Jean-Henri Fabre

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« Jean-Henri Fabre était cet enculeur de mouches avec un chapeau à larges bords. »

Jean-Henri Casimir Fabre était un gnostique, alchimiste de la transmutation du noir en or, né trop tôt et mort trop tard pour les évolutionnistes, et au juste moment pour les créationnistes.

Biographie

Débuts sur Terre

Très tôt, Fabre doit naître, et très vite. Il sait que s'il ne voit pas le jour au jour de sa naissance, les portes de l'espace-temps à jamais lui seront hermétiques.

Malheureusement, une correspondance ratée lui vaut d'être à quai, puis, détraqué, de voir le jour le jour de sa mort. Pour lui, ce n'est évidemment pas un coup de chance[1] mais l'expression d'une intelligence immanente[2], même si sur le coup la naissance au cœur d'une explosion nucléaire aurait eu meilleur effet hagiographique.

À zéro an, il a déjà l'âge que n'auront jamais ces distingués Romains, lesquels Romains ─ dont il est un admirateur inné ─ ne connaissaient pas le zéro. Mais outre les Romains, les hautes figures contemporaines, qui avec lui partagent la jouissance du zéro, l'inspirent, parmi lesquelles Jules R0m1, R0m1 "101" R0lland, R0m1 Gary ou encore R0m1 R0ma1n[3].

Mais le bon goût pour la romanitude ne le dépare pas d'états schizoïdes graves. Un jour râlant et braillant, l'autre jour tétant tendrement au sein de sa mère, il offre le portrait dual du paysan provençal. Plus tard, il déclarera fameusement que le laitage maternel devait receler des principes sédatifs qui subjuguaient directement « une certaine partie de son être, son émotionnalité hypothalamique par effection de la structure glandulaire positivement étonnamment lymphatique du corps humain »[4].

Apprentissage de la vie

Mère cafetière dans un style typiquement aix-en-provençal

Né à dans le Rouergue d'un père cafetier et d'une mère cafetière, Fabre doit concilier les études et le gagne-pain. Entre les leçons de grec et d'arpentage pratique, qu'il abhorre à cause des chaînes arpenteuses gluantes à souhait qu'il doit manier dans ses menottes délicates et comme tirées des plaines sablonneuses des Angles, il entrepose et revend des mottes scatologiques cueillies dans des cornets de papier, au plus offrant des exploitants de verveines et de narcisses. Pour rendre son produit attractif, il purifie lui-même les pelotes stercoraires des larves coprophages, dépouilles d'œufs et végétations cryptogamiques[5], et les soustrait du soleil pour éviter la dessication qui appauvrirait le riche terreau de son suc nutritif.

Pourtant, en grattant la croûte superficielle de ses pelotes sculptées en forme de poire afin de pouvoir en purger l'intérieur, il constate la présence d'une forme de vie larvaire qui immédiatement lui présente son pore anal et éjacule un mastic qui, après un bon coup de truelle du derrière, comble la brèche. Multipliant sur tous les côtés les orifices, il constate le renouvellement des mêmes plâtrages. Malgré la cécité apparente[6], le ver sait donc repérer les conduits et les calfeutrer avec un enduit issu de sa panse. Dans sa série entomologique sur le scarabée sacré, Fabre décrit l'animalcule comme une gangue de poches adipeuses semi-transparentes aglutinées autour d'une gibbosité médiane signe d'une panse exubérante, où transparaît la coloration ambrée du transit continu de mélasse fécale.

Pour contrecarrer le petit ver revêche, le jeune sérignanais humidifie les entrailles de la poire avec une autre poire, mais la poire à lavement auriculaire cette fois. La pâte ramollie n'englue guère plus, et le ver finit par soit péricliter, soit exploser.

Pendant les arpentages, le futur maître de Sérignan dispute aux bousiers adultes leurs pilules stercoraires dans une préfiguration de la théorie du struggle for life[7] : scarabées sacrés, géotrupes, copris espagnols, et autres onthophages oniticelliques, tour à tour sont envoyés valdinguer ailleurs pour voir s'il y était[8]. Dans sa correspondance avec un écolier prometteur d'Angleterre nommé Charles Darwin dans le cadre d'un programme d'échange linguistique, il débat de la valeur de ses travaux en vouvoyant son illustre aîné[9] :

Salut l'illustre aîné,


Mon entreprise prospère. C'est pas mal, tu me diras. Ouais, déjà mieux que correspondre avec toi le couteau sous la gorge, je te dirais. Ah si, détail truculent, ben figure-toi que quelques scarabées et larves attardées pourrissent mon artisanat à coups de truelles. Je dirais presque qu'ils tiennent en affection leurs nids de merde.
C'est le struggle for life. Cela signifie qu'au terme de vos confrontations, on saura qui du scarabée ou de l'homme aura le dernier mot (à l'évidence, si c'est le scarabée, seul Dieu le saura). La survie de l'espèce humaine est entre vos mains.
Mais vous n'êtes pas mon père.

Le papier à lettres anglais fit de fort jolis cornets de papier pour les futures récoltes de pain crémeux. Pour Fabre, il n'y avait ni sélection naturelle ni biotope auto-ajusté. C'est juste qu'il allait en vendre plus aux cultivateurs de verveines que ces foutus scarabées, et ce à leurs dépens.

À propos du papier que vous m'avez envoyé, il est d'excellente qualité. Si vous pouviez m'en envoyer toute une corbeille... Sinon ben j'ai déjà une corbeille chez moi.

Fabre l'entomologue

C'est au cours d'un arpentage qu'il se fait surprendre la main à la pâte par le professeur Étienne Rabaud.

— M. Fabre, que fabriquez-vous avec cette boulette fécale polie comme du stuc ?
— Je...
— Je... ?
— J... J'étudie le scarabée M'sieur !
— Vous étudiez le scarabée !
— Oui... regardez... oh une larve... et elle... euh... elle bouge ! Elle est VIVANTE !
— Elle vit !
— Oui oui !! C'est tellement plus merveilleux d'étudier les insectes vivants...
— Vivants !
— ... dans leur milieu naturel que morts macérés dans le trois-six !!
— Mais leur milieu naturel c.... c'est de la merde !
— L'amour de la Nature n'a pas d'odeur ! Ainsi enseignait Virgile, le poète de l'insecte !
— Les infectes font fientifiques M'fieur !
— Pardon Gaston ?
— Les infectes... f... f-f..ont fientifiques !
— Il dit que les insectes c'est scientifique ! Écoutez-le M'sieur !
— Les fauffettes de l'arfidufette font arfifèfes !
— Non ne l'écoutez plus !
— Les infectes... font fientifiques !
— Vous pouvez le ré-écouter M'sieur !
— Les fauffettes de l'arfidufette font arfifèfes !
— Là vous pouvez plus !

