Les Oiseaux

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Alfred Hitchcock va-t-il s'envoler ?

Les Oiseaux (The Birds en version originale) est un film américain réalisé par Alfred Hitchcock et sorti sur les écrans en mars 1963. Quarante-huitième long-métrage d'Hitchcock, il est considéré aujourd'hui comme un des films les plus aboutis de son œuvre, tant d'un point de vue technique qu'artistique.

Le film est une adaptation de la comédie d'Aristophane Les Oiseaux (Ορνιθες en version originale) écrite en 414 av. J.-C. et jouée pour la première fois la même année lors du Festival de Dionysos. Si Hitchcock s'était déjà essayé à la mise à l'écran d'une pièce de théâtre, notamment avec Le crime était presque parfait en 1954, son choix d'adapter une œuvre grecque antique surprit beaucoup, bien que le film fut décrit par la suite comme « un chef-d'œuvre d'horreur et de suspense derrière lequel transparaît, en filigrane, une satire acérée et fantaisiste de la société athénienne du cinquième siècle avant notre ère. »

Distribution

  • Tippi Hedren : Pisthétaïros
  • Rod Taylor : Evelpidès
  • Veronica Cartwright : La Huppe
  • Jessica Tandy : Proknè (rôle muet)
  • Suzanne Pleshette : Poséidon
  • Malcolm Atterbury : Iris

Le film

On notera que les jeux de mots en grec ancien, traduits en anglais pour le film, ont été plus ou moins restitués en français, mais pas toujours.

Acte I

Scène I

Pisthétaïros et Evelpidès, qui viennent de se rencontrer dans un magasin d'animaux à Athènes, décident de partir en week-end à Bodega Bay pour souhaiter bon anniversaire à La Huppe, ancien roi grec transformé en oiseau. Ils marchent donc vers Bodega Bay tout en devisant, plus ou moins guidés par un couple d'inséparables achetés à Athènes.

Pisthétaïros. — Oh là là, quelle misère ! Voilà près de quarante lieues que nous tournaillons ainsi sans arriver nulle part. Cela finira par me crever !
Evelpidès. — Mon cher Pisthétaïros, voilà ce que c'est de se fier à des inséparables !
Pisthétaïros. — Eh quoi donc, l'ami, tu sais mon nom ?
Evelpidès. — Eh bien oui, principale aire urbaine[1] ! J'étais là quand on t'a jugé au tribunal l'autre jour.
Pisthétaïros. — Alors tu sais pourquoi je quitte Athènes, tel jadis Exestidès[2], cette ville aux procès incessants, et m'en vais rejoindre Bodega Bay. Es-tu de la phratrie de mes adversaires ?
Evelpidès. — Non, mon coquin, je suis avocat. Je te suis car les procès d'Athènes commencent également à me sortir par les narines.
Pisthétaïros. — Eh bien, mon cher, puissions-nous rencontrer La Huppe et puisse-t-il nous amener à la cité des oiseaux, loin des manies processives d'Athènes.
Evelpidès. — Et toi, l'ami, si je ne suis indiscret, de quoi vis-tu ?
Pisthétaïros. — Oh… Mon père est directeur du Daily News.

Scène II

Les deux comparses arrivent à Bodega Bay et tentent de trouver La Huppe. Ne le trouvant pas, Pisthétaïros va demander au postier de Bodega Bay. Ce dernier, face au personnage incarné par la gracieuse Tippi Hedren, aligne des équivoques obscènes typiquement aristophaniennes, restituées le mieux possible ci-dessous.

