poussière que sa dislocation avait soulevé. J'avais sorti ma lame. Elle scintillait un peu.

Sig avait sous-estimé le nombre d'ennemis. Malgré que deux adeptes aient été cloués au mur opposé par le trait, il en restait toujours une dizaine. Didé en tenait quelques-uns à l'écart avec la baïonnette, et Sig en avait déjà découpé deux dans le sens de la largeur. Deux s'approchaient de moi, le cimeterre à la main pour l'un, le bâton de sorcier pour l'autre.

— Impie, sous peu ton sang tartinera les biscottes de mes Dieux !

Je parais fébrilement un coup de taille, et un sort s'écrasa sur une barrière invisible à quelques centimètres de moi. Elena.

Je retirais ma dague du cœur du prêtre. J'avais déjà pris quelques coups de lame de part et d'autre, et une boule de feu m'avait atteint au bras. Elena essayait de me protéger du mieux possible, et à défaut de me soigner. Je voyais trouble, je titubais. Didé ployait sous les coups de cinq fanatiques. Sig reculait lui aussi. Le sorcier face à moi lançait un sort. Il fallait que je le pare.

L'avantage avec les mondes fantastiques, c'est que les chances sur un million ont toutes les chances de se réaliser.

Le sort toucha l'acier de plein fouet qui parut l'absorber. De petits éclairs bleus le parcoururent silencieusement pendant, mettons, deux secondes, juste pour tenir le spectateur en haleine. C'est assez difficile de ne pas plagier Harry Potter et Georges Lucas en matière d'effets spéciaux. Pour rester sobre, disons qu'une tempête d'âmes en furie déferla sur les prêtres, les réduisant à l'état de légumes. Puis la tempête s'arrêta.

Sig et Didé se relevèrent et se tournèrent vers moi. J'affichais ouvertement mon incompréhension. Renonçant à comprendre, nous achevâmes les blessés et emportions tout ce qui avait de la valeur. Dix minutes plus tard, nous étions prêts à repartir, le sac sur l'épaule. Elena nous interpella.

— Attendez, nous devons libérer les sacrifices humains.
— C'est pas dans le contrat, répondit Sig.
— Et les pauvres enfants traumatisés.
— Non plus. On se taille avant que des renforts arrivent.
— Mais...
— Écoute, c'est pas dans le contrat, c'est tout. Allez, viens.

Nous nous éloignions malgré les protestations de notre soigneuse dans la nuit et le brouillard. Ma dague ne scintillait plus.


Effectivement, sauver les innocents figure rarement dans les contrats des héros.

Chapitre 3

Où la compagnie se voit confier une quête de la plus haute importance.


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Ô Lecteur, vainqueur de la secte abominable de Nut et La, maître d'un sort de légende. Qui arrêtera ton irrésistible ascension ?

Ma dague n'a jamais relancé de sort, mais j'ai trouvé mon utilité dans le groupe à partir du moment où j'ai su maîtriser le sort de découpe-en-deux-mais-tadaaam-l'assistante est intacte. Je ne faisais juste pas le recollage. Dans l'ensemble, Sig me méprisait toujours autant et Elena était toujours aussi chiante.

Un jour où je me rendais au Centaure qui Fume, j'ai remarqué une certaine agitation dans les rues. En arrivant, je vis le restaurant. Ou plutôt un énorme tas de gravats. Et Didé se tenait devant, à coté d'une orque à couettes bardée de piercings, et de tout un tas de mecs pas en uniforme.

— Les habitants n'ont rien vu ?
— Si, mais ils ont peur.
— Remarquez, c'est normal, il y a quand même pas loin d'une centaine de carreaux d'arbalètes, dont certaines de siège dans les décombres. Il a quand même répliqué. Regardez cette tête de nain plantée dans le mur là.
— Ah ouais putain j'avais pas vu, vous avez l'œil patron.
— Et l'analyse médico-légale, ça avance ?
— Mort naturelle, je pense.

Ils continuèrent un moment leur enquête, puis, ayant aperçu un jeune nain avec une casquette à l'envers et un survet' bleu ciel, ils décidèrent de lui courir après. Je restais seul solennellement avec Didé.