Lui, c'est Gaston Favier. Un fils d'ancien commis de guerre dispensé pour avoir disjoncté mentalement, et qui mangeait du rata de lézard ocelé broyé avec des boyaux de musaraigne. Fabre l'abhorre, mais il doit concéder que le gaillard lui sauve la vie. Pr Rabaud parti, Gaston le prend à part.

— Un tel fort un profeffeur, cet infecteur porteur en puffes : il agit enfeignant, il mourra enfeignant.
— "Intel sort un processeur, c'est un secteur porteur en puces" ?! C'est pas intelligent ce que tu dis là, Favier, ça n'a pas de bon sens. Lâche-moi.

Gaston lui garotte le bras. Il a une main d'acier. L'horreur monte dans les yeux embués de Fabre envahis par une crue laccrymale comme on en a jamais vue dans les yeux d'un bourdon.

— Arrête Favier tu me fais peur !! NON FAVIER NONNNNNNNNNNN !!!!!!
— F'est alors qu'il m'a dit... "Es-tu partant pour la greffe ?" J'ai dit oui. Je prends le train demain. Et toi ? Donne-moi ta main ?
— Hein ? Non merci, mais prends la mienne !

Fabre lui administre une volée mémorable et prend la poudre d'escampette.

Professeur d'alchimie et première altercation avec Victor Duruy

À seulement 17 ans, Fabre se voit attribuer la chaire d'alchimie du lycée d'Avignon dans la foulée d'une brillante thèse doctorale intitulée Transmutation du noir en or, qui se lit comme une semi-autobiographie en tout point agréable. Dans L'œuvre au noir, traité d'alchimie romancé au succès critique officiel, Marguerite Yourcenar encense le génie de Fabre :

Plus alchimiste qu’il ne l’avait jamais été lui-même, ses boyaux opéraient la transmutation des cadavres de bêtes ou de plantes en matière vivante, séparant sans son aide l’inutile de l’utile. Ignis inferioris Naturae : ces spirales de boue brune savamment lovées, fumant encore des cuissons qu’elles avaient subies dans leur moule, ce pot d’argile plein d’un fluide ammoniaqué et nitré était la preuve visible et puante du travail parachevé dans des officines où nous n’intervenons pas.

—Marguerite Yourcenar, L'œuvre au noir

Son nouveau poste lui confère un revenu juste un peu moindre que le « gage d'un palefrenier de bonne maison ». Avec ses nouvelles richesses, il embauche et démultiplie son activité avec le levier de la cupidité. Il lui suffit d'appâter le dénicheur de bouse sur ses propres bancs en produisant berlingots et en faisant miroiter les arrhes à qui découvrira l'œuf élusif de scarabée dans sa pilule stercoraire roulée par le bourlingueur à élytres. Le soir, devant l'air penaud de ses ouailles, Fabre remotive les troupes, passant devant les rangs et, tout en haranguant, plonge la main, mine de rien et avec une rigidité militaire, dans les gamelles les mieux garnies et transvasant la boule dans son cornet de papier. Repartait alors un nouveau cycle de déceptions.

Pendant que ses tâcherons se tuent à la tâche en tutoyant la canicule, Fabre monte un élevage de bousiers en volières et le fait prospérer. Tombé amoureux d'une de ses pensionnaires, il fonde une famille[10] et écrit une thèse sur le fumet des coléoptères.

Plongés dans le trois-six, le coléoptère perd son fumet infect. Nous ne pouvons mesurer la plénitude de sa puanteur que dans un espace propice aux grands essors des miasmes dus aux diffluences de putrilage. L'animal au naturel pue merveilleusement de manière homogène. Ses habitudes ne favorisent aucune concavité assimilable aux niches biotopiques vulgaires de l'homme. J'ai reniflé les aisselles de géotrupes par colonies entières, sans jamais tiquer de la narine à des pics d'inégalités olfactives. Au grattoir se délitent des croûtes d'une matière filandreuse aussi précieuse que le plâtre bousineux des pièces buccales. Cette homogénéité, le bousier la doit à son rapport symbiotique avec ses denrées : nidification dans ces poires de la même matière que les denrées, logis capitonnés de crépissures fécales, confection de la pilule sphérique par compassages patients des trois paires de pattes, roulement de la pilule par adossage et incrustation de soi discrète dans la face latérale de la boulette roulante du congénère pour la chaparder au moment propice, quand le propriétaire s'absente pour creuser son réfectoire.

Un jour où Fabre planche sur sa thèse à Orange, John Stuart Mill passe par là pour profiter de l'air provençal purifié grâce à l'activité efficace des fossoyeurs de crottin, et sa vie change. Les effluves de scories intestinales putrescentes qui l'assaillent lui éventent les charmes d'une botanologie complète du Vaucluse. Il en transcrira la vivacité sensorielle dans son carnet de voyages :

La fragrance des roses et lilas aux amphores lourdes d'exsudations sucrées, à l'ombre des grands platanes de cet ermitage coutumier des grands essors des Eristales aux éclats de mica, et des grands-paons aux lunules aux reflets d'iris et aux ocelles liserés de braise, sont une douceur printanière pour les sens qui sont éclipsés, rétamés par une seule bouffée de fumier de pâte onctueuse, plastique et homogène de mouton au tempérament doux et laborieux.

—John Stuart Mill, Carnet de voyages à Orange et Carpentras

Mais coup du mauvais sort, des allergies mettent sur le flanc plusieurs de ses « choéphores ». Fabre dénoncé à l'administration et mis à pied, l'inspecteur d'éducation ministériel Victor Duruy entre dans la danse. De fil de soie en aiguille de cerceris tuberculé, est tissé le lien avec les dépouilles d'œufs fraîchement éventrées et leurs larves de scarabée se tordant au fond des poches des enfants hospitalisés. Le domicile de Fabre est perquisitionné, mis à sac, son "laboratoire vivant" révélé au public scandalisé[11]. Il est jeté à la rue avec son appareillage de "savant fou" à la toque blanche néo-romaine inspirée de Pollux, le cousin du castor. Les enfants parlent : certains rapportent des scènes accablantes où il les aurait fait pondre leur offrande directement dans les volières. L'opinion monte au créneau :

Les avalanches devaient ensevelir vivantes ces pauvres bêtes suffoquées avec leurs propres enfants chéris sous l'amoncellement de... de...