14ème minute : caméo d'Hitchcock (indiqué par la flèche rouge)
Pisthétaïros. — Bonjour. Pourrais-je vous demander un renseignement ?
Le postier. — Oui, joli minois, je ferai de mon mieux.
Pisthétaïros. — Je cherche le roi La Huppe.
Le postier. — Et moi je chercherai bien ta raie, ma puce, huhu.
Pisthétairos. — Hum hum haha c'est-à-dire…
Le postier. — Le roi t'intéresse ? Et le doigt, mh ?
Pisthétaïros. — Vous pourriez me dire où il habite s'il-vous-plaît ?
Le postier. — De l'autre côté de la baie, il habite en face ! Je préférerais avoir la bite en fesse, mouahaha.
Pisthétaïros. — Ah bon. Et on y accède comment ? Je peux prendre un bateau ?
Le postier. — Bien sûr, il suffit de le décrocher de la bitte. Tu préférerais pas t'accrocher à la mienne ?
Pisthétaïros. — C'est à dire que nous fuyons Athènes, il y a tellement de délation…
Le postier. — τί οὖν, ἔφην, οὐκ ἀπεδύσαμεν αὐτοῦ αὐτὸ τοῦτο καὶ ἐθεασάμεθα πρότερον τοῦ εἴδους ; πάντως γάρ που τηλικοῦτος ὢν ἤδη ἐθέλει διαλέγεσθαι.[3]
Pisthétaïros. — Haha d'accord, merci ! Dites-moi, connaissez-vous le prénom du roi La Huppe ?
Le postier. — Hum… je crois me souvenir qu'il s'appelle Alice… (il appelle quelqu'un en coulisses) Harry, quel est le prénom du roi La Huppe ?
Voix de Harry. — Térée ?
Le postier. — N'était-ce pas plutôt Alice ?
Voix de Harry. — Non, c'est Térée.
Le postier, à Pisthétaïros. — C'est Alice.
Pisthétaïros. — Fort bien, mais en êtes-vous certain ?
Le postier. — Mh… Non. Mais ça doit être Alice.
Pisthétaïros. — D'accord, parfait. Merci.
Le postier. — Oui, ce doit être Alice ! À bientôt, et l'herbe musicale[4] !

Scène III

Pisthétaïros sort de la poste.

Evelpidès. — Alors, camarade ?
Pisthétaïros. — Par Héraclès, j'ai bien cru que je ne parviendrais pas à me défaire de ce coquin-là.
Evelpidès. — Eh bien ! Qu'a-t-il dit ? Tu me fais bouillir d'impatience avec tes imprécations !
Pisthétaïros. — Il m'a indiqué l'endroit où La Huppe demeure, même Lysicrate[5] ne pourrait s'y perdre.
Evelpidès. — Alors allons-y ! Je marche à ta suite !
Pisthétaïros. — Pour six répliques, ça valait la peine de faire une scène…

Scène IV

Les deux compagnons arrivent au bord de la baie. A lieu alors la fameuse scène de l'attaque de la mouette, dans laquelle est amorcée la menace que représentent les oiseaux.

Pour cette scène, Hitchcock a évidemment repris les dialogues d'une autre pièce, La Mouette, écrite en 1896 par Anton Tchekhov.

Evelpidès. — Si Zaretchnaïa arrive en retard, nous allons rater tous nos effets. Elle devrait déjà être là. Son père et sa belle-mère la surveillent, il lui est aussi difficile de sortir de sa maison que d'une prison. (Il arrange la cravate de son oncle.) Tu as la tête et la barbe en broussailles. Tu devrais peut-être te faire couper les cheveux, ou je ne sais pas…
Pisthétaïros, lissant sa barbe. — C'est le drame de ma vie. Même quand j'étais jeune j'avais déjà le physique d'un alcoolique, et ainsi de suite. Les femmes ne m'ont jamais aimé. (S'asseyant.) Pourquoi ma sœur est-elle de mauvaise humeur ?
Evelpidès. — Pourquoi ? Elle s'ennuie. (Il s'assied près de Pisthétaïros.) Elle est jalouse. Elle est déjà contre moi et contre le spectacle et contre la pièce, parce que ce n'est pas elle qui joue, mais Zaretchnaïa. Elle ne connaît pas ma pièce, mais déjà elle la déteste.
Pisthétaïros, riant. — Ce que tu peux inventer tout de même…

Soudain, une mouette frappe violemment Pisthétaïros au visage.

Paf.

