Gustav Schäfer ou l'anomalie Tokio Hotel
Je ne suis pas à proprement parler un grand fan de Tokio Hotel. À salement parler non plus d'ailleurs. En réalité, depuis la réédition en CD 12 titres des plus grands tubes du IIIe Reich, je ne me souviens pas avoir acquis d'albums contenant des chansons écrites dans la langue de Karl-Heinz Rummenigge. Pour autant, le phénomène Tokio Hotel m'intéresse. Certes, pas au point d'abandonner mes recherches sur la prolongation d'au moins 3 jours de la date de péremption des oignons en poudre surgelés, mais quand même un peu. En réalité, c'est un aspect précis de l'histoire de Tokio Hotel qui m'attire. En consultant les nombreux documents relatifs à cet ensemble musical germanique, m'est apparue une singularité assez particulière : un des membres semble en total disharmonie par rapport aux trois autres, en l'occurrence le batteur.
Est-ce pour cela qu'on l'appelle Gustav Schäfer ? Difficile d'en être certain. Mais le fait est que j'ai voulu en savoir davantage. Et après 13 ans d'enquête acharnée, des milliers de kilomètres parcourus, des centaines d'interviews avec des proches mais aussi avec des gens qui n'en ont jamais entendu parler, je puis enfin vous révéler la vérité sûr... Gustav Schäfer ou Le Garçon Qui Se Demande Ce Qu'Il Fout Là !
Le pourquoi de cette enquête
Je l'évoquais déjà au début de cette enquête mais pour ceux qui ont sauté des pages, je vais le rappeler : c'est à force de voir des photos du groupe que je me suis interrogé sur la disparité physique entre Gustav Schäfer et les autres membres de Tokio Hotel, disparité qui à coup sûr devait cacher quelque chose de plus important. Voyez par exemple le document ci-dessous.
Ah, vous êtes allé trop loin, il s'agit désormais du document ci-dessus. Franchement, lequel accepteriez-vous de voir épouser votre fille ou votre fils ? Le pseudo clone de Cliff Burton tentant vainement d'imiter l'impeccable mèche de Philippe Douste-Blazy pour cacher l'improbable poussée d'acné qui tend à nous faire confondre sa joue droite avec une nouvelle face sélénite (1) ? La tapette estampillée Manga maquillée comme une voiture volée et n'ayant pas encore passé le cap de le différenciation chromosomique qui doit pourtant intervenir dès le 2ème mois de grossesse (2) ? Son frère jumelle qui depuis qu'il s'est greffé un paillasson sur la tête est obligé de porter en permanence une casquette prévue au départ pour Elephant Man et rachetée à vil prix chez un brocanteur mal intentionné (3) ?
Non, le seul qui surnage dans cet océan de mauvais goût physico-vestimentaire, c'est bel et bien Gustav Schäfer. Son visage pur, son regard à la fois malicieux et terrorisé, ses cheveux blonds impeccablement mis en bataille, sa bouche exquise qui ne semble attendre qu'un baiser salvateur qui, tel La Belle au Bois Dormant, viendra le sortir de sa torpeur mais il est possible que je m'éloigne légèrement de mon sujet d'origine.
En tout cas la preuve est fait, Gustav Schäfer n'a rien à voir avec les autres membres de Tokio Hotel. Mais alors qu'y fait-il ? Pour le savoir, il faudra lire la suite mais d'abord je vais goûter, j'ai faim.
And then they were three Genesis - Livre VI, in. La Bible, ed. L'épicier
Au départ le producteur qui a eu l'idée de la création de Tokio Hotel, le désormais célèbre Erwin Göring, avait dans la tête l'idée d'un trio dont le nom était Tok Hot. La place de batteur était occupée par une boîte à rythme à l'image de ce qui se faisait dans la mouvance électro-pop très en vogue au milieu de la première décennie du XXIe siècle. Hélas, confortant la malédiction qui semble s'abattre sur les dépositaires du tempo dans les formations musicales populaires (cf. Keith Moon, John Bonham ou Ringo Starr), la XRS-342N de Boss périt étouffée dans son vomi à la sortie d'une soirée trop riche en substances illicites diverses.