—Micro-trottoir dans Métro 2 minutes[12]

Étienne Rabaud se joint au chorus de protestants :

J'aime quand les idées s'élèvent, sauf quand elles ont la forme de coléoptères aux élytres déployées qui puent en dessous !

—Étienne Rabaud

Fabre fera lire à Favier, désormais acolyte et surtout jardinier-cuisinier-homme-à-tout-faire, le discours suivant devant l'Académie :

Me croit-on fou — les yeux vitreux, l'humeur liquoreuse, Fabre du champagne fafile ! À l'Académie je lève un verre que je ne défends point ! Mon arme et mon fouhait, f'est une probité chevillée au corps, pas plus baffe que l'eau de boudin d'un plombier polonais goûtant la femme de férail. Je ne ferai pas plus le bouc-émiffaire de la calomnie que le mot "forfanterie" exifte !

—Favier, Discours de Fabre à l'Académie des Sciences

Il devient le récipient d'innombrables prix nationaux et internationaux qui symbolisent la résonance universelle de son œuvre chez ses contemporains :

  • Lauréat à l'Académie des Chiants de Maldoror
  • Prix Nobel de l'observateur inimitable au chapeau le plus vaste
  • Prix du Professeur d'Avignon qui danse en rond à l'Institut de France
  • Prix de la Pitié des Saintes Bonnes Femmes Vendangeuses
  • Prix du Cloporte emblousé de l'année de la Société Entomologique de France
  • Médaille du Meilleur ouvrage paramilitaire de jardin de l'Institut des Châteaux de France et d'Alsace-Lorraine, qui récompense l'enclos blindé anti-badaud de l'harmas, son laboratoire vivant

Comme disait Étienne Rabaud, même à la rue il a de quoi s'habiller pour l'hiver. Mais c'est le printemps, et Fabre n'y voit qu'une occasion supplémentaire de tourner en dérision la stérilité stylistique de l' « académicisme printanier ». Ainsi s'élevait le doux lyrisme de cet émérite félibre contre cette époque de l'année jadis bénie :

Je redoute le Printemps, telle l'épine au flanc d'étroits suisses !

—Jean-Henri Fabre

Relations avec les hommes les plus illustres de son temps

John Stuart Mill cependant lui octroie un subside de 3 000 francs. Le vénérable économiste anglais, traumatisé par la perte de sa femme Harriet Taylor, le prend sous son aile comme un fils.

Ta défunte mère aurait été fière de toi. Tu n'étais qu'un fœtus mijotant dans sa théière de liquide placentaire, cette soupe primitive où se sont concoctées les nappes au léon et autres léons du four.
Mais enfin, ma mère c'est une cafetière.

Darwin lui envoie un exemplaire de son nouvel ouvrage, « On the Origin of Species », juste après la perte de son fils.

Veuillez trouver ci-joint mon nouvel ouvrage : « On the Origin of Species ». Puisse-t-il agréer à votre humeur du jour et vous inspirer vous et vos travaux vers de nouvelles voies de recherche fécondes pour l'humanité. Moi, je suis quitte avec la vie dans son ensemble.
Cher illustre aîné,

Je vous remercie de votre illustré cadeau. Si vous me permettez une remarque, j'aimerais totalement, intégralement et parfaitement démolir votre traité. Ce dernier néglige un aspect fondamental de l'homme, j'ai nommé la fonction, ce qui vous incline sur la dénivellation de l'erreur et de la diffamation. À mon humble avis l'homme est plus proche des abeilles maçonnes, j'ai nommé le Chalicodome des hangars. Vous étudiez l'anatomie, le nombre d'articles des antennes (2 pour la larve primaire de Sitaris, 0 pour l'homme), la fourniture en poils sur le prothorax, ou encore la présence d'un aileron caudal. Moi je les observe vivants dans tout l'essor de leur instinct. On voit bien qu'en comparant morpho-physiologiquement l'homme à l'insecte, nous nous privons à jamais de la possibilité de les apparenter et d'en dresser l'affinité phylogénétique. Le Chalicodome des hangars construit des hangars, le Chalicodome des chalets des chalets, et je ne doute pas que le Chalicodome des aéroports construise des aéroports, sans doute pour que les autre diptères disposent d'aires de lancement et d'atterrissage, et aussi des murs en bois où ils puissent planter leurs mandibules et dormir ainsi en station horizontale. J'ai d'ailleurs relevé la présence de quelques lits d'abeille sur la flache de mes platanes.
Mon fils est mort..... je ne sais pas comment vous le dire. C'est comme si je lisais ligne par ligne le dictionnaire des souffrances les plus noires, engouffré dans un abyme innommable (...)
C'est super, maintenant avec le poids de la corbeille je peux cultiver mon corps !

Marius et Louis

Aucune biographie de Jean-Henri Fabre ne serait complète sans ses désormais célèbres amis compères handicapés : le borgne Marius Guigue, rempailleur de chaises et menuisier, et le sourd à 80 % Louis Charasse, instituteur en son état. Ces deux hommes ont la particularité unique de prononcer à leur façon le nom de leur célèbre ami : "Fobre" pour Marius (qui aurait pu s'appeler Georges), "Frioubou" à la provençale pour Louis (qui aurait pu s'appeler... ben Louis aussi).

À l'ombre des châtaigners[13], Jean-Henri Fabre leur lit sa production littéraire du jour, racontait des anecdotes à son avantage, et leur confiait ses angoisses et ses attentes pour le futur. Les conversations à trois sur le banc pourvoieront matière au traité théosophique En attendant Godot de Samuel Beckett, coïncidentellement Prix Nobel de l'Abricot alors que Jean-Henri Fabre habitait à Orange[14].

Plus qu'un mentor, Fabre est idolâtré par les siens qui ont le privilège de se faire lire les premiers jets[15] des célèbres Séries entomologiques par le grand maître lui-même. Dans le courant du XXe siècle, Louis évangélisera pour sa paroisse :

Quelle belle série entomologique que Le miel et les abeilles : Frioubou nous conta l'histoire naturelle des abeilles qui butinent les corolles du Malaury Nataf. On apprit le mode de transmission sexuel des "poux jaunes", en vérité des larves de Méloë, le "scarabée à huile" à hémorragies spontanées. On était mis dans la boucle des intrigues tournant autour de la cafétéria, apprenant notamment que cette dernière n'est pas une affection pathologique comme le choléra ou la malaria. Comme nous, Frioubou décria la coupure d'antenne par TF1 de cette œuvre aussi incomparable que le dessert l'est à l'entrée.