Scène V

Pisthétaïros. — Aïe ! Aïe ! Aïe ! Qu'est-ce qui lui prend, à cet oiseau-là ?
Evelpidès. — De par Zeus, Pisthétaïros, est-ce que ça va ?
La mouette. — Epopoï ! Qui êtes-vous donc ?
Evelpidès. — Nous sommes des Athéniens. Mais ça serait plutôt à toi de nous le dire qui tu es !
La mouette. — Je suis l'oiseau esclave du roi Cathy La Huppe, du meilleur opus de la Caroline[6] !
Evelpidès. — Cathy La Huppe ! Son prénom était donc Cathy !
La mouette. — Depuis qu'il s'est changé en oiseau, le roi se porte comme un coq en pâte ![7]
Evelpidès. — Pourrait-on le voir, bel ami emplumé ?
La mouette. — Le voici.

Entre La Huppe, accompagné de danseurs. Il avait les yeux couleur rubis et les plumes couleurs de la nuit. À son front, brillant de mille feux, l'oiseau-roi couronné portait un diamant bleu.

La Huppe. — Eh bien, mon serviteur, qui sont donc ces étrangers ?
La mouette. — Chef, ce sont des gens de la sage Hellas, chef.
La Huppe. — Que voulez-vous, étrangers ? Quelles pressantes affaires vous ont fait venir chez nous ?
Evelpidès. — Eh bien, mon bon roi, tout d'abord nous voulions vous offrir ce couple d'inséparables.
La Huppe. — Oh, ce sont de bien beaux oiseaux ! Juste comme je les voulais ! Sont-ce un mâle et une femelle ?
Evelpidès. — Je suppose que oui. Hormis cela, nous sommes à la recherche d'une ville où vivre est agréable.
La Huppe. — Eh bien, je ne sais. Pourquoi n’iriez-vous pas habiter Lépréon, en Élis ? Ou à Lokris la ville des Opontiens ?
Evelpidès. — Penser à la première me fait vomir, quant à la seconde, je ne veux pas finir comme talent de pierre[8]. Et chez les oiseaux, comment vit-on ?
La Huppe. — Nous voletons çà et là ; notre nourriture est le sésame blanc, notre repos se fait sur les branches des grands arbres.
Evelpidès. — Eh ! Moi, j’entrevois un grand dessein pour la race des oiseaux : elle deviendrait puissante, règnerait sur les hommes et viendrait à bout des Dieux immortels !
La Huppe. — Quelle histoire me racontes-tu ?
Evelpidès. — Bâtissez une ville ! Et ratissez les airs, qui se situent entre la terre et le ciel. Quand les hommes sacrifient pour les dieux, empêchez la fumée des viandes brûlées de monter jusqu'à l'Olympe.
La Huppe. — Par Dionysos, tes affabulations sont justes ! Nous bâtirons une ville ! Nous deviendrons les seuls dieux des hommes ! Les Dieux nous payeront un tribut pour avoir droit aux feux des sacrifices ! Nous…
Pisthétaïros. — Dites, vous n'auriez pas du désinfectant, vu que votre serviteur m'a méchamment cogné… ?
La Huppe. — Peu importe ! Mon anniversaire sera également le jour sacré de la fondation de la cité des oiseaux ! Venez avec moi !

Acte II

Scène I

Le roi La Huppe a invité les deux comparses chez lui et convoque tous les oiseaux.

21ème minute : caméo d'Aristophane (indiqué par la flèche rouge)
Térée. — Epopopopopopopopopopoï ! Io, Io ! Venez, venez, venez à moi, oiseaux, fidèles serviteurs, compagnons ailés, venez, vous qui survolez cités et campagnes, venez oiseaux de nuit, hiboux, chouettes, et vous aussi, tourterelles crétoises qui tricotez des pharmaciens bleus[9], merles fluets, pigeons voyageurs, pies, paons, gais geais, hâtez-vous de voler vers moi, gazouilleurs du printemps, venez à moi, car un étranger de la brillante Athènes est venu jusqu'ici avec moult idées : il veut nous faire rois mes frères, nous gouvernerons le monde ! Alors fondons une ville, et régnons sur les hommes !
Le chœur. — Popopopopopop ! Où est celui qui nous a appelés ? Nous sommes les oiseaux, voltigeurs libres et légers, nous sommes venus à ton appel pour devenir les maîtres du monde !