— C'est la mort qu'il aurait voulu, m'a-t-il dit, enfin je pense.
— Ah bon ?
— Comme il est né, à poil, en hurlant et couvert de cailloux.
Des gardes supercompétents. Le nain mourra deux mois plus tard, à 2 jours de la retraite.

Les jours suivant furent consacrés au deuil. Puis après la mise en cailloux, on essaya de se consacrer à trouver du boulot. On avait déjà une certaine expérience du milieu, c'était déjà ça.

On enchaîna plusieurs boulots légaux mal payés comme garder des donjons, verbaliser les charretiers qui roulent trop vite ou encore faire des virées dans les quartiers populaires pour tuer des membres de minorités. À chaque fois que l'on se présentait pour une mission un peu plus importante, on nous répondait.

— Vous n'avez pas le niveau, revenez quand vous aurez plus d'expérience.

Puis un jour, un des grands ducs du royaume nous fit mander.

— Vous connaissez Bouloulou-bantou-bantou ? Ce sont des terres barbares aux mains de tyrans qui passent leur temps à s'entre-tuer. Et il se trouve qu'un de ces tyrans était un bon pige... Partenaire. Celui qui a pris sa place ne veut pas entendre parler de moi. Et pourtant, je veux son trésor. Et en particulier ses diamants. Je me suis fait comprendre ?

Tout ce qu'il nous avait filé, c'était une carte. Des diamants... Le trésor d'un royaume... Ça fait rêver comme ça, mais quand vous vous tapez trois semaines à cheval dans du sable pour arriver en plein milieu d'une jungle hostile, ça prend une autre allure. Bouloulou-bantou-bantou, la capitale, ne ressemblait à aucune ville. C'était la planète Bouloulou-bantou-bantou. On y trouvait des explorateurs fronzais tout pales au milieu de la population locale couleur ébène. Et globalement, c'était la guerre. Les partisans du vieux roi affrontaient les partisans du nouveau. On trouva par chance un indigène qui accepta de nous conduire jusqu'au palais parce qu'il avait de la famille retenue là-bas.

Moi et le guide. Là on courrait pour échapper à la mort.

Le palais se trouvait dans la jungle. Aucun chemin praticable hormis une route bien gardée. On passa donc dans la jungle, ce qui permit d'essayer de manger un steak de crocodile (ça ne cuit pas, étrange non ?). Après trois jour de marche, le palais nous apparut. Un petit palais en pierre, bâti au milieu d'un marécage. La populace miséreuse qui travaillait autour ne donnait pas l'impression de vivre à proximité d'un trésor.

Sig nous fit le topo.

— Bon, c'est un donjon de type PMC : on ouvre la porte, on tue le monstre, on prend la clé et on va à la salle suivante où on refait la même chose. Normalement c'est de notre niveau, en plus je me suis stuff farm +16 contre les miséreux. La strat' c'est tout con je tank, Didé, toi tu dps, Lecteur tu les kite et aggro et tu les nuke, et toi Elena tu heal. Ok ? Si vous faîtes pas de conneries on a toutes les chances de gagner.


Et effectivement, après les 263 salles du donjon (qui avait l'air plus petit vu de l'extérieur), on tua le roi avec une stratégie du type courir tout autour de la salle en criant et en lançant des trucs et on obtint le super objet de quête Diamant de Bantou (Force +3, gargouillis de ventre -2, protection contre les aveugles). Il restait plus qu'à le ramener à Barys

Chapitre 4

Où la compagnie se sépare dans la douleur.


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Ô lecteur, tu as réussi des actes dignes des plus grands héros de l'histoire, tu es un peu l'égal d'Aragorn ou du mec qui te fait deviner sous quel pot de yaourt se trouve la boulette. Que mille vierges soient à tes pieds !

La joyeuse compagnie s'en retournait en Fronz chargée du butin du pillage du donjon du seigneur m'Ktoubouktoubou Bé. Sur le chemin, nos héros rencontrèrent un émissaire venu de Barys.

— Nobles aventuriers, Sa Majesté a eu vent de votre exploit et vous invite à le rencontrer au Palais, dans deux jours.
— Chouette, s'exclama Didé, j'ai toujours voulu parler au Roi Chirax. Il a toujours été si bon avec mon peuple.