—Louis Charasse

En hommage à ce conteur inimitable, Marius fondera le Musée Fobre avec pour thème récurrent L'étron et le bousier par symétrie avec Le miel et les abeilles. Quant à Louis, il fut l'instigateur de l' Institut Frioubou d'écophysiologie appliquée, qui attribue une bourse d'études annuelle remportée chaque année depuis sa création en 1935 par Yves Delange. Les dérapages sur le nom de Fabre sont partiellement à blâmer pour la dispersion du capital sympathie pour le vieil homme, sans quoi le Prix Nobel de Littérature aurait bien pu lui échoir.

Le jubilé

Le jubilé de Fabre de 1910 a des relents de funérailles. Le vieillard souffre d'arthrites cervicales qui lui empêchent de remuer les palpes et les antennes. Seules quelques palpitations au niveau de l'extrêmité inférieure de l'abdomen laissent deviner la vie sous cette entêtée et bourrue immobilité sur son lit de mort. Cependant Fabre touche le firmament de sa notoriété, avec une visibilité nationale qui lui a valu la visite d'un mistral gagnant.

* DING DONG *

La bonne : Des créatures de Dieu sont sur le seuil !
Fabre : Cré vin diou ! Remettez-moi tout de suite le cornet de papier !
La bonne : Pour faire quoi avec ?
Fabre : Merde je sais plus.
Les Témoins de Jéhovah : Nous sommes venus voir celui qui a gagné le prix du Cloporte-à-porte de la Société des trucs-sur-pattes de France.
Fabre : Puis-je recevoir l'extrême onction de vous ?
Les Témoins de Jéhovah : Non ça c'est le rôle du Curé de Jéhovah.
Fabre : Alors qu'il vienne ! Et advienne qui pourra.

Le curé arrive et tout et tout.

Le curé : Salut je suis le curé !
Toto : Tu as caché où tes crottes de nez ?

Oups... Cessons les vaines putasseries, et répondons sans plus tarder à la question suivante : À quoi correspond le mistral gagnant qui honora Fabre de sa présence ?

  1. Frédéric Mistral, gagnant du Prix Nobel de Littérature
  2. La chanson de Renaud
  3. Une ancienne marque de poudre en sachets aspirée par une paille en réglisse
  4. Un vent violent dirigé vers le Sud, en particulier dans une rue particulièrement venteuse en Provence

Envoyez votre bulletin-réponse à :

Désencyclopédie - Concours Jean-Henri Fabre 7-10 rue du Mistral Gagnant 45898 Provence CEDEX

Allez, le dialogue authentique, c'est celui-ci :

Fabre : Je ne veux pas mourir ! Si Jean-Henri Fabre disparaît, il laissera derrière moi quelque chose d'encore pire ! Une entité terrible de pureté et de gloutonnerie !
Tous : Qui ? Bon sang, qui ??
Fabre : J'ai même peur de nommer ça !
Tous : Dis-le !
Fabre : Casimir !
Tous : Ca... ca... zi... zi...[16] mir !!!
Paco rabanne.jpgPaco Rabanne dit :
Attention à la station Casimir ! Je vous aurai prévenu les ignares !

Gaston Favier est là aussi. Le fidèle jardinier spécialiste du rata verbal, a été guéri de son psittacisme, vice d'élocution consistant à remplacer tous les s par des f[17].

Favier : Tu te rappelles de moi ? "Les insectes sont scientissiques !" et j'ai toujours dit que tu avais tout le temps raison, sur toute la ligne ! Mais nous, nous, on a la pensée qui flambe à l'indépendance, hein !
Fabre : Oui je me souviens. Tu voulais dire que les professeurs, ils agissent enseignants, ils meurent enseignants, c'est-à-dire que rien ne change, que tout est immuable, que nous sommes condamnés à notre contingence mortelle substrat de notre liberté. J'ai compris. J'y retrouve une de ces leçons de vie si particulières qui n'émergent pas au niveau conscient, et néanmoins nous guident constamment dans nos démarches heuristiques.
Favier : Non, je voulais dire qu'ils agissent en feignant, et meurent en saignant. Ils feignent de ne pas comprendre, mais en fait ils ont tout compris, tu vois ce que je veux dire ? Y compris le secret de l'origine de la vie sur Terre et l'esclavage prochain de l'humanité pendue aux mamelles des extraterrestres.
Fabre : Oh vas-y dégage. T'étais là pour m'irriter et pomper dans mes ressources vitales ? Eh bien c'est une franche réussite ! Ça y est, ciel !, on m'a coûté encore 20 minutes ! Edmond[18] ! tu peux le congédier à coups de savate dans le derrière ? Allez magne ton cul, j'ai plus 10 ans à vivre !

Pendant que Favier se fait botter l'arrière-train, les souvenirs submergent Fabre et le font pleurer.

Début de la séquence flashback
— Arrête Favier tu me fais peur !! NON FAVIER NONNNNNNNNNNN !!!!!!
— F'est alors qu'il m'a dit... "Es-tu partant pour la greffe ?" J'ai dit oui. Je prends le train demain. Et toi ? Donne-moi ta main ?
Fin de la séquence flashback

Fabre essuie une sueur froide. Favier ne parlait pas de tournée Club Med en Grèce. Il le tenait au bras avec une main d'acier au moins aussi lourde qu'une plaque d'égoût. Fabre l'avait échappé belle. S'il avait répondu oui, il ne pourrait pas pleurer dans ses mains à l'heure qu'il est. Le voilà qui s'écroule de plus belle.

L'assistance : Regardez, il pleure, le saint homme. Derrière la façade de cruauté se planque une âme limpide de de miséricorde.

Entrent Marius et Louis. Eux aussi sont guéris de leurs vices respectifs.

Marius : Ne t'en fais pas pour la postérité. Je tiens le musée Fobre à bout de bras.
Fabre : Le musée quoi ?
Marius : Le musée Fobre.
Fabre : Hein c'est quoi cette connerie ? Et l'institut Fabre ?
Louis : Frioubou.
Fabre : L'institut Frioubou ?!
Marius : Ben à l'époque je n'avais que 20% de mes capac...
Fabre : Qui c'est qui m'a flanqué ces deux imbéciles ?
Marius : C'est Dieu.
Fabre : Vous me coûtez chacun 20 minutes de ma vie ! Edmond !!! EDMOND !!!
Edmond Rostand avait une sacré botte.

Finalement, Fabre meurt 20 + 20 + 20 minutes, soit 1 heure avant la date de sa mort. La partie controversée de Fabre que le cholostrum maternel atténuait rejoint les nuages, laissant seule la partie tendre à la recherche des mamelles de la Vérité avec un grand V[19].