Chorégraphie des oiseaux

Epopopoï tititinx tititinx ! Nous sommes les joyeux habitants du ciel !
Tititititititititi ! Fêtons ensemble le salut de notre race !


La Huppe. — Et maintenant, Proknè, amène le gâteau !


Le gâteau ! Le gâteau !
Le chœur. — Ito ito ito, tu nous régales, seigneur !
La Huppe. — C'est un plaisir, sujets ! Mais maintenant, déguerpissez, nous allons procéder à la cérémonie de fondation dans la démicyclade[10].

Scène II

Evelpidès. — Bien, alors, comment allons-nous appeler cette nouvelle ville ?
Pisthétaïros. — Je ne sais pas, l'ami. Hégoïchtos ? Mnésiloque ? Ptéripterdès ? Eustrophion ?[11]
Evelpidès. — Et pourquoi pas Néphélokokkygia ?
Pisthétaïros. — Ha ha ha elle est bien bonne celle-là ! Tu es d'humeur à la fine plaisanterie ! Eh bien soit, nous la baptiserons Néphélokokkygia.[12]
Evelpidès. — Parfait ! Dans ce cas, fondons promptement cette cité et trinquons !

Entre Iris.

De gauche à droite : Iris, Proknè, La Huppe, Evelpidès et Pisthétaïros.
Iris. — Salut les mortels !
Pisthétaïros. — Heu… Bonjour.
Iris. — Je suis Iris, la messagère de l'Olympe. Les Dieux m'ont demandé de vous transmettre le message suivant :


μον στενάχοντο κατ πτόλιν· ατρ χαιο

πε δέ νάς τε κα άλλήσποντον κοντο,
ος μουν ρ' σκίδναντο ουν αιπαι να καστος,
Μυρμιδόνας δ' οκ εα ποσκίδνασθαι χιλλεύς,
αλλ' ωγε ος τάροισι φιλοπτολέμοισι μετηύδα·
Μυρμιδόνες ταχύπωλοι μο ρίηρες τα ροι
μυ δή πω π' χεσφι λυώμεθα μώνυχας ππους,
λλ' ατος πποισι κα ρμασιν σσον όντες
Πάτροκλον κλαίωμεν· γρ γέρας στ θανόντων.
ατρους πεί κ' λο τεταρπώμεσθα γόοιο,
οππους λυσάμενοι δορπήσομεν νθάδε πάντες.

Evelpidès. — Eh bien, ils n'y vont pas de main morte !
Iris. — Je reste ici pour vérifier que vous ayez bien fait ce qu'on vous demande, sans quoi l'Olympe mettra ses menaces à exécution.
Pisthétaïros. — Hum, non mais en fait barrez-vous.
Iris. — Ah non.
Evelpidès. — Dans ce cas je vais vous donner des coups de bâton.

Il la frappe. Iris s'enfuit.

Evelpidès. — Qu'elle aille en enfer avec ces menaces !

Scène III

Evelpidès. — Ouf. Nous allons pouvoir continuer.
L'inspecteur. — Coucou[13] !
Pisthétaïros. — Mais ça alors ! On ne peut pas fonder tranquillement !
L'inspecteur. — Méléas m'envoie pour veiller à ce Néphélokokkygia respecte nos textes de lois.
Evelpidès. — Méléas ? C'est qui ça ?
L'inspecteur. — Je ne sais pas. Il devrait y avoir une note en bas de page à propos de ce type, normalement.
Pisthétaïros. — Peu importe, retourne à Athènes, ou je vais te refaire le portrait !
L'inspecteur. — Je ne puis, ma mission est de veiller au respect de la constitution.
Pisthétaïros. — Dans ce cas je vais appeler les oiseaux à l'aide ! À moi les oiseaux !

Les oiseaux tournent autour de l'inspecteur et l'attaquent.