Tout aurait pu s'arrêter là mais c'était sans compter sur l'abnégation d'Erwin Göring. Il parcourut l'Allemagne en long en large et en travers à la recherche d'un batteur, avec des critères très stricts : il devait être issu de bonne famille, être vierge, blond, aux yeux bleus, ne pas fumer, ne pas boire et ne contenir aucun composant électronique défectueux. Et finalement le 26 avril 2005, alors qu'il allait s'avouer vaincu, il croise dans une rue coquette de Magdebourg (ex-RDA) Heinrich Tordsmüller. Ce dernier ne répond à aucun des critères ci-dessus (à part peut-être pour ce qui est des composants électroniques défectueux) mais il se souvient de son voisin à qui les parents ont acheté à Noël dernier une batterie pour le féliciter de ses excellents résultats scolaires.
"Aurais-je trouvé la perle rare ?", se demande alors Erwin. Accompagné d'Heinrich, il se précipite chez les voisins de ce dernier et sonne anxieusement à la porte, et pourtant il n'est pas aisé de sonner de façon nuancée à une porte, d'autant qu'en général on frappe plutôt à une porte et on sonne à la sonnette mais ça faisait trop de répétitions et je ne connais pas de synonyme au mot "sonnette". Et là, miracle, la mère de famille ouvre la sonnette et lui confirme qu'il y a bien un adolescent ici qui joue de la batterie et que d'ailleurs s'il pouvait l'en débarrasser ce serait cool parce qu'en fait c'était vraiment une idée de cadeau de Noël foireuse. Et c'est ainsi qu'Erwin Göring rencontra pour la première fois Gustav Schäfer. J'aurais pu dire "cloche" comme synonyme à sonnette maintenant que j'y pense. Tant pis.
La rencontre et les débuts
Dès la semaine suivante, le producteur organise la première rencontre entre les trois membres du quatuor et Gustav. C'est tout de suite le coup de foudre. En tout cas pour Bill Kaulitz qui caresse langoureusement la cuisse droite du nouveau venu pendant tout l'entretien jusqu'à ce que ce dernier, de guerre lasse, lui fasse bouffer son slip. A force de pourparlers, de négociations et d'ingestion de GHB, Erwin Göring parvient tout de même à faire signer un contrat d'engagement à Gustav qui le lie au groupe pour 16 albums. Pour éviter la confusion, il décide également de le rebaptiser Tokio Hotel, en hommage à la célèbre chanson "Sweet Home Alabama" de Lynyrd Skynyrd.
Gustav Schäfer se réveille deux jours plus tard au milieu d'un studio d'enregistrement situé au cœur de Shanghai, lieu choisi pour raisons économiques. Ainsi nait dans la confusion le premier album du groupe sobrement intitulé "Arbeit zur Differenz der Demokritischen und Epikureischen Naturphilosophie" qu'on peut traduire en français par "Désolé j'ai fait espagnol en seconde langue". Peu impliqué, Gustav ne participe à l'écriture d'aucun titre, joue le plus souvent à contre-temps - quand il joue - et utilise davantage ses baguettes au restaurant d'à côté que sur ses cymbales ou ses futs. Malgré tout ce premier opus est un véritable triomphe outre-Rhin et il atteint rapidement la 1ère place de tous les classements teutons.
La confirmation
Malgré ce succès, Gustav s'emmerde. Les filles en furie qui hurlent son nom dès qu'il sort son berger français baptisé Lucien, ça le perturbe plus que ça l'excite. Les garçons en furie qui hurlent le nom de Bill chaque fois que ce dernier sort son hamster baptisé Pikachu, ça l'amuse un temps mais il s'en lasse également. Le groupe s'apprête à enregistrer son deuxième album et Gustav Schäfer tombe dans la neurasthénie. Il reste des heures, prostré sur son tabouret, à taper frénétiquement de rage sur sa caisse claire mais comme pour une fois il le fait en rythme, l'ingénieur du son en profite pour tout enregistrer et demande aux frères Kaulitz et au bassiste Georg Listing (c'est son vrai nom, hahaha) de chanter et jouer selon la mesure de Gustav.