Louis Charasse lit peu de temps après l'oraison funèbre.

Jean-Henri Fabre ne reculait jamais devant rien. Il s'injecta du gloubi-boulga en intra-veineuse, pour tester l'effet neuroleptique de la fraise des bois. Au nom du progrès scientifique, il s'exposa toute la journée, assis à plat ventre dans l'étuve au pied d'un talus à pic, aux émissions de l' l'Île aux enfants à la nocivité que seuls les instruments les plus modernes peuvent aujourd'hui mesurer. Définitivement, nous pouvons, je crois, affirmer avec sûreté que le ci-gisant, notre ami et bien plus encore, dernier représentant d'une espèce que nous regretterons à jamais, a excédé, si on met en balance l'ensemble de son illustre carrière à l'aube de l'éthobiologie, les capacités d'un palefrenier de bonne maison. Nous sommes tous d'accord sur ce point, je crois ? <applaudissements polis de l'attendance> Pardon j'entends pas ?... <applaudissements encore plus nourris de l'attendance> Amen...enez le crooner !

—Louis Charasse, Discours d'enterrement

Fabre et les arts

Avec son faciès de champignon, Fabre était l'« observateur inimitable » de Darwin.

Fabre excellait dans les arts. Non seulement il peignait magnifiquement bien les champignons à l'aquarelle, mais il ressemblait lui-même à un champignon. Ses auto-portraits sont, fait unique dans l'Histoire de l'Art, des natures mortes. Son grand ami John Stuart Mill ressemblait lui au groupe de champignons Stuartella : blanc laiteux avec des petits points noirs.

En plus des prix académiques, Fabre remporta au moins 2 concours d'art aux foires d'Avignon :

Concours remporté Adversaire Notes
Concours d'accordéon Marius Marius se perdit dans la forêt et ne put se présenter au concours.
Concours de speed-painting Louis Concours sponsorisé par l'encyclopédie des peintres savants[20].

Le concours de speed-painting couronnait qui se dépatouillerait le premier pour barbouiller de noir anthracite un réplica grandeur nature du scandale pictural de l'époque, la toile du Déjeuner sur l'herbe d'Édouard Manet. Fabre, adepte de l'aquarelle parce qu'elle cadrait si bien avec son style nerveux et impulsif, s'en sortit extrêmement bien, surtout que son confrère Louis n'entendit pas le coup de pistolet de départ.

Contributions à l'entomologie

Hypermétamorphose

Dans ses notes publiées à titre posthume, Fabre observe le premier la chronologie de l' hypermétamorphose, dont il tiendra une chronique quotidienne :

Chronofabre.png

Parasitisme

Yves Delange a le premier souligné les mérites des travaux des précurseurs de l'étho-phénoménologie, Fabre et Lubre, en ceci qu'ils mettent en exergue l'essence de l'éco-système dans ses processus méta-stables. Dans la vision fabrique, complémentaire et non exclusive de la vision lubrique, le parasitisme s'analyse comme le cycle d'évolution d'espèces en rapport avec leur environnement. Le premier exemple qui vient à l'esprit est le Méloë.

De la famille des Méloïdes, la larve primaire du Méloë se camoufle dans les calathides des fleurs de camomille. Elle se fixe sur la toison du premier butineur venu, qu'il soit glabre ou velu. Étant donnée la saison d'éclosion des larves et la primogéniture des mâles chez les abeilles, les premiers parasités sont mâles. La larve se caractérise dans le tableau clinique par sa fixation anale grâce à une goutte de glue sécrétée par l'anus qui se fixe, par le cordon de sécurité gluant, à la base des poils. Des mâles, la larve transite vers les femelles lors des joutes accouplantes.

Je me suis livré à une expérience : je prends le sexe du mâle et je le frotte sur celui de la femelle en manière d'accouplement. Pour ce faire, j'ai dû amputer l'un de son thorax, car il ne cessait de s'escrimer et de me piquer douloureusement les doigts que je ne gantais pas pour en préserver toute l'agilité. Je n'aurais pu souhaiter meilleure adéquation entre résultat et attente : les poux jaunes se sont transférés d'un pelage à l'autre.

Covoituré par la femelle, l'animalcule vermiculaire se fait déposer directement dans la cellule de nidification où d'abord l'œuf de la mère, esquif providentiel à fleur de miel, constitue sa première provision de bouche depuis des mois de jeûne, puis la pâtée de miel sa seconde. La mère clôt la cellule sur la couvée avec son parasite. La larve seule ne pourrait forcer avec ses propres moyens la chambre ainsi scellée.

Je prends le sexe de la femelle et je le frotte sur l'œuf. Je constate alors que la larve échoue sur ce radeau de fortune, aux aguets avant la prochaine métamorphose.

Après consommation de l'œuf, la larve délaisse sa fixation anale au profit d'une nymphose par laquelle la surlarve (Das Überwurm) émerge sur le miel de la connaissance. La nymphe hérite d'un assortiment unique de poils, cirrhes, cils raides et autres râpes cuirassières, le tout surmonté d'un masque céphalique corné lesté d'un diadème tricorne propre à forer une galerie de sortie dans l'épaisseur de ciment qui le sépare de la liberté. Fabre rapporte du terrain de l'expérience concrète la supériorité de la nymphe sur les organisations antérieures :

Dans une de mes cellules en verrière, j'ai pu observer à l'œuvre une nymphe précoce ayant accompli sa transformation dès le début de mai. Entre elle et l'extrêmité faite d'un bouchon de moelle de sorgho se trouvait une larve rachitique en stagnation au stade d'évolution inférieur, n'ayant pu s'épanouir faute de vivres pour deux. C'est simple, la nymphe ne fit signe d'aucun état d'âme en dilacérant son cadet de violents coups de boutoir par poussées appuyées sur son peigne anal de cirrhes cornés. Je crois bien que l'autre larve ne savait pas trop ce qui lui arrivait, la pauvre.

—Jean-Henri Fabre, Séries entomologiques

Hypermétamorphose spontanée

Jean Rostand l'avait déjà remarqué, Fabre est le premier à mettre en évidence l'hypermétamorphose spontanée, la pièce manquante de la théorie de génération spontanée.

Dans ses notes, on peut lire que la larve de Sitaris a la capacité de se transcender morphologiquement pour répondre totalement à la situation.