Pisthétaïros. — Alors, ça va mieux ?
Oui. Haha.

Scène IV

Proknè entre. Elle voit le cadavre de l'inspecteur, les vêtements lacérés, les yeux crevés, le visage ensanglanté et la nuque baignant dans le frais cresson bleu. Effrayée, elle s'enfuit.

Evelpidès. — Proknè, revenez ! Ce n'est qu'un inspecteur athénien !

Proknè revient.

Pisthétaïros. — Allongez-vous ici. Voilà. Evelpidès, laissez-nous seuls. Qu'y a-t-il Proknè ?
Proknè. — …
Pisthétaïros. — Ah, j'oubliais que vous êtes un rôle muet. Dites-moi vite ce qu'il se passe, on fera comme si on n'avait rien vu.
Proknè. — Cathy La Huppe est retenu en otage par des Dieux de l'Olympe, dans l'école de Bodega Bay.
Pisthétaïros. — Par Zeus ! Ils ont mis leurs menaces à exécution ! J'y vais !

Acte III

Scène I

Pisthétaïros saute dans sa voiture et arrive devant l'école de Bodega Bay. Il entre précipitamment mais les Dieux de l'Olympe sont en train de chanter une hymne, et font signe à Pisthétaïros de revenir quand ils auront fini.

Pisthétaïros va donc attendre à côté de l'école. Dans son dos, les oiseaux se réunissent.

Epopopoï popoï ?
Le chœur. — Tototorix totorix ! Nous sommes venus pour tuer les Olympiens et ainsi devenir les seuls vrais dieux du monde ! Ito ito ito ! Nous allons tuer tous ceux qui se trouveront dans ce bâtiment sans exceptions ! Nous allons créer la cité idéale pour nous moquer d'Athènes, et pour cela nous allons nous repaître de sang ! Plus rien ne peut nous arrêter ! Blikka blikka blikka !
Pisthétaïros, à lui-même. — Par Héra, s'ils tuent tout le monde, ils risquent également de s'attaquer au roi La Huppe ! Vite, je vais aller les prévenir !

Pisthétaïros entre dans le collège et va prévenir Poséidon.

Pisthétaïros. — Les oiseaux sont devenus fous, ô ébranleur des sols ! Vous feriez mieux de partir très vite. Regardez comme ils se regroupent par-delà les champs !
Poséidon. — Par moi-même, dépêchons-nous. Hum… Chers collègues, j'ai ici un ami qui voudrait voir la procédure d'évacuation des Dieux en cas d'incendie. Nous allons sortir silencieusement, puis, quand je vous dirai, nous allons courir aussi vite que possible.
Héra. — Non mais Poséidon, tu te prends pour qui ? Tu crois qu'on a besoin de lutter contre le feu ? Déjà si ce crétin de Prométhée avait pas déconné, on en serait pas là.
Hadès. — C'est vrai ça, tu te crois sorti de la cuisse de Jupiter ?
Zeus. — Hein, quoi ?
Hadès. — Oh ta gueule toi, tu m'énerves.
Athéna. — Pardon ?
Hadès. — Mais non Minerve, je t'ai pas sonnée, raah, c'est pas possible ça…
Déméter. — Écoutez mes amis, je crois qu'il faudrait conserver une énergie médiane.
Artémis. — Ouais ?
Poséidon. — Bon, sortons calmement, je crois que c'est encore ce qu'il y a de mieux à faire.
Héphaïstos. — Attendez, c'est pas juste, personne n'a fait de calembour avec mon nom !

Les Dieux sortent calmement du collège.

Poséidon. — Courez !

Les Dieux se mettent à courir, poursuivis par les oiseaux.

Les plus doués auront reconnu Hermès (à gauche).

La Huppe est blessé par un oiseau. Pisthétaïros vient le relever. Sous les attaques des oiseaux, ils vont s'abriter dans une voiture.

