Arctique

Premier jour

Nous avons enfin accosté !

Après des jours à potasser mon guide du routard, dans une cabine rikiki, avec des gens qui visiblement ne connaissent des douches que les photos avec des dames toutes nues dedans, enfin, je suis arrivé !

C'est exactement comme je l'imaginais...BLANC À PERTE DE VUE ! En même temps, j'en avais vu des cartes postales, punaisées au dessus de mon bureau, au 23ième étage de la Tour Montparnasse...j'en rêvais ! Chaque fois que je prenais une feuille blanche, ou que j'en accrochais une au mur !

« Je vais pouvoir les remplacer avec des vraies ! »

Seul volontaire de l'expédition, au-delà du cercle polaire, l'équipe me débarque avant d'être héliportée vers le poste de secours le plus proche, me laissant seul face à cet apaisant spectacle. De loin, ils hurlent des allusions à mon courage, comme quoi j'ai bien des attributs virils et que ma mère c'est une p...enfin, dans l'ensemble, ils m'admirent.

En fait, j'ai toujours voulu être ici. Et puis je me rend compte que j'ai toujours été fait pour cette vie au grand air ! En ayant dévoré tous les épisodes de La Nature seule face à Bear Grylls, j'ai finalement trouvé ma voie : je veux être EXPLORATEUR. Et c'est ma joie.

Mais pour le moment, comme la route a été longue et que le bateau a fait grand bruit durant mon sommeil de la nuit passée, je m'en vais monter ma tente 2 secondes™ et me reposer. Demain, ce sera la grande découverte !!

« Et mon appareil prend même de super photos panoramiques ! Je regrette juste d'avoir lancé la tente un peu fort. Puis d'avoir pas vu la crevasse, aussi. Mais j'utiliserai mon sac de couchage, tant pis. De toute manière j'ai pas froid ! »

J'ai froid. Vivement demain.

Deuxième jour

Le soleil semble bien plus pâle aujourd'hui, comme si le jour avait du mal à se lever. De toute manière il ne s'était pas vraiment couché, j'attends avec impatience la nuit qui devrait arriver demain en 8, d'après ce qu'on m'a dit.

J'ai décidé de sauter le repas de midi. D'autant que je m'aperçois que ce que je prenais pour une unique ration de survie était en fait mes repas pour une semaine. Je n'aurais pas dû essayer de préparer une tartiflette hier, je me suis aperçu à la fin que je n'avais pas de four pour la mettre, alors j'ai tout jeté.

Je vais devoir me serrer un peu la ceinture. Il faudrait que je me change les idées, que je sorte de mon sac de couchage pour voir un peu ce qui m'attend pendant les six prochains mois. Je pense que je vais y aller maintenant.

Bon, ben j'y vais.

Troisième jour

Hier j'étais trop fatigué pour écrire en rentrant, j'ai juste eu le temps d'écrire une petite pensée dans la neige. Je dois dire que ces quelques heures de marche (je me suis perdu), ont été pleines d'enseignements, mais longues. Mais comme elles étaient pleines d'enseignement, ça va. Déjà, comme tout est blanc ici, je vais essayer de me repérer avec la boussole de mon couteau suisse.

Par contre, j'ai laissé des traces dans la neige ! ! C'était grisant de savoir que j'étais le premier à le faire, et peut-être le seul pour toujours ! Mais j'ai ensuite été interrompu par des pingouins et je me suis mis à courir. C'est comme ça que je me suis perdu. Je n'ai pas eu le temps de faire d'autres découvertes, j'avais trop peur de mourir de froid loin de mon campement !

Ce qui est étrange, c'est qu'il fait déjà nuit, et pourtant à ma montre il devrait faire jour. Enfin...je vais prendre ma torche et sortir voir un peu ce qu'il se passe.

Non je vais me reposer d'abord.

Je me suis assez reposé.

Dehors c'était bien, je vais me coucher maintenant.