Avec une brosse à poils j'ai essayé de chatouiller mon glabre pensionnaire, un supplice bien connu des chinois. De ses puissantes mandibules il se pendit à un poil et l'embrassa de ses pattes vestigiaires. La stabilisation fut obtenue avec le cordon de glue sécrétée par son pore anal. Je dus dépouiller la brosse avec des pinces. Ensuite, ma tentative pour la noyer dans le miel noirâtre d'une cellule de l'Osmie tricorne échoua : la larve se métamorphosa en un flotteur à forte gibbosité ventrale qui l'empêchait complètement de chavirer et d'embourber les stigmates dorsaux arrangés en deux cordons trachéens parallèles. Le miel finit par disparaître, entièrement consommé en toute quiétude. Enfin, dernière épreuve, je la livrai aux mandibules acérées de fourmis rousses, mais des ailes lui poussèrent sur le dos et elle prit son essor auguste, délaissant la prose des pédestres mortels. Seul l'essor d'un tape-mouche de derrière les fagots fut plus auguste.

—Jean-Henri Fabre, Séries entomologiques

Rôle des poils

Déjà à l'accouchement, le petit Fabre était pourvu d'un assortiment unique de poils, cirrhes, cils raides et autres râpes cuirassières qui soutinrent son émergence vers la vie en atmosphère. Sa fourniture en ronces capillaires explique pourquoi malgré le puissant mistral provençal il ne se départira jamais de son chapeau aux larges bords. Adaptation parfaite à l'environnement : telle s'articule la doctrine entomologique de Fabre.

Adaptation parfaite à l'instrument aussi : avec son premier rasoir offert par son père, le jeune Fabre mit en exergue le substrat fonctionnel du poil loin de se ramener à un simple reliquat de la lutte adaptative des espèces. Sa démarche au point, condensé d'un trait de génie, fut d'appliquer le rasoir sur les « longs poils qui dépassent ». Il constate :

(...) que la locomotion en devenait beaucoup plus laborieuse sur le sol plan. Sur un échantillon de cinq cent Hyménoptères dont j'ampute les ailes et fais lécher le segment terminal par la flamme d'un briquet, les deux cent cinquante dont je rase les poils rejoignent en moyenne trois fois moins vite la ligne d'arrivée que les deux cent cinquante tout poilus. Les poils longs sont donc un paramètre actif de locomotion qui revitalise notre conception statique et passéiste de la limaille de poil soumise aux champs électro-statiques de James Clerk Maxwell.

—Jean-Henri Fabre, Séries entomologiques

Élevage en volière

Les volières de l'Harmas avec ses résidents bousiformes, étaient le théâtre du miracle permanent de la Création, enchantant quotidiennement le gourou des insectes qui ne cessait de s'émerveiller de ces « provisions de bouche rien d'autre que des sorties du cul. » Et ce qui devait arriver arriva : il tomba amoureux d'une de ses pensionnaires :

Tout chez elle me parlait... Ses crottes de nez en merde, c'était de la merde, de la vraie. Et ses crottes d'yeux en merde, aussi. Et je dis pas pour la merde d'anus, le caca vrai, "La merde d'anus, j'en meurs d'envie !", etc.

Avec sa compagne, il a un fils, Jules Fabre, qu'il élève dans la meilleure bouse ovine possible avec tout l'enthousiasme souhaitable d'un père collateur — même s'il voulait une fille et essaya d'influer sur la détermination sexuelle en coupant les antennes de la mère. En dépit de l'équilibre familial qui s'instaura, la science avait son autel, ses liturgies et ses cultes esotériques. Fabre se dévoua donc corps et âme au sacrifice de son Jules chéri sur l'autel de la science expérimentale.

L'expérience porta sur la compatibilité croisée entre :

Autrement dit : un coléoptère mâle peut-il à la fois souffrir de venin inoculé et retrouver son terrier, lâché dans la confusion à plus de 10 km du berceau ?

Au pied d'une croix, il fit piquer le mésothorax de Jules avec le dard de l'espèce locale de tarentule, la lycose. Puis il procéda à l'ablation abdominale pour la confirmation du sexe masculin qu'oblitère le dimorphisme sexuel du scarabée. Son fils fut placé dans un cornet de papier[21] et le tout enfermé dans une boîte de fer-blanc à laquelle il attacha un cordon. Faisant tournoyer la boîte dans l'air à la manière d'une fronde, Fabre chercha à imprimer le tournis et désorienter le locataire de la ferblanterie, avant de le relâcher sans repère dans la Nature. Jules mourut dans la boîte. Tout ce temps, son complice Favier fut préposé à la tâche d'éloigner du périmètre expérimental les curieux et leurs bonnes femmes qui auraient la tentation de voir un rituel satanique.

La compagne de Fabre meurt peu de temps après, emportée par une épidémie de Baygon.

Instinct maternel

Déterminé à faire leur cracher leur maternité à la face de l'entomologie, Fabre a tout essayé pour mettre en lumière l' instinct maternel des scarabées dans ses volières. Une fois la ponte effectuée, la mère déserte les lieux en toute impunité, mais Fabre était résolu à placer l'instinct maternel au cœur de la survie, y compris à un niveau le plus bas de la chaîne alimentaire.

J'ai amassé la nitée récoltée dans les cols des poires stercorales à ma disposition, et je l'ai disséminée devant elle. Elle était saupoudrée d'œufs. Et elle ne savait qu'en faire. Deuxième expérience : j'essaye de la confiner dans le terrier. Peut-être qu'avec l'habitude de côtoyer les œufs, développera-elle un véritable instinct maternel, me dis-je naïvement. Au contraire, elle s'entête à remonter en surface. J'ai beau doubler l'épaisseur du plancher en terreau, elle déploie le double de force pour s'extirper du terrier. J'ai aussi constaté l'absence d'impact d'une coupure des antennes. Finalement, pour la retenir défnitivement, je l'ai noyée. Elle reste désormais en suspension parmi ses lentilles ovulaires, diffluant son putrilage dans la paresseuse solution aqueuse.

—Jean-Henri Fabre, Séries entomologiques

Les paralyseurs

Fabre constate, comme d'illustres entomologues tels que Léon Dufour et Platon Courbevoie avant lui, que la venaison accumulée dans le nid du Cerceris bupresticide témoignent d'une vie sournoise purement végétative. Pour lui, rien ne laisse place au doute au fait que le repas des larves est vivant, et donc mangé vivant par les vermisseaux de l'apiaire. Les paralytiques vivent plusieurs mois sous un régime de liqueur sucrée, et même plus longtemps que des individus sains, d'où il théorisa fameusement le principe du moindre effort selon lequel l'inaction allonge proportionnellement la vie. De son vivant, Fabre le prouva mieux que quiconque, car lui-même vécut à l'aise à 90 ans passés.