Pisthétaïros. — Nom de nom ! Attendons ici qu'ils partent ! Ces oiseaux sont devenus fous, ils ne vous ont même pas reconnu.
La Huppe. — Aïe… ma tête.
Pisthétaïros. — Mais… Qui êtes-vous, vous ?
Anton Tchekhov. — Bonjour, je suis Anton Tchekhov.
Pisthétaïros. — Qu'est-ce que vous foutez dans cette voiture à Bodega Bay ? Vous ne devriez pas être en Russie ?
Anton Tchekhov. — En fait, Hitchcock a fait une apparition discrète au début du film - un "caméo" - et Aristophane aussi. Comme un bout de ma pièce La Mouette a été cité à la scène IV de l'acte I je me suis permis de…
Pisthétaïros. — Mais c'est pas vrai… Ah super ! Un dramaturge russe, dans une voiture, ici ! Bravo ! Pour la crédibilité du film, c'est excellent ! Non mais vous êtes con ? Rah j'y crois pas…
Anton Tchekhov. — Hum... D'ailleurs, je viens d'avoir Jean Anouilh au téléphone. Il se demandait s'il ne pouvait pas avoir aussi un bout de pièce dans le film, histoire de pouvoir apparaître à l'écran,. Il a écrit plusieurs pièces qui pourraient servir : Colombe (1951), L'Alouette (1953), Chers zoiseaux (1976), …
Pisthétaïros. — Mais c'est pas vrai ça… Mais dans ce cas ramène aussi Georges Feydeau (Le Dindon), Roland Dubillard (Naïves hirondelles) et puis, je sais pas, Ionesco ! Tiens, il a écrit Rhinocéros, ça pourrait être marrant, un rhinocéros qui gambade au bord de la baie de Bodega Bay pour tuer des Dieux de l'Olympe. Rah le con. Et c'est qui dans le coffre ?
Anton Tchekhov. — C'est Daphne du Maurier.
Pisthétaïros. — Bon, conduis-nous au restaurant The Tides, je vais appeler un médecin pour La Huppe, et en profiter pour contacter les flics. Ça risque de ne pas en rester là avec vos conneries, Anton, je vous préviens.

Scène II

Anton Tchekhov conduit Pisthétaïros au restaurant, et en profite pour s'éclipser discètement. La Huppe a été confié à Poséidon le temps que les choses se tassent.

Pisthétaïros, au téléphone.Oui… c'est cela, des oiseaux… non, ils ont créé une ville et veulent dominer le monde… pardon ?… oui… c'est-à-dire que les Dieux de l'Olympe avait pris La Huppe en otage… oui, Cathy La Huppe… bref, il faudrait s'occuper de ça… ah, et Anton Tchekhov doit être quelque part dans la ville, si vous pouviez vous occuper de lui… oui, un des auteurs majeurs du théâtre russe… excusez-moi ? non, ça c'est Alexandre Pouchkine… y a pas de quoi, au revoir.
Une dame. — Des oiseaux qui attaquent les Dieux ? C'est ridicule, voyons, les Dieux sont des personnes tout à fait capables de se défendre face à de ridicules volailles !
Pisthétaïros. — C'est pourtant ce qui vient de se passer à l'école, madame.
Un homme. — C'est la fin du monde !
Cette dame m'a tout l'air d'être une chieuse.
La dame. — Non, ce n'est pas la fin du monde. Apprenez que les Dieux ont un cerveau extrêmement développé qui leur permet de se défendre dans tous les cas…
Pisthétaïros. — Mais je vous jure ! Il y avait Zeus, Hadès, Déméter…
La dame. — Différentes espèces de Dieux qui ne peuvent même pas se protéger entre elles ! Ridicule ! Sachez qu'il existe aujourd'hui en Amérique plus de 12 espèces de Dieux, ainsi qu'une centaine d'espèces de muses, satyres, esprits et divinités en tout genre. Les "Dieux" comprennent plusieurs sous-espèces : le dieu de première génération, le dieu de deuxième génération, le demi-dieu, reconnaissable à son état de mortel, bien que possédant des aptitudes divines, les dieux mineurs, parmi lesquels on différenciera encore…
Pisthétaïros. — Bon, fermez-la sinon Wikipédia va aussi vouloir faire un caméo.
Un homme. — Un whisky s'il-vous-plaît.
La dame. — N'empêche…

Arrive Evelpidès accompagné d'Iris.