Quatrième jour

Décidément, le soleil ne veut plus se lever. Il est où, l'copain ? À ma montre il est 14h34 et j'ai l'impression d'avoir raté toute ma journée. Armé d'une lampe-torche je sors voir un peu ce que font les pingouins, s'ils jouent ou quelque chose. Et à ma grande surprise, ils ne sont plus là...mais je vois ceci :

« UN IMMENSE ARC-EN-CIEL ! ! (que j'ajouterai aux photos de mon mur en rentrant) »

Je décide de prendre quelques affaires et de courir voir ce qu'il y a au bout (j'aime bien courir), tant j'ai l'impression que les couleurs sortent toutes d'un seul point, tout là-bas à l'horizon ! Toujours bien armé de ma lampe torche et de mon couteau-suisse, je m'élance ! !

Cinquième jour

Finalement, je me suis encore perdu. C'est tout blanc, comme les feuilles de mon journal avant que j'écrive dessus d'ailleurs (tiens...), et je me suis aperçu que je savais pas utiliser une boussole, donc voilà. Et j'ai perdu mon couteau-suisse. Et ma lampe. J'en ai un peu marre.

Et quand je dis perdu, maman (c'est un peu pour toi que j'écris ce journal, et pour Timothée aussi, faudra que tu lui fasses lire quand Gallimard ou le Herald Tribune l'aura publié), c'est que c'est un animal ÉNORME qui me les a pris en otage. Un peu comme un ours en peluche, mais en 20 fois plus grand. Donc je lui ai laissé.

Et puis j'ai couru.

Pardon si j'écris de façon espacée, je suis essoufflé, c'est pour ça.

Il va falloir quand même que je me bouge pour retrouver le campement ! Je ne veux pas me faire surprendre, ici la nuit tombe soubitement

Sixième jour

Il était moins une hier, heureusement le campement il était dans mon sac à dos (que j'avais sur mon dos !). Donc je me suis arrêté, et j'ai décidé à un moment donné que je changeais de campement, et voilà.

Pour aujourd'hui, maintenant que je me suis bien familiarisé avec ma nouvelle vie, j'ai entendu dire que les pingouins savaient voler, pas comme les manchots. Je me propose de les imiter, et de frayer avec eux comme le firent avant moi Rémus et Romulus. Je serais alors peut-être une légende, qui sait, comme Will Smith dans Danse avec les loups.

J'ai conscience que même avec mon déguisement (que j'avais emmené pour une autre occasion, une soirée ou quelque chose), je vais avoir du mal à les apprivoiser.

Mais en même temps, j'ai rien d'autre à faire.

Finalement ils étaient très cools, ces pingouins, je me faisais des idées. Je vais rester dormir avec eux.

Septième jour

Je crois que les pingouins sont devenus mes amis. Ils m'ont réveillé toute la nuit, je pensais que c'était parce que je ronflais. Mais ce matin en me réveillant je trouve plein de choses. Un espèce de truc qui sent mauvais (mais qui est pas si mauvais en fait), des morceaux de coquilles, etc. Ils ne doivent pas avoir grand chose à partager, mais je pense que l'intention était là. Ça me rend très heureux (j'aime bien être heureux) !

Je vais leur donner des miettes en espérant qu'ils m'apporteront un peu de poisson qu'ils auront pêché. Je crois qu'ils y vont, d'ailleurs.

Timothée Deux. Enfin, je crois.

En attendant j'ai de quoi m'occuper ! Je vais commencer par ranger un peu NOTRE campement. Va falloir que je me fasse à l'idée que je suis plus tout seul, tout ça c'est fini. Personnellement je me ménage un coin vers celui que j'ai appelé Timothée Deux, je l'aime bien. J'espère que ça ne dérangera pas les autres.

J'ai bien rangé ! Bon, ils ne sont toujours pas rentrés. Puis, bon, il fait toujours nuit. Mais bon, au moins ça fait de l'action, on peut pas dire qu'il se passe rien ici !

Je vais attendre un peu.

Je m'endors, je vais m’asseoir là, tiens.

Il fait un peu froid quand même, j'aurais pas dû prêter mon sac de couchage à Timothée et à ses amis.