L'étude de la méthode de prédation du Cerceris révèle à Fabre une lucidité surprenante quant à l'économie de force déployée. L'insecte semble s'attaquer très sélectivement aux centres nerveux d'effection motrice, les ganglions cervicaux concentrés en une grappe spécifique chez les Buprestes. Cherchant lui-même à reproduire à l'identique le schème opératoire du vénateur escrimeur d'élite, il inocule à la pipette une gouttelette d'un liquide corrosif, l'ammoniaque, sur le conglomérat ganglionnaire de buprestes sains. La gouttelette nocive s'étale avec opulence sur l'amas nodal en dégoulinant un petit peu sur le thorax d'au plus 1 demi-centimètre de largeur, vaporise les jonctions nerveuses ou les dissout en une compote indifférenciée, causant l'immobilité instantanée de la proie. Fabre reproduisit enfin l'effet sur des cuisses de grenouille, unifiant les théories névralgiques entre le monde des insectes et celui des batraciens.

La reproduction

La reproduction obéit toujours à une loi de probabilité. La couvée d'une espèce sera d'autant plus pléthorique pour compenser statistiquement le taux de mortalité élevé. Mais alors, dans les cas les plus prolifiques du règne entomologique, pourquoi la mère ne pond-elle pas moins, pour assurer la survie de l'espèce autrement que sur un jet de dés ?

Le problème du baby-boom-qui-ne-fait-pas-boom devient poignamment aigu dans certains cas de surpopulation. Jean-Henri Fabre évoque celui de l'Anthophore nidifiant dans la tige creuse des ronces des haies émondées. Les œufs sont disposés dans des files de cellules faiblement cloisonnées entre elles. Or, la Nature ne laisse rien préjuger de l'ordre d'éclosion, et ce ne sont surtout pas les œufs les plus proches des extrêmités qui éclosent les premiers. Les premiers individus éclos piétinent et dilapident les œufs interposés entre eux et l'issue de sortie.

Soit une tige creuse à double embouchure, composée de 2 cellules d'affilée avec une interposée au milieu (ce qui fait 3 d'affilée pour faire simple), et supposons que l'œuf du milieu éclot le premier. Qu'il prenne la sortie de gauche ou de droite, il est obligé de détruire un œuf au passage.

Cas basique de 3 cellules dans un tige creuse de ronce, avec l'individu du milieu né en premier.

Le problème se pose donc dès qu'on atteint 3 individus. Cette conclusion recoupe l'expérience humaine : qu'elle soit de nature politique ou conjoncturelle, la réduction de natalité à 2 enfants ou moins par couple est de constat courant dans les pays développés. Fabre en a tiré la fameuse déduction que les insectes sont encore plus cons que les africains.

Les Hyménoptères

Fabre est reconnu jusqu'à Boston pour ses études de l'Hyménoptère, et en particulier le Sphex, qui ne saurait être confondu avec la Guêpe. Dans un cours donné à des jeunes filles du couvent, il est réputé pour avoir déclaré :

J'adore le Sphex. J'aime et j'arrête pas de penser au Sphex. Surtout quand il est assez gros pour entrer dans les Hymenoptères.

—Jean-Henri Fabre, Séries entomologiques

Il ne tarissait pas dans sa soif pour la science, qui était pour lui, bien avant Gini, la plus chaude des boissons froides. Plus tard le frappe la révélation. Il découvre que le sphex peut avoir des ailes (jaunes en l'occurrence). Sur le ciel de sa contemplation méditative se découperont dès lors des patrons d'un nouveau genre bien frétillant.

C'est dans cet hagardement légitime qu'il reçoit la visite de Louis Pasteur. Celui-ci a été mandaté pour éradiquer une épidémie de pébrine chez le ver à soie, le Bombyx des muriers. Mais un froid s'instaure entre les deux hommes. À l'instar d'un Darwin qui confondait complaisamment Sphex et Guêpe, Louis Pasteur mélange Bombyx des muriers et Bembex, ce qui ne s'accorde pas avec l'exigence scientifique du Sérignanais pure souche qui considère que Sphex et Bembex constituent une classe à part.

Les grandes théories

L'instinct

Le Roi Soleil

Fabre fut le premier à réfuter les fables de Jean de la Fontaine comme non-scientifiques. Il accuse l'affabulateur de faire parler dans ses correspondances privées un certain "Roi Soleil" au milieu de sa cour hypothétique composée de :

Pour lui, le talent de l'animal au sens large est l'instinct, le substitut de l'intelligence. L'abeille maçonne en toute activité obéit à une séquence d'actions figée qui ne lui laisse aucun loisir de s'adapter aux éventuels imprévus comme l'échange de son nid avec un autre pendant qu'il maçonne, voire le retrait pur et simple du nid : la maçonne continuera de maçonner, puis éventuellement à garnir ce qu'il peut de miel et de farine de pollen.

Après lui avoir volatilisé son nid, l'abeille ne se frotte pas les antennes, signe de perplexité qu'on lui connaît si bien. Pour elle, tout semble on ne peut plus normal, ou du moins elle s'en convainc avec tout le recours à l'énergie du désespoir. Mais même la névrose et la psychose ne sont pas assez basses pour renvoyer l'ascenseur à ces pauvres bêtes de diligentes mais frustres. Je soupçonne fortement ce bestiaire volant d'être aussi déficitaire en mœllons de cervelle que les os des oiseaux sont creux.

—Jean-Henri Fabre, Séries entomologiques

Avec de l'intelligence, l'Homme sait contourner l'ordre des traditions pour les tourner à son avantage. Par rapport à la démarche traditionnelle suivante : rencontre → mariage → sexe → enfants blonds → vie heureuse pour toujours, l'Homme saute couramment les étapes menant jusqu'au sexe, et s'il est marié et casé, continuera de sauter les cases, mais cette fois avec d'autres femmes que la sienne.

Néanmoins, Jean-Henri Fabre a plusieurs fois évoqué la supériorité de l'animal sur l'Homme, notamment dans l'élevage des bébés. Une larve se satisfait d'une venaison d'un seul specimen adulte, généralement une belle pièce bien fraîche d'acridien paralysé. Les meilleurs sont les bousiers qui mangent et vivent dans leur pelote stercoraire. La pelote consommée, ils crépissent leur terrier et consolident leurs cocons d'orfèvre avec la pulpe récyclée de leurs scories intestinales. En comparaison, le bébé humain ne sait absolument rien faire, et surtout pas fermer sa gueule.