Evelpidès. — Salut la compagnie !
Pisthétaïros. — Evelpidès ! Tu es là ! Par Achille, que se passe-t-il ?
Evelpidès. — Une nouvelle attaque d'oiseaux se prépare !
Iris. — C'est terminé, ils ont déjà blessé à mort plusieurs Dieux. Même Hercule, qui était pourtant venu à bout des oiseaux du lac Stymphale, n'a rien pu faire.
Evelpidès. — Ils vont revenir, hélas ! Je ne sais ce que nous pourrions faire…

Par la fenêtre, un homme en train de faire le plein se fait attaquer par un oiseau. Toute l'essence coule à côté.

Pisthétaïros. — Ça y est, ça commence.

Jean Anouilh arrive en voiture.

Evelpidès. — Il faudrait faire quelque chose pour apaiser ces oiseaux…
La dame. — Or, l'alimentation des Dieux se compose principalement d'ambroisie, de nectar et de…
Evelpidès.Bon sang, mais c'est bien sûr ! Un sacrifice ! Il faut faire un sacrifice pour les oiseaux et ils s'apaiseront !
Pisthétaïros. — Mais qui pourrions-nous sacrifier ?
Jean Anouilh, sortant de sa voiture en mettant les pieds dans l'essence. — Hé ! Bonjour !
Evelpidès. — Mais ? Qui est cet importun ?
Pisthétaïros. — Le voilà, notre sacrifié !
Jean Anouilh. — Vous me reconnaissez ? Je suis Jean Anouilh, un célèbre dramaturge et écrivain français, connu notamment pour Antigone et L'Invitation au château !
Evelpidès. — Mais enfin Pisthétaïros, on ne peut pas sacrifier comme ça un auteur majeur du XXe siècle sous prétexte que ça va arranger les choses.
Jean Anouilh. — Eh ! Vous m'écoutez ? Je vais vous lire un extrait de ma pièce L'Alouette !
Pishétaïros. — Mais on s'en fout de sa pièce ! Écoute Evelpidès, il s'agit là peut-être de notre seule chance de nous en sortir !
Evelpidès. — Tu as raison, allons-y.
Jean Anouilh. — T'as vu maman, je passe dans un film ! C'est Anton qui m'a dit de venir.
Pisthétaïros. — Hé ! Holà ! Jean, vous nous entendez ?
Evelpidès. — Jean ! Houhou ! Jean !
Jean Anouilh. — Alors, je commence : …
Pisthétaïros. — Jean ! Écoutez-nous Jean ! Heu… De quoi elle parle votre pièce ?
Jean Anouilh. — Hein ? Ah. Ça parle du procès de Jeanne d'Arc.
Pisthétaïros. — Ah bon. Eh bien, pour nous mettre dans l'ambiance, vous pourriez allumer un petit feu, vous ne pensez pas ?
Jean Anouilh. — Hein ? Mais...
Evelpidès. — Juste une petite flamme ! Allez, soyez sympa ! Jean ! Prenez une allumette et allumez-la !
Jean Anouilh. — Mais… !
Pisthétaïros, Evelpidès et tous les autres clients du restaurant. — Jean Anouilh, du feu, Jean Anouilh, du feu ! Ce soir il nous met le feu, ce soir il nous met le feu ! Allumer le feu, allumer le feu-eu-eu ! Jean Anouilh, Jean Anouilh, ouais !
Pisthétaïros. — L'invariance des équations de Maxwell entraîne immédiatement la constance de la vitesse de la lumière c dans tous les référentiels galiléens[14].
Jean Anouilh. — Bon d'accord, je vais m'allumer une petite pipe.
Le célèbre écrivain Jean Anouilh allumant sa pipe.

Jean Anouilh allume une allumette, laquelle lui échappe des mains et tombe dans l'essence, ce qui fait exploser la voiture de Jean Anouilh ainsi que Jean Anouilh lui-même.