Cela donne au final un second album beaucoup plus énergique dans lequel les critiques croient déceler la rébellion d'une jeunesse perturbée face à une société qui ne les comprend pas alors qu'en fait c'est juste que le batteur voulait revoir sa maman. Baptisé "Art von trockner Moral: an einen geistreichen Vortrag ward nicht gedacht, und die Lehre konnte weder der Seele noch dem Herzen zusagen" ce qui signifie en français "Puisque je vous dis que je ne parle un seul mot d'allemand, bordel !", il connaîtra le même succès que le précédent et assoira Tokio Hotel au trône du Panthéon du summum du fin du fin du Hall of Fame du Rock'n'Roll.
La déprime
Pour Gustav, ce succès est une véritable catastrophe. Il espérait que la critique et les fans reconnaîtraient l'indigence musicale du groupe, mais c'est tout le contraire qui se passe. Tokio Hotel est adulé par l'Europe entière et sa renommée parvient même à traverser l'Atlantique en solitaire et sans escale. Gustav n'a donc plus d'alternative : pour mettre un terme à cette gabegie, il va devoir tout saboter.
Alors que comme tout membre d'un groupe de rock qui se respecte les frères Kaulitz et le bassiste Georg Listing (hahaha encore) arrivent sur scène totalement bourrés et entourés d'un halo de fumée marijuanesque, Gustav ne boit pas une goutte d'alcool, ne fume pas et pousse la rébellion jusqu'à ne pas se faire d'intraveineuse d'héroïne, malgré l'insistance de son manager, de ses parents et de sa petite sœur Gündrun. Étonnamment, cela n'a pas d'influence sur la qualité musicale du groupe en concert. Totalement couverte par les cris des fans hystériques, la "musique" devient inaudible et personne ne remarque que Gustav a remplacé ses baguettes habituelles par des pâtes trop cuites. Pire, la presse parlera désormais du "Tokio Hotel Sound" en soulignant l'apport novateur de Gustav Schäfer sur le plan de la rythmique comme on peut le lire dans cet extrait tiré du magazine Les Inrockuptibles :
Lorsqu'en fin 2007 Tokio Hotel reçoit 8 Grammy Awards, 5 NRJ Awards, 3 Oscars et le Prix Goncourt, Gustav Schäfer tombe dans la déprime. À l'heure même où Bill Kaulitz est en train de détruire sa chambre d'hôtel quotidienne, il parvient grâce à un "ami" à la réputation douteuse à passer son bac (avec mention) et à s'inscrire dans une école préparatoire d'ingénieur des Ponts et Chaussées. Malheureusement pour lui, sa famille découvre la vérité et, horrifiée, le place de force dans un centre de réhabilitation où on tente de le remettre dans le droit chemin.
Pour Gustav, c'est un véritable enfer. En totale révolte contre ceux qu'il appelle ses "geôliers", il subit réprimande sur réprimande et est même placé une semaine au trou pour avoir tenté d'introduire dans le Centre des ouvrages scientifiques et philosophiques. Dans le trou en question, il est totalement isolé et doit écouter sans discontinuer les intégrales de Metallica, AC/DC, Nirvana et autres fameux prédécesseurs de Tokio Hotel. Mais au bout de six mois de thérapie intense à base d'Extasy, de LSD, de vodka et de Pall Mall sans filtre, ses proches semblent rassurés. Gustav s'est en effet laissé pousser les cheveux de 6 centimètres et, à la fin d'une séance d'hypnose particulièrement éprouvante, il réclame du rouge à lèvres et du noir pour les yeux. On le croit donc guéri et prêt à reprendre sa place dans le groupe.
La fin
En réalité, grâce à sa force de caractère et à sa volonté, Gustav est parvenu à tromper ses médecins. Il réintègre le groupe comme si de rien était et pousse le simulacre jusqu'à arborer des t-shirts noirs à tête de mort. Il se fait même tatouer un idéogramme chinois sur le bras gauche.
Début 2010, Erwin Göring ordonne au groupe d'enregistrer leur troisième album. C'est le moment qu'espérait enfin Gustav. Lors de la première session d'enregistrement, il grimpe sur sa grosse caisse. Il se casse aussitôt la figure parce que ce n'est pas facile de tenir debout sur un volumineux tambour posé sur le flanc, remonte et avoue la vérité aux autres membres :
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Et comme le disait souvent Beethoven: « Qu'est-ce que vous dites ? » |
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