Les critiques

Jean-Henri Fabre a stigmatisé ses critiques sur le soi-disant paradoxe créationniste : donc, si les animaux sont inférieurs à nous, cela signifie-t-il que le Créateur n'est pas parfait, puisqu'il a tout créé ? Sa contre-critique s'articule en 2 points de clarification de sa doctrine :

  1. Si les animaux nous sont supérieurs, c'est parce qu'il y a un design originel (doctrine créationniste de base).
  2. Mais si les animaux nous sont inférieurs, ce n'est pas par manque d'effort du Créateur, bande de nihilistes, mais parce que nous sommes plus que des bêtes.

L'essentiel de la démonstration de Fabre frappait là où ça fait mal : ses critiques n'étaient qu'une bande de nihilistes. Repensez-y avant de critiquer à nouveau.

Réfutation de la sélection naturelle

Fabre ne laisse aucun doute par rapport à la « mystique » de la sélection naturelle. Celle-ci ne s'insère pas dans le canevas impérieux de la survie : soit l'espèce est originellement adaptée et survit, soit elle ne l'est pas et succombe sans la moindre chance de perpétuer la race. Aucune marge d'évolution ne saurait entrer dans le cadre rigide de la survie.

Le célèbre auteur a établi l'analogie avec l'éducation sexuelle :

Regardons la confusion du jeune homme devant le choix pléthorique d'orifices où il peut fourrer son organe. Qu'il se trompe d'orifice et voilà que sa lignée s'éteint. Et que dire des pauvres hommes jetés sur la voie de la mauvaise interprétation quand ils se trompaient de trou pendant que leur femme les trompait et tombait enceinte d'un autre : ils persistaient avec un regain de zèle sur le même orifice erroné, la croyance chevillée au corps qu'ils faisaient récital de l'acte procréationnel. Or ils ne faisaient qu'exterminer leur propre race, sans possibilité de s'en remettre à une bien élusive "évolution".

—Jean-Henri Fabre, Séries entomologiques

Enfin, si la théorie était si effective, pourquoi Fabre connut-il si peu de difficulté dans l'acte d'expropriation des rouleurs de pilules stercoraires ? La théorie voudrait que le scarabée se muât en super-insecte musculairement très puissant pour refouler la menace humaine si évidemment nuisible à l'espèce. Fabre pousse le raisonnement en contrastant à l'Homme : si l'Homme ne peut pas atteindre la Lune, il construit une fusée. La possibilité de traverser la stratosphère est un obstacle exceptionnel à l'activité d'aller chercher quelque chose à un point quelconque au-delà de l'atmosphère terrestre anti-astéroïdale. L'Homme s'adapte donc en conséquence, mais pas l'insecte, toute proportion gardée. Or, une fourmi construisant un delta-plane pour conquérir de nouveaux territoires n'a jamais été observée hors d'un laboratoire.

Observateur inimitable, Jean-Henri Fabre ne croyait que ce qu'il voyait.

D'un autre côté, et pour lui rendre justice comme le fit un Yves Delange, Fabre nuança son anti-darwinisme primaire en cautionnant la thèse que Darwin lui-même, celui qu'il surnommait affectueusement « le vieux singe anglais », descendait effectivement d'un singe.

Hommage

Deux ans avant sa mort, Charles Darwin reçoit une machine à écrire Remington pour l'ensemble de son œuvre. Jusqu'à sa mort, confiné à la chaise roulante, il continue de taper à la machine une apologie encyclopédique de l'intégrale de Jean-Henri Fabre. Il est déclaré sénile par l'Église. Pour préserver la réputation immaculée du géronte, son éditeur masque l'affaire en imputant tous les papiers à un singe consigné à son assistance, qui pour l'anecdote se nommait Ouiki. Ouiki aurait tout simplement tapé à la machine au hasard, obtenant un plaidoyer larmoyant en faveur de Fabre ─ le fait de taper n'importe quoi et de donner un texte pro-Fabre passait pour relativement cohérent à l'époque. Ouiki préparait aussi à Darwin ses perfusions et savait tenir une conversation limitée au strict nécessaire. Le paralytique Darwin apprit ainsi la communication par grimaces syphilitiques : le langage des signes de démence précoce.

Remerciez Jean-Henri Fabre, Ouiki et Charles Darwin (posant sur la photo) : c'est grâce à eux que la désencyclopédie existe et qu'ardkorpédia c'est de la merde.

Voir aussi

Notes

  1. « Dieu ne joue pas avec des dés », dit fameusement Einstein.
  2. « Mais Dieu joue avec des dés pipés », dit fameusement Einstein.
  3. Attention ici à la subtilité orthographique.
  4. Cf. le chef-d'œuvre du compendium pédagogique Il était une fois la vie.
  5. Moi aussi je sais pas ce que ça veut dire. Tu vois, je suis aussi con que toi.
  6. Ça se voit bien qu'il n'a pas d'yeux.
  7. Je reviens sur la phrase du ver qui explose. Normalement le comique de spontanéité (c'est le cas de le dire) devrait faire son effet, mais certains attardés mentaux en sont encore à se demander où est le ressort comique. Le voici : CHressort.gif
  8. Il n'y était pas. T'as déjà vu une note en bas de page utile sur ce site de merde ?
  9. Non mais c'est vrai quoi, c'était drôle. Un ver qui explose ! Genre Chuck Norris en combinaison spatiale, et même que ça s'appelle le Chuckworm Norris ! Merde quoi !
  10. Yves Delange, Fabre, pionnier de la bio-phénoménologie du sexe, pp. 245-246
  11. D'habitude les laboratoires sont morts.
  12. Journal dont 10 minutes est la parodie qui sera parodiée par 20 Minutes qui sera parodiée par 1/2 Heures qui sera parodiée par 20 000 ans dans les rames bondées en temps de grève
  13. La légende raconte qu'une châtaigne était un jour tombée sur la tête de Jean-Henri Fabre.
  14. Faut vraiment être con pour rire à cette blague pourrie.
  15. Comme tout homme sait, les premiers jets sont les meilleurs.
  16. Règle n°28 de la désencyclopédie : Tout article politiquement correct contiendra nécessairement les mots "caca" et "zizi".
  17. Pratique, ça évite la confusion entre suck et fuck par exemple.
  18. Edmond Rostand, auteur de la pièce Cyrano de Bergerac.
  19. Celle-là elle va passer inaperçue.
  20. Toute coïncidence avec des personnes physiques ou morales, réelles ou fictives blablabla
  21. En déduire que Jules était une merde est un pas de plus vers la calomnie que nous ne souhaitons pas faire.


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