Feu Jean Anouilh.
Pisthétaïros. — Yes ! On l'a eu !
Evelpidès. — Ô oiseaux, ô Dieux suprêmes, acceptez le sacrifice de ce dramaturge français et de sa voiture, puisse-t-il vous apaiser et vous redonner pitié de nos pauvres personnes !
Le chœur. — Amis oiseaux, les mortels ont fait sacrifice d'un des leurs pour nous ! Ils commencent à s'asservir ! Voilà un bien bel augure pour nous autres ! Allons nous concerter à l'abri, nous reviendrons tantôt les tourmenter de plus belle !

Les oiseaux s'en vont.

Acte IV

Scène I

Cadavre de dieu.

Après le départ des oiseaux, Pisthétaïros et Evelpidès vont rechercher La Huppe, chez Poséidon. Les oiseaux surveillent les environs. Les deux comparses arrivent silencieusement devant chez Poséidon, et le trouvent mort.

Pisthétaïros.Aaah !
Evelpidès. — Sapristi ! Un dieu est mort !
Pisthétaïros. — Cette fois, plus rien ne peut arrêter les oiseaux. Nous avons déjà sacrifié un homme, un dieu et une voiture, jusqu'où iront-ils ?
Evelpidès. — Nul ne le sait. Où est La Huppe ?

La Huppe fait un signe depuis une fenêtre de chez Poséidon.

Pisthétaïros. — La Huppe, venez vite ! Nous retournons chez vous, soyons prudent, la situation devient de plus en plus dangereuse.
La Huppe. — Hé, c'était votre idée je vous signale !
Pisthétaïros. — Pas le temps de discuter, mon roi, rentrons. Il faut que je reprenne ma respiration[15].

Ils s'en vont.

Scène II

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Pour les plus religieux d’entre nous qui choisissent de croire des mensonges, les humains de contributeurs de Wikipedia ont un article à propos de Les Oiseaux.

Le film s'arrête ici vu que la pièce d'Aristophane ne nous est pas parvenue entière. Nous ne possédons de la fin que quelques fragments ainsi qu'un bref commentaire de Clitarque d'Alexandrie dans le Nouveau Dictionnaire du Cinéma, qui nous indiquent que Pisthétaïros, Evelpidès, La Huppe et Proknè se cloîtrent chez La Huppe pour échapper aux oiseaux, et qu'ils parviennent à s'en aller malgré le triomphe final des oiseaux, prétexte à diverses chorégraphies.


Notes

  1. Litt : των γνωρίμων τεθνάναι : jeu de mots intraduisible.
  2. Philosophe grec de la période de Socrate dont nous ne possédons pas assez de renseignement pour comprendre l'allusion.
  3. Celui-là était tellement drôle que Hitchcock l'a laissé en grec.
  4. Litt. ἀτεχνῶς γὰρ λευκὴ : Jeu de mots intraduisible.
  5. Homme politique athénien. Personne n'a vraiment compris l'allusion d'Aristophane.
  6. Litt. : ταραχήίς και σκυθρωπή, jeu de mots sur ταραχήίς signifiant à la fois opus et Tarachèis.
  7. Vous avez vu ? J'ai réussi à traduire le jeu de mots ! Pas mal, non ?
  8. Minosthèthe, roi de Lokris, était mort en mangeant une pomme de pin, l'ayant prise pour une figue confite, sous l'effet de l'ébriété. Cela, évidemment, n'explique pas l'allusion d'Aristophane.
  9. Il ne s'agit pas d'un jeu de mots : la tourterelle crétoise (Amaurornis saxatalis) est effectivement un oiseau qui tricote des pharmaciens bleus.
  10. Cf. Les Thesmophories, vers 1123-1130.
  11. Rien à signaler.
  12. Là il devait y avoir un gag j'imagine….
  13. XD
  14. Jeu de mots : référentiels, ciel, oiseaux, haha.
  15. Normal : Poséidon étant le dieu du monde aquatique, sa maison est forcément sous l'eau.


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