L'émissaire eut tout à coup l'air gêné.

— Vous n'êtes pas au courant ? Chirax est mystérieusement décédé. Le grand Vizir Zarquo a été couronné hier.

Après avoir échangé les politesses d'usage avec l'envoyé, la troupe reprit son chemin.


À Barys, tout avait changé : Zarquo avait autorisé les quarante Kak, une guilde de mages noirs, à s'installer en ville contre une forte somme d'argent. Ils ont racheté tous les ateliers de la ville. Ils avaient payé leurs employés avec de l'or transmuté qui se changea en plomb le lendemain, puis, profitant de cette crise, rachetèrent tout le reste pour une bouchée de pain. Zarquo avait en outre attisé la haine entre les races, ce qui avait créé d'immenses émeutes qui avaient abouti à une répression sanglante.


J'essayais de ne pas regarder les familles de mendiants réduits à se battre pour les restes d'une poubelle.


Le palais royal, par contre, étincelait. Les gardes hésitèrent à laisser entrer Didé, mais nous fûmes introduits auprès du vizir.

— Vous êtes la fierté de la Fronz, citoyens, vous avez risque votre vie pour arracher ce trésor à son propriétaire légitime, et pour cela, vous allez être récompensés. Sig, levez-vous. Je vois en vous l'absence de scrupules et une envie sanguinaire de tuer, j'aimerais que vous soyez mon Ministre de l'Immigration.
— Merci, Seigneur.
— Elena, levez-vous...
— Seigneur, j'aimerais attirer votre attention sur les citoyens qui souffrent en ce moment, et leurs abris de fortune sont affreusement polluants, et ils ne mangent ni gras ni sucré ni salé car ils ne mangent pas et...
— Je vois que vous êtes très engagée, je pense que vous feriez une excellente Ministre des Affaires Sociales. Ensemble, nous moraliserons la magie noire et nous ferons un Grenelle du druidisme. Ça vous va ?
— Merci seigneur.
— Quand à vous, Lecteur, pourquoi avoir ramené un prisonnier troll ?
— Ce n'est pas un prisonnier, c'est un membre à part entière de notre communauté.
— Comment ça, un troll qui vole le travail des honnêtes humains ? Qu'on me le jette au cachot !
— Mais...
— Et vous, vous n'avez pas honte d'encourager cela ? Vous voulez que nos enfants mangent des cailloux et que nos femmes se recouvrent tout le corps avec du lichen ?
— Mais...
— En plus je parie que tu penses qu'il faut plus de médecins et de professeurs hein ? Casse toi de mon château, pauvre con !

Épilogue

Où le Lecteur se retrouve dans l'impasse.


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Ô Lecteur, tel un saint homme tu as renoncé à la richesse et à la gloire, et tu t'es retiré loin des lumières de la ville. Tu es et tu seras à jamais une légende !


Le soleil est déjà haut dans le ciel : Ma dague magique grésille dans un coin de la ruine me servant de maison en déblatérant d'anciennes malédictions. J'émerge lentement, difficilement au beau milieu de fioles de potion et de carcasses de bêtes sauvages. Chaque mouvement pour sortir de ta couche est atroce, entre ma gueule de bois et les horribles craquements des planches sous mon poids. Au pied du lit, une bouteille d'hydromel s'est écoulée sur une vieille peau de troll élimée récupérée à la mort dudit troll.

Vêtu de ma cape rouge délavée et de mes cuissardes de cuir, j'ouvre la porte de ma mansarde. Un héraut gueulant dans la rue m'apprend que le seigneur des ténèbres a encore lancé un sort de peste noire sur une ville. Un mendiant ronfle dans un tonneau. Normal, la herse de la ville a été fracassée quand les barbares ont lancé un raid pour piller les stocks de nourriture hier. Il y en a même un qui a préféré s'empaler sur une lance plutôt que de retourner dans sa tribu les mains vides. Je mets un pied dehors. Pas de bol. Il pleut. Et je viens de marcher dans une merde.

Je sens que ma journée à chercher des quêtes va être pourrie.
D'un autre coté, on peut toujours se fier à l'art pictural pour s'échapper de notre morne réalité. Seulement avec un Sopalin +12, évidemment.
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